François Berléand emmène les spectateurs dans les coulisses du théâtre : "On s'amuse comme des fous"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Lundi 15 septembre 2025 : le comédien François Berléand. Il joue à partir du 24 septembre dans la pièce "L'expérience théâtrale", au Théâtre de la Michodière.

Article rédigé par Elodie Suigo, Étienne Presumey
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6min
François Berléand, le 11 avril 2025, à Arles. (JEAN MARC FERRÉ / MAXPPP)
François Berléand, le 11 avril 2025, à Arles. (JEAN MARC FERRÉ / MAXPPP)

C'est après et pendant ses études de commerce que François Berléand s'est découvert une passion pour le théâtre. Monter sur scène l'a immédiatement fait vibrer au point de ne penser presque qu'à ça, ce qui a fait de lui, un obsédé textuel avec comme premier soutien Nicole Garcia et Josiane Balasko. Le public l'a ensuite découvert à 45 ans avec le film Le septième ciel de Benoît Jacquot dans le rôle du Docteur, en 1997. Il a ensuite enfoncé le clou avec le César du meilleur acteur dans un second rôle, dans le long-métrage, Ma petite entreprise, en 2000. À partir du 24 septembre 2025, au Théâtre de la Michodière, il célébrera les 100 ans de ce lieu devenu mythique avec la pièce écrite pour cet anniversaire de Laurent Ruquier, L'expérience théâtrale. Il sera aux côtés de Max Boublil, dans une pièce qui est une expérience pour les acteurs, mais aussi pour le public, puisque les acteurs observent les spectateurs avant de les emmener dans les coulisses du théâtre.

franceinfo : Quand on regarde bien, on se demande qui est observé et on se rend compte que finalement, ce ne sont pas toujours les mêmes personnes et qu'on a un peu inversé le fonctionnement du théâtre.

François Berléand : Tout à fait. C'est nous qui regardons le public et le public est le spectacle. Enfin, cela, c'est le point de départ de la pièce, mais ce qu'on lui propose, c'est un peu de voir les coulisses du théâtre, les noms, les situations et donc du début jusqu'à la fin, on propose une représentation avec tous les à-côtés du théâtre. Les gens qui toussent, les portables, parce qu'ils sont très importants maintenant. Je peux dire que par moments, c'est très dérangeant, là, cela ne nous dérangera pas parce qu'on a les mots pour et on s'amuse comme des fous avec Max. Surtout, quand j'ai lu la pièce, j'étais mort de rire parce que je trouvais ça très intéressant de montrer les à-côtés. Il y a quelques petites pépites que je laisse au public le soin de découvrir.

Sur scène, vous donnez la réplique à Max Boublil. Donc, là, on a vraiment deux acteurs de deux générations, totalement différentes, qui ne voient pas forcément ce métier d'acteur de la même manière, ce qui est un peu le cas dans la vraie vie. C'est un peu le vrai regard que vous avez l'un et l'autre.

Tout à fait, c'est un garçon absolument délicieux et qui connaît la scène puisqu'il a fait du stand-up, mais le stand-up et le théâtre, ça n'a strictement rien à voir. Je lui ai dit, "Tu ne peux pas faire une fois ça et autre chose la prochaine, non, non, tu dois être dans un cadre bien précis. Après, à la 20ᵉ représentations, si tu as envie de faire ce que tu veux, tu fais ce que tu veux, moi, je te suivrais parce que j’ai l'habitude, mais au début, tu respectes."

Vous assistez, comme le public, au lever de rideau. Est-ce que cela vous touche toujours autant ?

Pour moi, c'est toujours affreux, c'est un trac qui m'envahit depuis toujours.

"Depuis que j'ai commencé, j'ai toujours eu un trac incroyable."

François Berléand

à franceinfo

En fin de compte, je n'ai jamais confiance et on n'a jamais confiance, quand on passe pour la première fois devant le public, pour la bonne raison, qu'on ne sait pas si ça va marcher ou pas. On va attendre les premiers rires, si ça n'arrive pas, on va être catastrophé puisque là, c'est une pièce drôle. Au contraire, si ça devait être une pièce tragique, on serait dans l'attente du silence le plus total, on entendrait une mouche voler et on serait content. Alors heureusement, j'ai le bon trac, dès que le rideau se lève, c'est fini. Tout va bien.

Mais qu'est-ce qu'il se passe avant alors ?

Je vais aux toilettes pour vomir, pour me débarrasser de tout ce que je peux avoir en moi et ça depuis toujours. Depuis la première fois où j'ai fait du théâtre, j'ai une pièce réservée.

Sur scène, il y a quelque chose qui est mis en exergue, c'est votre voix. Quel rapport vous entretenez avec cette voix si marquée et si reconnaissable ?

Je la hais, et c'est très étrange parce que depuis que j'ai commencé dans ce métier, on m'a toujours dit, "Tu as une voix incroyable" et dès que je l'entends, je me demande comment on peut dire que c'est une voix incroyable. Je ne la trouve pas belle, mais c'est ma voix, donc je vis avec.

Max Boublil, à un moment donné, dit : "Je veux mourir sur scène". Est-ce qu'on y pense à ça ? Est-ce que ce n'est pas le plus bel endroit pour tirer sa révérence ?

Moi, j'adorerais, parce que je ne m'en rendrais pas compte. Ce qu'il y a de formidable sur scène, c'est qu'on peut aller mal, avoir des douleurs partout et on arrive sur scène, on n'a plus mal. Une fois, j'avais joué avec 41° de fièvre, je rentrais sur scène, je jouais, je sortais sur scène, je tombais dans les pommes. Je n'avais même plus de force pour saluer. Donc, pour vous dire, dès qu'on est sur scène, l'adrénaline fonctionne à 100%.

"Si j'arrive à mourir sur scène, je serai le plus heureux des hommes."

François Berléand

à franceinfo

Est-ce que ce métier vous a changé ?

Oui, ce métier m'a rendu l'homme le plus heureux de la terre parce que j'ai eu 300 vies. À chaque fois, quand je suis au théâtre, je me dis, quand j'arrive à la fin, c'est quand même dingue, c'est comme une petite vie qui se termine. C'est un métier qui permet de mourir et puis de revenir, de repartir et de renaître.

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