Règles douloureuses : l'Espagne sur la voie du congé menstruel
Pour les femmes qui souffrent de règles douloureuses, invalidantes, l'Espagne veut créer un congé financé par l'Etat. Ce serait une première en Europe.
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Cette mesure fait partie d'un projet de loi plus large, adopté hier, qui vise à renforcer le droit à l'avortement. Sur la question des règles, le gouvernement souhaite que les salariées puissent poser des jours en cas de douleurs invalidantes, comme des crampes, des migraines violentes ou des vomissements qui touchent environ 15% des femmes. Ça fonctionnerait exactement comme un arrêt maladie classique – il n'y a pas de limitation de durée – signé par un médecin, et pris en charge par la Sécurité sociale.
Plus question en tout cas de se taire ou de dissimuler, dit la ministre de l'Égalité : "C'en est terminé du tabou, de la stigmatisation, du fait de souffrir en silence", dit Irene Montero, issue du parti de gauche Podemos.
Se acabó el tabú, el estigma, sufrir en silencio. Hoy somos el primer país de Europa que reconoce derechos de salud menstrual #LeySaludSexual pic.twitter.com/beLyoBz2o9
— Irene Montero (@IreneMontero) May 17, 2022
"Aller travailler en ayant mal, c'est fini" dit-elle. "Se bourrer de médicaments pour pouvoir aller travailler, c'est fini ! Devoir cacher pendant plusieurs jours au travail qu'on est mal, ça aussi c'est fini. Nous sommes le premier pays européen à reconnaître dans une loi que la santé menstruelle fait partie des droits sexuels et reproductifs de la femme". Comme pour les droits des LGBT ou la lutte contre les violences faites aux femmes, l'Espagne fait figure de pionnière en Europe sur le congé menstruel.
Les députés doivent maintenant adopter le texte. La majorité au Parlement est quasiment acquise – le texte a déjà été largement négocié en coulisses avant d'être présenté – mais le processus prendra encore quelques mois.
Le congé menstruel existe dans cinq pays seulement
Japon, Taïwan, Indonésie, Corée du Sud et Zambie. Au Japon, ce droit est inscrit dans la loi depuis 1947 mais c'est aux employeurs de déterminer à la fois la durée des absences et leur rémunération. Dans les faits une quantité infime de femmes y ont recours. En Corée du Sud c'est un jour par mois, non payé. Moins de deux femmes sur dix déclarent l'utiliser. Mais les entreprises qui ne respectent pas la loi sont soumises à une amende – symbolique, moins de 4 000 euros.
Sans attendre que les gouvernements s'emparent du sujet, quelques sociétés ici ou là proposent des "congés menstruels". C'est le cas d'un fonds de pension en Australie, d'une entreprise de livraison de repas en Inde... Et d'une PME en France qui fabrique du mobilier de bureau, Louis Design.
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La mesure a été mise en place le mois dernier seulement. Elle offre aux personnes menstruées la possibilité de poser un jour de congé supplémentaire tous les mois, sans justificatif médical ni perte de salaire. Les salariés, jeunes, se disent très fiers de "participer à la réduction des inégalités entre hommes et femmes".
Pourtant ce n'est pas forcément une mesure consensuelle. En Espagne il y a eu débat. Au sein même du gouvernement, certains ont pris leurs distances avec une mesure qui selon eux risque de créer de la discrimination. "Le fait de supposer que les menstruations seules nécessitent une attention particulière peut être inutile et nuisible" dit Andrea Fernandez, députée et secrétaire à l'égalité au Part socialiste (PSOE).
Las mujeres necesitamos investigación, diagnóstico y tratamientos adecuados para abordar los padecimientos asociados a nuestro aparato reproductivo. Asumir que la regla exige por sí misma una consideración especial puede ser poco útil y perjudicial.
— Andrea Fernández. (@afernb) May 12, 2022
L'argument est repris par les syndicats : les employeurs n'auront pas envie d'embaucher une femme si elle risque de s'absenter tous les mois. "Aux entretiens on nous demande déjà régulièrement si on veut devenir mère", dit la secrétaire adjointe de l'UGT, "Est-ce que la prochaine étape ce sera de nous demander si nos règles sont douloureuses ?" Malgré ces quelques notes discordantes, la majorité salue la fin d'un tabou d'arrière-garde, nourri par plusieurs siècles de culture patriarcale.
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