"On ne va pas regarder les femmes mourir, il faut se dépêcher" : un institut se consacre à la recherche sur les cancers des femmes

L'Institut hospitalo-universitaire dédié aux cancers des femmes a été créé à Paris, il y a un an. 80 000 nouveaux cas de cancers féminins sont diagnostiqués chaque année en France.

Article rédigé par Solenne Le Hen
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
La directrice de l'Institut hospitalo-universitaire consacré aux cancers des femmes, Anne-Vincent Salomon, dans son bureau à l'Institut Curie à Paris. (JEAN NICHOLAS GUILLO / MAXPPP)
La directrice de l'Institut hospitalo-universitaire consacré aux cancers des femmes, Anne-Vincent Salomon, dans son bureau à l'Institut Curie à Paris. (JEAN NICHOLAS GUILLO / MAXPPP)

L'Institut hospitalo-universitaire consacré aux cancers des femmes et piloté par l’institut Curie à Paris, a pour objectif de faire progresser la recherche sur ces pathologies. Parmi elles, le cancer du sein (60 000 nouveaux cas par an), le cancer des ovaires, encore souvent mortel, ceux de l’endomètre, du col de l'utérus, de la vulve ou encore du vagin. 20 000 femmes décèdent par an des cancers féminins en France. 

L'Institut des cancers des femmes regroupe nombre de projets de recherche. L'un d'eux consiste à créer un "atlas de tumeurs". Les données d'une première patiente ont été collectées, c'est-à-dire des échantillons de sa tumeur, ses scanners, ses analyses. Ce sera le cas durant toute sa maladie. L'Institut a pour ambition de collecter ainsi les données de 35 000 patientes d'ici 10 ans, pour constituer une base de référence des cancers féminins. Avec les progrès de l'Intelligence artificielle, ce large éventail d'informations permettra ensuite d'imaginer et alimenter des algorithmes, qui, demain, pourront prédire si tel ou tel traitement a une chance de fonctionner sur une patiente, ou quel est le risque de rechute.

Un parcours de soins adapté : "on traite avant tout des patientes"

Mais attention, prévient la directrice de l'IHU, la professeure Anne-Vincent Salomon, "dans cet institut, nous gardons à l'esprit qu'on ne traite pas uniquement des tumeurs, mais avant tout des patientes. L'amélioration de leur parcours de soins est également au cœur de nos préoccupations. Notamment le parcours des femmes jeunes, de plus en plus victimes de cancer". Ainsi, pour une étudiante d’une vingtaine d’années, l’objectif sera de trouver la façon d'adapter ses soins, pour lui permettre de poursuivre ses études en parallèle. Ou de réussir, malgré les traitements parfois agressifs, à préserver sa fertilité. 

L’une des originalités de cet Institut des cancers des femmes est de faire appel à de nombreuses disciplines de la science. On y trouve bien sûr des chercheurs en médecine, mais cet institut est également associé à l'université Paris Sciences et Lettres, qui n’est pas une faculté de médecine.

"On fait appel aux connaissances de mathématiciens, de chimistes, de biologistes et de nombreux autres profils."

Anne-Vincent Salomon, directrice de l'IHU

à franceinfo

"L'idée est de créer de l'émulation intellectuelle autour des cancers féminins", explique Anne-Vincent Salomon. Des stagiaires de l'Institut Curie, en 3e année de licence de mathématiques, ont, par exemple, créé récemment un algorithme qui permet aux médecins généralistes d'interroger facilement Senorif, un référentiel francilien de pathologie mammaire. "Parce qu'il est parfois difficile de s'y retrouver, le médecin généraliste, qui suit la patiente, peut ici comprendre le parcours de soins et pourquoi tel traitement est préféré à un autre par l'oncologue, détaille la professeure. Cet outil est une aide aux médecins et permet la diffusion des connaissances". 

"Il y a urgence" 

L'Organisation mondiale de la Santé prévoit d'ici 2050 ans une hausse de 77% des cas de cancers dans le monde. "D'ici là, on ne va pas regarder les femmes mourir, s'emporte Anne-Vincent Salomon. Il faut que la recherche se dépêche". Ces derniers mois ont vu de nombreuses avancées dans les cancers féminins, notamment le cancer du sein. L'une d'entre elle a d'ailleurs été saluée au Congrès du cancer de Chicago au mois de juin.

Des oncologues de l'Institut Curie sont parvenus à montrer que, grâce à une simple prise de sang, ils pouvaient prédire si des femmes, souffrant d'un cancer du sein hormono-dépendant et métastatiques, allaient rechuter. "Ce principe mis en lumière peut s'appliquer à d'autres types de cancers, poursuit la directrice de cet Institut des cancers des femmes. Et justement, nos recherches et nos progrès vont pouvoir bénéficier à d'autres cancers, non féminins. Tout le monde sera gagnant". 

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