Le vrai ou faux junior répond aux questions sur le "paracétamol challenge"

Depuis 2023, des adolescents américains se filment à l'hôpital après avoir ingurgité une importante quantité de paracétamol. Il s'agirait d'un défi, qui inquiète les autorités médicales en France.

Article rédigé par Antoine Deiana
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Attention à la surconsommation de paracétamol (Godong / Universal Images Group Editorial)
Attention à la surconsommation de paracétamol (Godong / Universal Images Group Editorial)

Les élèves des collèges Jules Ferry, dans l'Essonne, André Derain, dans les Yvelines et Françoise Dolto à Sierentz nous posent des questions sur le "paracétamol challenge", un défi sur le réseau social TikTok qui préoccupe les autorités sanitaires.

Wandrille nous demande : "Est-il vrai que le 'paracétamol challenge' consiste à ingérer une grosse quantité de paracétamol jusqu'à se retrouver à l'hôpital et est-ce vrai qu'il est né aux États-Unis ?"

Oui c'est vrai, ça vient bien des États-Unis et c'est vrai que depuis 2023, des vidéos sur TikTok montrent des adolescents hospitalisés après avoir consommé une grosse quantité de paracétamol. Beaucoup de vidéos en lien avec ce défi ont déjà été supprimées. Les seules qui restent sont celles qui alertent sur les dangers de sa surconsommation ou qui dénoncent ce challenge. L'ANSM surveille quand même la diffusion d'information sur ce sujet. Cet emballement médiatique pointe malgré tout un phénomène qui existe bien : consommer de grosses quantités de paracétamol et se retrouver hospitalisé pour cela.

Pour Mathieu Molimard, chef de service de pharmacologie médicale au CHU de Bordeaux, "c'est le plus stupide des défis, la pire des idées, cela correspond à un suicide."

Il détaille les risques d'une surconsommation de paracétamol : souffrir énormément lorsque le foie ne marche pas, hépatite avec des vomissements en continu, des douleurs atroces au niveau du ventre. Cela peut aller jusqu'à la greffe du foie qui vous transforme en malade chronique.

Oui, consommer de grosses quantités de paracétamol peut être mortel

Jade nous demande s'il est "vrai que le challenge paracétamol sur TikTok est mortel". Mathieu Molimard lui répond que "oui, l'intoxication au paracétamol peut être mortelle, il y a plusieurs dizaines de décès par an à cause de ce médicament, c'est la première cause de greffe de foie pour cause médicamenteuse et c'est pour cette raison d'ailleurs que le nombre de comprimés est limité dans une boîte, pour éviter les intoxications."

Le chef de la pharmacologie du CHU de Bordeaux précise qu'il "est difficile de dire si les intoxications qu'on voit arriver aux urgences sont liées à un challenge ou à une tentative de suicide parce que les adolescents qui arrivent aux urgences, ne s'en vantent pas." Une enquête est en cours pour déterminer si les cas d'intoxication de ces dernières semaines sont dus au "paracétamol challenge" ou à des tentatives de suicide.

Trois grammes de paracétamol maximum par jour (pour les plus de 50 kilos)

Jade se demande s'il "est vrai que chez les gens de moins de 50 kilos, il ne faut pas prendre plus de trois grammes de paracétamol par jour."

Pour les personnes de plus de 50 kilos, c'est trois grammes de paracétamol maximum par 24 heures et espacés d'au minimum 6 heures entre chaque prise. Donc, pas plus de trois grammes par 24 heures. Si on pèse moins de 50kilos, c'est un calcul en fonction du poids. Pour faire simple, c'est 60 milligrammes par kilo, donc par exemple pour une personne qui fait entre 30 et 35 kilos, il ne faut pas dépasser les deux grammes par jour.

Comment expliquer l'intérêt des jeunes pour ces défis ?

Andréa voudrait savoir "pourquoi certains jeunes sont-ils attirés par des défis aussi risqués sur les réseaux sociaux".

Grégory Michel, professeur de psychopathologie et de psychologie clinique s'est intéressé à cette question dans une étude qu'il a cordonnée pour l’éducation nationale. Il s’intéresse notamment aux jeux dangereux chez les adolescents.

Le rapport explique que l’adolescence est une période de la vie où l'on explore de nouvelles façons de faire, et où on veut vivre de nouvelles expériences, parfois extrêmes à travers ces jeux. Ajouter à cela, le fait qu’on se cherche quand on a 13, 14, ou 15 ans. On cherche à s’identifier à un groupe, s’y conformer, faire ses preuves aussi.

On est souvent très influençable, c’est-à-dire très dépendant de l'image qu'on renvoie aux autres. Donc faire des choses interdites, dangereuses, Grégory Michel, "peut leur permettre de se donner une meilleure estime de soi-même vis-à-vis des autres qui font ces mêmes choses dangereuses."

Certains adolescents qui manquent de confiance en eux n’osent pas dire non, par peur d’être rejetée et exclu du groupe. Selon les jeux, Grégory Michel identifie différents types de motivation. Pour ce défi du paracétamol, on retient la prise de risque, car ceux qui y participent ont conscience du danger, vont chercher à se tester, à se dépasser, savoir jusqu’où son corps peut aller face à un surdosage de médicaments. Il y a ensuite la recherche de sensations fortes et puis vient l’hospitalisation, et le post sur les réseaux sociaux pour prouver qu’on l’a fait en espérant que ça sera viral et très partagé.

Les réseaux amplifient la portée de ces phénomènes. Attention, une nuance avec le challenge paracétamol qui n’est pas propre à tous les défis dangereux, actuellement cela peut être associé aussi à une tentative de suicide. Une enquête est en cours pour déterminer si les cas enregistrés ces dernières semaines sont des tentatives de suicide ou une participation au défi.

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