"Notre amour du luxe a disparu" : en Chine, les grandes marques de luxe sont à la peine
En Chine, le secteur du luxe connaît un ralentissement. Les consommateurs ont notamment changé leurs habitudes depuis la crise du Covid. Les grandes marques doivent aussi faire face à une nouvelle concurrence : la seconde main.
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L'univers du luxe en Chine est un marché incontournable pour les grandes marques, notamment françaises. La Chine représente un tiers des ventes du luxe dans le monde. Pourtant, depuis la fin du Covid, les affaires marchent de moins en moins bien. Avec le ralentissement de l’économie, le consommateur chinois, normalement friand de sacs à mains et de montres de luxe, a changé ses habitudes. En Chine, les grandes maisons de luxe connaissent ainsi des moments vraiment difficiles.
À Shanghai, le Plaza 66 est l'un des plus anciens et plus gros "malls" de la ville pour les produits de grands luxe, avec plus de 55 000 m² de surface commerciale. Dans ce mall, où toutes les plus grandes marques sont représentées, les magasins sont presque vides. C’est presque un bâtiment fantôme, où les vendeurs ont tous le nez sur leur téléphone portable en attendant le client.
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"Certains des plus gros magasins ici avaient des fréquentations, par jour, qui se comptaient en plusieurs milliers. Aujourd'hui, on est sur plusieurs centaines, voire plusieurs dizaines, en fonction d'où vous êtes. Si vous êtes au rez-de-chaussée, ça va encore. Plus vous montez dans les étages, plus c'est compliqué", décrit Alexis Horcholle qui travaille à Shanghai depuis plusieurs années pour une grande marque de luxe.
"La plupart du temps, si vous faites attention, il y a plus de vendeurs que de clients".
Alexis Horcholle, qui travaille pour une marque de luxe à Shanghaià franceinfo
"C'est devenu normal. Tout le monde boit la tasse de manière immodérée ces deux dernières années", poursuit-il. Chez Cartier par exemple, un vendeur confirme cette baisse de la fréquentation : "La situation de l'emploi est mauvaise, il y a des licenciements dans la classe moyenne et les gens ne dépensent plus autant qu'avant pour acheter des produits de luxe. Même les riches sont touchés, nous avons moins de clients qui sont capables de dépenser entre 13 000 et 40 000 euros en une fois".
Une cliente potentielle, Doris, 21 ans, qui débute une carrière de top model n'a en effet pas les moyens de se payer du luxe. "Le pouvoir d'achat de chacun a baissé, probablement parce que l'économie n'est pas très bonne depuis deux ans. Nous recherchons désormais des produits simples qui peuvent durer longtemps, et nous ne cherchons plus des produits de luxe comme auparavant. Moi je cherche plutôt des produits avec des prix inférieurs à 250 euros", estime-t-elle.
Des chiffres d'affaires divisés par deux pour Dior et Chanel
Presque toutes les grandes marques voient donc leurs ventes chuter en Chine. Les chiffres d’affaires de Dior et Chanel par exemple ont quasiment été divisés par deux entre 2022 et 2025. Seules quelques maisons comme Hermès parviennent à s’en sortir sur le grand marché chinois.
Si le luxe ne fait plus recette en Chine, c’est aussi parce qu’il y a une nouvelle concurrence. Le secteur de l’occasion et de la seconde main, moins cher donc, attire de plus en plus de Chinois. C’est même un énorme succès, en témoigne à Shanghai, Na Zha, une influenceuse chinoise qui travaille pour une grosse entreprise spécialisée dans le luxe de seconde main. Sur le réseau social Douyin, l'équivalent de TikTok en Chine, elle s'adresse en direct à des centaines de milliers de clients, et ça cartonne. Évidemment, cela fait très mal aux grandes marques de luxe.
"Regardez ce sac, il ne sera pas démodé dans dix ans. Il est à 98% neuf. Profitez-en, les prix de Louis Vuitton ne cessent d’augmenter en magasin. Moi je peux vous le faire à 400 euros. Allez, achetez, il y a même la boîte d’origine, c’est une bonne affaire", raconte-t-elle par exemple dans son direct.
Des sacs de marques authentifiés
Après sept heures de direct en continu, l’influenceuse Na Zha est épuisée mais les affaires ont très bien marché, comme tous les jours. "Je dis '3, 2, 1, à vendre', et hop c’est vendu. Les sacs classiques avec les logos des grandes marques se vendent très bien. Ça part parfois en une seule seconde car tous les clients veulent acheter le sac en même temps", indique-t-elle.
Dans le couloir, d’autres influenceuses sont en direct dans leurs cabines et tout au bout se trouvent les entrepôts où sont stockés des dizaines de milliers de sacs d’occasion rachetés à des particuliers ou des magasins. "Regardez ce sac Louis Vuitton. En magasin, il coûte environ 2 000 euros, mais le prix ici en seconde main, c’est seulement 700 euros. Et il est à 98% neuf. Tous les sacs que nous vendons sont authentifiés par une société agréée", explique Haicheng, l'un des employés.
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De nouvelles habitudes de consommation après le Covid
Avec le ralentissement de l’économie, les Chinois n’ont plus les mêmes moyens financiers mais il y a aussi de nouvelles habitudes de consommation. Après les trois années de restrictions liées au Covid, les Chinois préfèrent dépenser pour des loisirs, des expériences plutôt que pour acheter un sac ou une montre.
"Mes amies et moi, on aimait acheter des sacs de luxe, on se réunissait pour se montrer nos achats, on adorait ça. Maintenant ce que nous préférons, c’est aller faire du sport, voyager. Notre amour du luxe a disparu", justifie une Shanghaïenne.
"Avant, nous achetions des produits de luxe pour entretenir notre image, en particulier dans le monde du travail, mais maintenant nous avons moins envie de dépenser dans ce domaine".
Une Shanghaïenneà franceinfo
"Même les gens qui ont un bon pouvoir d’achat ont changé leurs habitudes, ils ne dépensent plus pour acheter des produits de luxe, mais pour voyager par exemple, le comportement du consommateur a changé", poursuit-elle.
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