Bruce Springsteen : "Je pense que nous sommes tous très inquiets à propos de notre démocratie aux États-Unis"

Bruce Springsteen est l'invité exceptionnel et exclusif du Monde d'Elodie à l'occasion de ces trois concerts en France, les 24 et 27 mai à Lille et le 31 mai à Marseille. Épisode 4 : son engagement pour la justice sociale, symbolisé par la chanson "Streets of Philadelphia".

Article rédigé par Elodie Suigo, Étienne Presumey
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Bruce Springsteen, lors d'un meeting en faveur de Kamala Harris, en Géorgie, le 24 octobre 2024. (DREW ANGERER / AFP)
Bruce Springsteen, lors d'un meeting en faveur de Kamala Harris, en Géorgie, le 24 octobre 2024. (DREW ANGERER / AFP)

Dans le documentaire Road Diary Bruce Springsteen and the E Street Band, sur Disney+, on découvre davantage le sourire, l'humour franc, la fougue et le feu sacré qui brûle en Bruce Springsteen depuis six décennies. Il est un créateur d'émotions et un porte-voix. Son premier engagement est né quand il a décidé de lutter contre l'énergie nucléaire en 1979, pour le concert No Nukes.

franceinfo : Vous avez toujours été de tous les combats et d'ailleurs, vous avez écrit votre chanson Streets of Philadelphia à la demande du réalisateur Jonathan Demme pour illustrer son film Philadelphia, qui soutenait la communauté homosexuelle et qui offrait de lutter tous ensemble contre le sida. Que signifie ce mot engagement pour vous ?

Bruce Springsteen : Pour moi, le rock’n’roll par nature, est une force de liberté qui vient libérer le corps et qui vient libérer l'esprit. Par extension, ça devient un acte politique finalement. Même lorsque j'étais très jeune, lorsque j'étais adolescent, j'étais déjà engagé pour mettre fin à la guerre au Vietnam et pour moi, c'était quelque chose de tout à fait naturel.

"Lorsque nous avons commencé à rencontrer le succès, il m'est apparu assez naturellement que je pouvais utiliser ce succès pour défendre un certain nombre de causes, comme la liberté et la justice sociale."

Bruce Springsteen

à franceinfo

J'ai participé à un certain nombre de combats de manière assez naturelle et c'était une extension très naturelle de la musique, des textes et des sujets dont je parlais dans les titres. Cela fait partie de la conversation que j'ai lors des concerts lorsque je suis devant mon public.

Un artiste en particulier vous a toujours accompagné, c'est Woody Guthrie. Il est l'une des figures emblématiques des sans domicile fixe notamment et il a beaucoup influencé Influencer Bob Dylan et Joan Baez. Sa devise, quand il brandissait sa guitare, était : "This machine kills fascists", cette machine tue les fascistes en français. Qu'est-ce que cette phrase évoque quoi pour vous en 2025 ?

Aujourd'hui, c'est particulièrement important ! Vous savez, c'est très dur aux États-Unis, en ce moment. Nous vivons une époque absolument critique de notre histoire. À l'époque, j'écoutais la musique populaire, j'écoutais du rock’n’roll et puis en vieillissant, j'ai cherché à essayer de trouver des réponses à des questions d'adultes. C'est pour cette raison-là que j'ai cherché à trouver quelqu'un qui parlait de ces questions d'adultes, mais qui en même temps avait une idée de ce qu'il fallait faire, qui avait envie d'agir. Woodie était effectivement une influence très importante et il continue encore à m'influencer énormément aujourd'hui.

En 1980, vous avez été, selon les historiens allemands, l'un de ceux qui sont à l'origine d'une prise de conscience et de la chute du mur, après votre concert à Berlin-Est, devant 300 000 personnes. Êtes-vous triste et inquiet de la situation dramatique mondiale actuelle ? Avez-vous peur ?

Les deux ! Aux États-Unis, la situation est aujourd'hui complexe et je pense que nous sommes tous très inquiets à propos de notre démocratie. Je ne pensais pas qu'un jour, en 2025, je serai ici, assis devant vous, à parler de ce type de sujet d'inquiétude.

"Les choses vont très vite et de nombreux artistes aujourd'hui travaillent énormément et essaient de se battre aussi pour que notre démocratie puisse survivre en Amérique."

Bruce Springsteen

à franceinfo

J'aimerais qu'on parle du titre Streets of Philadelphia, et savoir ce que représente, cette chanson très particulière dans votre répertoire ?

C'est un titre que je n'aurais probablement pas composé si Jonathan Demme, le réalisateur, ne me l'avait pas demandé. C'était au début des années 90 et le film portait sur la communauté gay et la perception qu'on avait de la communauté gay au niveau national, mais aussi au niveau international. Le sida faisait des ravages à l'époque et il m'avait commandé une chanson rock’n’roll, donc j'avais du mal à faire quelque chose de rock’n’roll sur ce sujet-là. C'est à ce moment-là que j'ai commencé avec cette intro à la Batterie et au synthé. C'est un titre qui est très important pour moi et je crois que cette chanson a aussi atteint le but. À l'époque, la société étant en train de s'ouvrir, il y avait une vraie bataille sociale pour les droits des homosexuels et je pense que la chanson a peut-être fait avancer un peu le débat. C'est un titre que j'aime beaucoup et j'espère qu'elle a permis de faire avancer un certain nombre de choses.

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