Santa et la livraison des émotions : "Parfois, en donnant trop, on donne à crédit"

Santa est l'invitée exceptionnelle du Monde d'Élodie sur franceinfo pour revenir sur ce parcours d'artiste qui a débuté en 2009 avec le groupe Hyphen Hyphen. Elle s'est ensuite lancée dans une carrière solo qui a pris corps très vite par le biais d'un tube, le fameux Popcorn salé sorti au départ sur une plateforme. Ce qui ressort quand on écoute ses textes et ses chansons, c'est l'importance de l'amour au quotidien. D'ailleurs, le public est très réceptif et ils sont nombreux à venir la voir cet été 2025 dans de nombreux festivals avant qu'elle n'entame une très belle tournée des zéniths et un concert à l'Accor Arena, le 2 avril 2026.

franceinfo : Est-ce que ça épuise de chanter l'amour avec autant de justesse, de sincérité ? On a l'impression qu'il n'y a pas de demi-mesure avec vous.

Santa : C'est vrai, c'est trop ! Je le dis dans une chanson d'ailleurs que je préfère "les trop ou pas assez". Je le vois, parfois en donnant trop, on donne à crédit, alors il faut se protéger de ça, mais c'est de la discipline et c'est aussi une équipe qui dit stop. On ne peut pas être à la hauteur de chaque rendez-vous, alors parfois, il faut se préserver. Je pense que ce qui est épuisant, c'est de jouer un rôle et de se mettre en scène. Quand on est sincère, on le sait plus ou moins et on reçoit énormément, c'est une chance. Dans des métiers, parfois, on donne et on ne reçoit pas autant. C'est une des plus grandes jouissances et un privilège que de chanter face aux gens, d'avoir cet échange mutuel d'amour.

Un mot sur Recommence-moi qui est le titre de l'album, mais aussi le titre d'une chanson.

C'est une chanson qui est arrivée après Popcorn salé, parce que j'avais envie, je pense, de rythmer un peu les sentiments.

"C'était encore une chanson d'amour et je pense que je n'aurai de cesse de trouver des adjectifs pour ce grand sentiment."

Santa

à franceinfo

C'est le plus beau lien et je pense que c'est le dernier sentiment qui peut nous sauver, nous humains un peu perdus, l'amour que l'on peut porter à l'autre, puis à soi.

Le fait que les Enfoirés vous aient choisie, est-ce que ça vous touche ?

Ce qui me touche, c'est déjà le fait que ça existe encore et qu'il y a comme un poids dans chaque mot. Quand on est sur scène, il y a un moment où il faut même un peu se détacher de ça pour que le spectacle soit un moment de fête aussi, et se réjouir d'être ensemble et humains. C'est ça le panache de se réunir et de faire un spectacle, même si la cause est violente. Je suis allée rencontrer des bénévoles et visiter des centres de distribution. C'est d'une rare violence. On pratique tous de manière très collective le déni, je suis la première à le faire. Il y a un tel état d'urgence que je me devais d'être à la hauteur de ce rendez-vous. Je le regrette, il n'y a pas assez de chanteurs de ma génération qui prennent le relais de cette urgence collective alors qu'en France, le pays de la gastronomie, on manque encore de nourriture et de dignité face à l'humain.

À quel moment avez-vous découvert cette voix ?

Au lycée, quand je commence à écrire des chansons avec mon groupe et qu'on cherche une chanteuse ou un chanteur, on a une opportunité de concert. Je dis : "bon, je vais chanter en attendant". C'est là où je vois que ma voix résonne, même pendant ce premier concert, je m'aperçois qu'elle porte et qu'elle transporte un message. En plus, il y a quelque chose de physique quand on chante, de vouloir se projeter et c'est à ce moment-là que je m'en suis rendue compte.

On comprend, en vous écoutant, à quel point cette voix vous a obligée à vous faire violence.

C'est le paradoxe d'être tremblante. Vraiment, avant chaque concert, j'essaie tout. Je suis passée au troisième flacon de fleurs de Bach. J'essaie de trouver toutes les solutions possibles, même de travailler sur moi en me disant ce n'est pas grave si je rate, mais ce n'est pas vrai. En fait, j'ai envie que chaque moment soit le meilleur de tous mes possibles, je ne sais pas d'où ça vient.

Quand on vous entend chanter Recommence-moi, on est un peu submergé par ces émotions qui font ce que vous êtes.

Tant mieux. C'est un joli compliment parce qu'on a besoin d'être submergé par nos émotions. On a peur de les vivre parce qu'on est dans un moment de vie où on se regarde beaucoup et on se contrôle beaucoup. On contrôle son image, on a un rapport à soi qui peut être dans le jugement aussi de soi-même et ce n'est pas toujours gai.

"De se laisser submerger, de perdre le contrôle de son cœur et de laisser battre la chamade, c'est ce que je souhaite à tout le monde. "

Santa

à franceinfo

Je souhaite à tout le monde de se laisser porter par une émotion qui dépasse.