Restructuration de la dette d’Altice : quel avenir pour l’empire Drahi ?

Le décryptage éco Fanny Guinochet Du lundi au vendredi à 7h50 et 10h20

Lundi, le tribunal des activités économiques de Paris a validé le plan de sauvegarde du groupe Altice, maison mère endettée de l’opérateur téléphonique SFR. Le groupe parle de "bonne nouvelle". Est-ce réellement le cas ?

Emmanuel Cugny

Radio France

Publié le 05/08/2025 07:57

Temps de lecture : 3min

Le président d'Altice, Patrick Drahi, le 2 février 2022. (STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)

La validation du plan de sauvegarde accélérée d'Altice lundi 3 août par le tribunal des activités économiques de Paris est-elle une "bonne nouvelle", comme l'assure le groupe ? Tout dépend de quel côté on se place. La direction se félicite de cette décision du tribunal car elle règle en partie la question de la dette du groupe ramenée d’un peu plus de 24 milliards à 15 milliards d’euros. Mais cela se fera au prix de concessions.

Parmi elles, notamment, la reprise de 45% du capital de l’entreprise par ses créanciers (dont le fonds américain Blackrock), même si le patron, Patrick Drahi, garde la majorité à 55%. Et puis, surtout, la voie semble bel et bien ouverte pour la vente de SFR, le vaisseau amiral du groupe. Ce qui inquiète fortement les syndicats. Dans ces conditions, il est difficile de crier victoire. Car malgré le plan de sauvegarde, Altice reste fortement endetté. Le groupe a encore entre 15 et 16 milliards d’euros de dettes sur les épaules, et la question qui a toujours taraudé certains observateurs est comment les banques ont pu soutenir à bout de bras une telle coûteuse aventure ?

Patrick Drahi a forgé un empire. Homme d’affaires franco-israélien de 61 ans, milliardaire, il est aujourd’hui classé dans les 20 premières fortunes françaises. Il a quitté sa résidence fiscale suisse, en délicatesse avec le fisc local, pour se partager entre Tel Aviv et Abou Dhabi. C’est lui qui, en 1994, créa une structure télécoms de toutes pièces sur la base d’un petit opérateur de câbles à Cavaillon, dans le Vaucluse. De là naîtront Altice France, Altice International et Altice USA. Un empire étendu aux médias avec la chaîne d'information I24 News et, surtout, BFM TV et RMC, revendues il y a tout juste un an à l'armateur marseillais CMA-CGM de Rodolhpe Saadé. Enfin, l’art, avec notamment le rachat du cabinet de vente aux enchères Sotheby’s.

Le "modèle Drahi" obsolète ?

On a souvent parlé du "modèle Drahi", une méthode bien particulière : l’achat d’entreprises par endettement (LBO pour Leveraged buy-out", ou "à fort effet de levier"). On s'endette pour acheter des sociétés et on rembourse la dette avec les profits réalisés par les entreprises rachetées. Patrick Drahi a été le champion toutes catégories de ces rachats à crédit et les banques lui ont fait confiance car ce modèle nécessite de serrer les coûts dans les entreprises achetées, ce que les actionnaires apprécient et ce que Drahi fait à la perfection.

Seulement voilà, les temps changent. Le coût de la dette s’est renforcé avec la hausse des taux d’intérêt. Oubliée cette petite phrase prononcée à l’École Polytechnique en 2015 : "Les télécoms, c’est comme un flipper : tant qu’il y a des boules, je joue encore". Mais l’homme d’affaires ne dicte plus sa loi au marché dont il a longtemps profité de la bienveillance.

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