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Vrai ou faux
Famine à Gaza : l'ONU a-t-elle manipulé les chiffres, comme l'accuse Israël ?
Israël rejette le rapport de l'ONU qui a déclaré la famine à Gaza, l'accusant de mensonges servant le Hamas.
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À la fin du mois d'août, l'ONU a déclaré l'état de famine dans le gouvernorat de Gaza, une zone dans la moitié nord de la bande de Gaza. Mais Israël rejette cette conclusion. L'État hébreu qui mène une guerre à Gaza depuis bientôt deux ans a publié une liste d'accusations précises. Selon lui, l'ONU a changé ses critères exprès, a fabriqué des chiffres, en a mis d'autres de côté, et a voulu servir la propagande du Hamas. Le Vrai ou Faux a contacté l'ONU pour avoir des informations sur ses méthodes.
L'ONU a-t-elle changé ses critères exprès ?
Pour savoir s'il y a des cas de malnutrition dans un pays ou une zone, l'ONU s'appuie sur deux indicateurs, d'un côté le rapport entre la taille et le poids des enfants, de l'autre leur tour de bras. Pour l'un, il faut qu'au moins 30% des enfants de 6 à 59 mois contrôlés soient trop légers par rapport à leur taille, pour l'autre qu'au moins 15% des enfants aient un tour de bras inférieur à 12,5 cm.
Israël affirme que l'ONU a "enfreint ses propres règles" car, selon lui, l'organisation privilégie d'habitude le premier indicateur et que, dans le cas de Gaza, elle ne s'est appuyée que sur le tour de bras.
Le programme de l'ONU qui évalue et classifie le niveau de sécurité alimentaire, l'IPC, "n'a pas changé ses critères", répond-il dans une longue explication. "Mesurer la malnutrition avec le tour de bras est une méthode standard depuis 2019 et a déjà été appliqué à d'autres analyses dans le passé, comme au Soudan en 2024 et au Soudan du Sud en 2020." L'évaluation du tour de bras "est très largement utilisée dans les contextes d'urgence, puisque c'est la mesure qui est la plus souvent disponible", ajoute-t-il.
Dans le cas de Gaza, seul cet indicateur était disponible. En raison du conflit en cours, les enfants n'ont pas pu être pesés. "Les tentatives pour mesurer la taille et le poids des enfants ont échoué à plusieurs reprises à cause de l'escalade du conflit, explique l'IPC. Ces enquêtes nécessitent une présence prolongée des équipes sur place, ce qui est trop risqué dans le contexte actuel."
Par ailleurs, l'IPC rappelle que, pour déclarer la famine, il s'appuie sur plusieurs preuves concordantes : le tour de bras, mais aussi des signes de privations alimentaires et de mortalité qui indiquent tous des "conditions catastrophiques".
L'ONU a-t-elle gonflé les chiffres ?
Israël accuse l'organisation internationale d'avoir gonflé les chiffres pour atteindre les seuils de la famine. Alors que l'ONU affirme que 16% des enfants contrôlés ont un tour de bras trop petit – ce qui est au-dessus du seuil des 15% nécessaire pour déclarer la famine – Israël accuse l'ONU d'avoir sélectionné les données pour gonfler les chiffres artificiellement. Selon lui, les données analysées par l'ONU concluaient que seulement 12,5% des enfants contrôlés avaient un tour de bras inférieur à 12,5 cm, en-dessous du seuil des 15%.
Dans sa réponse, l'ONU explique qu'elle n'a pas trié les données, mais qu'elle a remarqué qu'il y avait eu une forte dégradation de la situation pendant le mois de juillet. "Quand on regarde le mois de juillet en entier, en moyenne 12,5% des enfants souffraient de malnutrition. Cependant, calculer une moyenne mensuelle peut masquer des changements rapides dans la malnutrition aigüe, ce qui peut conduire à une sous-estimation de la sévérité de la crise", écrit l'IPC.
En regardant dans le détail, l'ONU a constaté que le seuil des 15% n'était pas franchi pendant la première quinzaine de juillet puisque 10,1% des plus de 10 000 enfants contrôlés avaient un tour de bras trop petit. Mais ce seuil a été franchi pendant la deuxième quinzaine de juillet, avec 16,4% des plus de 8 000 enfants contrôlés.
L'ONU a-t-elle volontairement mis de côté des données qui étaient contradictoires ?
Israël accuse l'ONU d'avoir caché des données. "Deux études, seulement une dans le rapport", dénonce-t-il. Le gouvernement israélien dénonce la mise de côté d'une base de données qui concluait qu'il n'y avait pas de famine à Gaza.
L'IPC assure avoir "considéré toutes les données disponibles". À Gaza, deux sources différentes avaient mesuré le tour de bras des jeunes enfants. L'IPC explique que, sur les deux sources, seulement un seul indicateur sur six était contradictoire.
La première a collecté des données en continu depuis la fin de l'année 2023, alors que la deuxième a fait trois salves différentes. "Étant donné la fréquence et la régularité de la collecte de données de la première source, il est probable qu'elle ait capturé fidèlement l'évolution de l'impact des facteurs d'insécurité alimentaire pendant la période entière", estime l'IPC. Il a donc privilégié la source qu'il estimait la plus complète et la plus fiable, avec en plus une mesure plus perfectionnée.
L'ONU s'appuie-t-elle sur des données provenant du Hamas ?
Israël reproche aussi à l'ONU de servir la propagande du Hamas en mettant en doute les données premières utilisées par l'ONU, qui sont notamment recueillies dans les hôpitaux.
Dans les zones rendues inaccessibles en raison d'un conflit en cours, l'IPC s'appuie sur des données qui sont collectées plus rapidement et qui sont complétées par des vérifications de leur fiabilité. Ces données sont collectées "dans des lieux où les gens se rassemblent pour faciliter l'accès à un large échantillon de personnes", explique l'organisation.
"À Gaza, les environs des hôpitaux sont considérés comme plutôt sécurisés et permettent d'avoir accès à des enfants des communautés alentours", ajoute l'IPC avant de préciser que ceux qui ont collecté les données, notamment des médecins ou autres professionnels du secteur médical, ont tous été formés pour le faire et le font régulièrement.
L'IPC précise que, loin d'être surestimées, leurs données sont plutôt sous-estimées parce que le tour de bras des enfants qui souffraient de malnutrition, mais qui n'étaient pas encore dans un état sévère n'a pas été contrôlé à nouveau par la suite, mais il est possible que leur état se soit dégradé.
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