Michel Polnareff et l'exil américain : "Je suis parti sans un rond !"

À 81 ans, Michel Polnareff a vendu plus de 31 millions d'albums, donné des milliers de concerts dans le monde entier. Ses spectacles sont des événements à part entière, avec automates, confettis en forme de lunettes et instruments en plexiglas. Un surnom lui colle à la peau, c'est "l'Amiral" accompagné de ses moussaillons. Ce lien avec les fans de la première heure a débuté en 1972, il y a 53 ans, avec son concert à l'Olympia aux 6 000 affiches placardées dans la capitale sur lesquelles ils montraient ses fesses et où il était habillé en travesti. Le tribunal correctionnel l'a même condamné à 60 000 franc (un peu moins de 10 000 euros), pour cet attentat à la pudeur.

franceinfo : Comment est née cette envie de faire cette affiche, en tout cas, le fait d'oser montrer vos fesses à toute la France entière ?

Michel Polnareff : C'est une blague de potache ! Ce qui est marrant, c'est que le photographe qui a fait la photo, et l'attaché de presse, Gilles Paquet, voulaient absolument avoir le crédit que c’étaient eux qui avaient eu l'idée, ce qui est totalement faux, j'ai eu l'idée.

"Quand je suis passé en correctionnelle, Gilles Paquet ne savait pas pourquoi il avait son nom sur l'affiche et le photographe a dit qu'on avait pris ses deux doigts pour appuyer sur le bouton."

Michel Polnareff

à franceinfo

Vous avez toujours eu des vêtements pour vous protéger de celles et ceux qui vous jugeaient, mais avec une forme toujours d'excentricité, comme si la vie était morose et qu'il fallait la rendre un peu plus belle ?

Je pense qu'il y avait un côté flamboyant parce que si on ne montre pas quelque chose de différent, pourquoi est-ce que les gens vont venir et sortir de chez eux ?

Vous êtes parti aux États-Unis en bateau parce que vous aviez peur de l'avion, est-ce que c'est vrai ?

Non, je n'avais pas un rond ! Le mec m'avait tout escroqué et donc j'avais le billet pour Le France. J'avais la plus belle cabine du France et je me tapais l'eau du robinet parce que je n'avais pas d'argent pour payer le restaurant. N'oubliez pas que je suis parti sans un rond, j'ai des amis qui m'ont aidé, mais ça a été très dur.

La conquête des États-Unis est très dure pour les artistes français et vous, vous avez réussi immédiatement. Comment avez-vous vécu cette porte qui s'ouvrait devant vous ?

Je voulais vraiment devenir inconnu. Je pense que je voulais être célèbre, mais après je me suis dit, la vie d'homme, c'est assez important quand même. Jesus for tonight a été très haut dans les charts et il y a eu une plainte de catholiques disant : "On ne peut pas dire ça". Moi, je trouvais ça mignon, "Je ne sais pas comment transformer l'eau en vin, mais je voudrais ton Jésus pour ce soir". Ça a été très mal pris, il y a eu une plainte et ils l'ont enlevée des charts.

Avec Lipstick en 1976 et Lettre à France en 1977, vous avez eu besoin d'enfoncer le clou et d'émettre un cri du cœur. Qu'est-ce qu'elle représente cette France pour vous ?

C'est une chanson importante.

"Ça montre une tristesse de ne pas pouvoir rester chez vous, notamment en pleine gloire."

Michel Polnareff

à franceinfo

En concert, je chante a cappella et le public connaît les paroles par cœur. C'est très émouvant.