"Être solitaire, ça, c'est délicieux", estime le chanteur Thomas Fersen

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Mardi 4 mars 2025 : l’auteur, compositeur et interprète Thomas Fersen. Il sort un album, "Le choix de la Reine", et il sera en tournée dans toute la France avec un passage par le Théâtre du Châtelet, le 5 juin prochain.

Article rédigé par Elodie Suigo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le chanteur français Thomas Fersen pose lors d'une séance photo dans son jardin à Paris, le 19 décembre 2022. (GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP)
Le chanteur français Thomas Fersen pose lors d'une séance photo dans son jardin à Paris, le 19 décembre 2022. (GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP)

Thomas Fersen est auteur, compositeur et interprète, ce sont les termes qui reviennent le plus souvent quand on lit ses biographies et tous les articles qui lui sont consacrés. De sa présentation auprès du métier et du public avec son premier disque Le Bal des oiseaux, il y a 32 ans, l'oiseau qu'il est, soucieux de ne pas oublier ses familles parce qu'il y en a plusieurs, a fait son nid. À voyager, a appris à déployer ses ailes pour mieux se poser dans son paradis. 

Aujourd'hui, Thomas Fersen sort Le choix de la reine et on le retrouve en tournée dans toute la France.

franceinfo : Le choix de la reine, ce sont 18 titres emblématiques de votre répertoire dont un inédit qui s'intitule Blasé. Blasé a beaucoup de visages.

Thomas Fersen : Il a beaucoup de visages. Il a celui de l'adolescent, l'adolescent qui pense avoir tout vécu, c'est un passage qu'on a tous connu et qui à la fois se répète à chaque génération. C'est pour ça que ce thème m'intéressait.

Pourquoi Le choix de la reine ? Pourquoi ce titre ?

C'est à la fois parce qu'il était question d'un choix, d'un choix de chansons dans mon répertoire, mais aussi parce qu'évidemment, Fersen, c'était l'amant de la reine. En quelque sorte, c'était le choix de la reine, c'est un petit clin d'œil.

Enfant, vous aviez déjà votre univers, vous écoutiez de la musique. Il y a cette fameuse chaîne hifi que vous manipuliez avec ses fameux gants blancs. Il y a du classique et en même temps des chanteurs complètement différents qui incarnaient le début du rock, les Beatles, Led Zeppelin, sous l'influence de vos deux sœurs. En tout cas, j'ai l'impression que vous avez rapidement compris que dans la théâtralité qui vous habitait déjà, puisqu’enfant vous incarniez beaucoup de personnages dans votre chambre, que la musique est devenue le lien.

La musique est arrivée d'abord parce qu'elle portait mon imaginaire avec ses ailes d'oiseau, donc que je mettais un disque et cela me conduisait à inventer des histoires, d'improviser des histoires.

"J'ai dans ma chambre, d'une certaine façon, inventé le théâtre sans savoir ce que c'était et sans mettre le mot 'théâtre' sur mon activité secrète, puisque la porte était fermée, et que mes parents ignoraient cette activité."

Thomas Fersen

à franceinfo

J'avais le goût de ça, de la narration, des histoires et puis, quand j'ai eu 14 ans, j'ai découvert ces instruments un peu vénéneux qu'étaient les guitares électriques et qui ont exercé une grosse influence sur le cours de mon existence. J’ai convaincu ma mère de m'acheter une guitare alors que je ne savais pas jouer. Nous sommes allés ensemble sur la Butte choisir un instrument dans un petit magasin.

Vous êtes très solitaire, mais vous n'aimez pas la solitude et dans Blasé, on aborde aussi la difficulté de l'adolescence. D'ailleurs, vous utilisez des mots qui sont forts : "Je vais me suicider". Enfin, ce sont souvent des termes qu'on entend dans la bouche des adolescents et qui nous font peur en tant que parents parce qu'on ne sait pas trop comment le gérer. La solitude vous fait peur, vous ? Est-ce que de temps en temps, vous avez eu des idées noires ou pas du tout ?

Absolument, bien sûr ! Moi, ce qui me fait peur dans la solitude, c'est que je suis convaincu que je deviendrai fou. Fou de me couper de ce qui me structure, c'est-à-dire la création. Par contre, être solitaire, ça, c'est délicieux. Solitaire, c'est simplement fermer la porte et savoir que les autres sont derrière. Voilà, c'est tout.

Il y a un côté fantastique dans cet album. Finalement, La montagne magique n'est jamais très loin.

C'est amusant que vous me parliez de ce livre ! Mon père avait essayé de me le faire lire à plusieurs reprises, sans succès. Et puis j'ai fait un premier voyage en 1986, seul. Au dernier moment, j'ai mis ce livre dans mon sac en me disant : tu vas être seul, tu auras peut-être un compagnon. Il te faut quelqu'un, un interlocuteur, ce sera ce livre. Et c'est effectivement le rôle qu'il a joué. Et aussi, il m'a remis le pied à l'étrier de la lecture que j'avais abandonné au moment de la grande catastrophe de l'adolescence. J'étais lecteur enfant, mais plus du tout après entre 14 et 24 ans. J'ai commencé à écrire des chansons en français parce que pendant mon adolescence, j'écrivais d'abord en yaourt et puis après dans un mauvais anglais.

"‘La montagne magique’ est un livre très important et peut-être aussi que ce pseudonyme de ‘Thomas Fersen’ en vient en partie parce que j'aimais ce nom de Thomas Mann. Je le trouvais romanesque et il était question pour moi d'inventer un double que j'allais pouvoir nourrir de ma création."

Thomas Fersen

à franceinfo

Pour terminer, n'avez-vous pas un côté circassien finalement ? Parce que vous jonglez entre le verbe et le fantastique, l'imagination aussi. Vous avez ce côté funambule ou pas ?

Je n'ai pas l'impression de me mettre en danger. Je ne sais pas si les artistes de cirque ressentent ce sentiment. J’éprouve de plus en plus de plaisir à être dans l'espace théâtral, à la place que j'occupe. J'ai, au contraire, le sentiment d'un seul coup d'être en retrait du monde et presque en sécurité. J'entends par là que ce n'est pas un confort, bien sûr, mais le fait d'être dans l'instant présent est quelque chose qui me rend heureux.

Il sera en tournée et passera, par exemple, à Caen le 25 mars, à Eysines le 30, le 4 avril à Aix-en-Provence, le 24 à Colmar et au Théâtre du Châtelet à Paris, le 5 juin prochain.

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