Ycare convoque son enfance dans un album éponyme : "C'est l'enfant qu'il y a en nous, qu'il faut écouter, qu'il faut suivre"

C'est par le biais du petit écran et de l'émission de télécrochet La Nouvelle Star diffusée sur M6 que le public a découvert, Ycare, lui, l'auteur, compositeur et interprète franco libanais et sénégalais. S'en est suivie une jolie histoire d'amour avec la chanson française qu'il défend, qu'il aime tant, et quelques artistes incontournables comme Zaz, Amel Bent, Axelle Red ou Patrick Fiori. Le 6 juin 2025, il sort son huitième album construit en deux actes intitulé Ciel et Terre. Au total, dix chansons, cinq par actes. Il est également en tournée avec deux dates à l'Olympia les 6 et 7 mars 2026. Le premier titre qui ouvre cet opus Tout à apprendre jette les vieux costumes, raconte qu'il faut acheter quelques plumes pour se faire des ailes et puis n'en garder qu'une pour écrire un poème sur un coin de la peau.

franceinfo : N'avez-vous pas la conviction que vous êtes né pour raconter de vraies histoires ?

Ycare : Peut-être qu'il fallait alors que j'en vive, d'où ces chemins de traverse. On essaie de justifier parfois le chaos, de lui donner un sens et il en a un quand on arrive à se retourner et à se dire qu'on en est revenu. Il faut être témoin de notre temps, en tout cas, c'est mon sacerdoce. Aujourd'hui, je n'aurais jamais cru me retrouver devant vous, sage, en bonne santé, relativement heureux pour raconter ces choses-là. Pourtant, ce hasard, ce chaos et ce destin m'amènent ici. Oui, je pense que je suis né pour ça, je ne sais pas pour combien de temps, mais tant qu'on est reçu, c'est tant mieux, c'est une bénédiction.

C'est un album éponyme, avec deux axes ciel et terre, mais ce qui prédomine, c'est l'amour. Vous avez toujours été dans cette sensibilité et dans cette capacité à nous transmettre des émotions qui nous correspondent. Est-ce que ce n'est pas ça la force de votre écriture ?

Je sais qu'aujourd'hui, je suis foncièrement porteur de ce mot qui est le plus galvaudé de notre siècle, l'amour. C'est Jacques Brel qui disait, "Jusqu'à nos 17 ans, on est un enfant et on construit des rêves. On passe notre vie d'adulte à essayer de réaliser l'enfance". Tous les chemins d'adulte que j'ai essayés de prendre menaient à ça. 

"C'est en passant par toutes les facettes de l'âge adulte que j'ai finalement retrouvé ce qu'il y avait de plus pur en moi, l'enfant, et c'est lui le plus sage."

Ycare

à franceinfo

Ce n'est pas le vieux sage qui a la marche à suivre, je vous le dis par expérience, par empirisme presque macabre, qui a failli être le mien, d'être allé à des extrémités très profondes pour venir dire aux gens aujourd'hui que la marche à suivre est l'enfant. C'est l'enfant qu'il y a en nous, qu'il faut écouter, qu'il faut suivre. Ce n'est pas cette espèce de pragmatisme bien sociétal, bien carré, qui est mue par la peur aussi. Aujourd'hui, je n'ai peur de rien, ni de l'échec, ni d'appréhender un succès.

Pourtant, à un moment donné, vous vous êtes demandé si vous aviez envie encore ou pas de vivre cette existence ?

Oui, mais il fallait peut-être que j'aille au fond de la piscine pour me dire, il y a un fond.

Là, il y a une forme de renaissance. On dit souvent que pour aimer les autres, il faut d'abord s'aimer soi-même. Est-ce que vous avez réussi à faire ce chemin-là ?

Les choses prennent du temps, mais on veut tout, tout de suite. Eh bien moi, j'étais pressé et avec l'espèce d'arrogance de ma vingtaine, je pensais m'aimer. Je ne m'aimais pas, je mettais le masque de quelqu'un qui s'aimait au détriment de l'autre. L'amour que j'ai pour moi doit être utile aux autres. Je respecte la chance quasiment divine de me lever tous les matins et de sentir mon index toucher mon pouce. J'en reviens à ces choses qui relèvent de l'enfance, quand vous passiez du sable sur la paume de votre main au bord de l'eau après déjeuner. Ces choses toutes simples sont très utiles au quotidien.

Qu'est-ce qui a fait basculer le Ycare, qui ne s'aimait pas, qui n'aimait pas le monde qui l'entourait, à celui qui aujourd'hui a un amour inconditionnel pour le monde qui l'entoure ?

Une chanson. Parfois, vous cherchez vos lunettes et elles sont sur votre front, il y a plein de trucs comme ça. C'est pour ça que dans Les Cités de l'amour, je dis, "On ne devient que, ce qu'on est depuis le début. Pas pour rien qu'on a survécu à nos regrets". C'est pour ça qu'il y a peu de chansons, il ne s'agissait pas d'en mettre plein, il s'agissait de mettre celles qu'il fallait parce que je voulais être précis dans ce que j'avais à dire, comme si c'était peut-être la dernière fois que j'allais le dire. 

"Peut-être que c'est mon dernier album et je le pense très sincèrement au moment où je vous le dis."

Ycare

à franceinfo

Il ne s'agit pas de faire pour faire, mais tant que je serai utile aux autres, quel que soit le biais, je chanterai. Le jour où ça ne le sera plus, il n'y aura pas ce faux ego qui me mènera à refaire des chansons pour en faire, il ne s'agit pas de ça.

Est-ce que la scène, c'est la cour de récréation et moment de tête-à-tête avec le public nécessaire ?

C'est un moment important. La récréation, c'est laisser tout le monde faire ce qu'il veut. Là, on oriente quand même le débat, on essaye de convoquer par le mot et par les notes des émotions parce que c'est ce qui fait sortir. Quand quelqu'un me dit, "Arrête, ça me fait pleurer cette chanson", c'est qu'il y avait encore de l'eau à essorer. Quand on a fini de pleurer, il ne reste que l'œil clair de celui qui est capable de voir de nouveau. On n'a plus l'œil embué.

Que représente cet album alors ?

Je pense que si on zoome assez fort, assez grand sur un point final, ça peut faire un cercle, une boucle bouclée.