Les hommes ont traversé la Méditerranée 8 000 ans avant notre ère, selon une équipe de généticiens

Publiée dans la revue "Nature", cette étude démontre, à travers l'analyse génétique des populations maghrébine et européenne de l'époque, un métissage génétique qui atteste de la rencontre de ces deux populations.

Article rédigé par Mathilde Fontez
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Iles volcaniques. Sicile, Italie, 2017. (ALAIN BACHELLIER / MOMENT RF / AFP)
Iles volcaniques. Sicile, Italie, 2017. (ALAIN BACHELLIER / MOMENT RF / AFP)

Une équipe internationale de généticiens des populations, qui ont travaillé sur des sites archéologiques au Maghreb, a récemment fait une découverte pour le moins fascinante : 8000 ans avant notre ère, l’humain traversait déjà, semble-t-il, la Méditerranée. 

À l’aube du Néolithique, alors que l’élevage et l’agriculture se répandent en Europe, puis en Afrique du Nord, ce sont encore des populations de chasseurs-cueilleurs qui dominent de chaque côté de la Méditerranée. Mais ce que l’on découvre, c’est que ces chasseurs-cueilleurs ont eu le goût de l’aventure, jusqu’à se risquer à traverser la mer. Les deux populations se sont alors rencontrées.

L’ADN de deux individus de cette époque le montre. Un homme et une femme, retrouvés sur le site archéologique de Djebba, au nord de la Tunisie, et dont l’ADN vient d’être précisément séquencé par une équipe internationale - des généticiens européens, américains, tunisiens et algériens - qui vient de publier, mercredi 12 mars, une étude dans la revue Nature, qui observe des traces de mélanges, de métissages, qui prouvent que les ancêtres de ces deux habitants du Maghreb oriental étaient des Européens. C’est encore plus net chez l’homme que chez la femme, puisque 6% de son ADN vient d’ailleurs, d’une autre population, européenne. Des Européens sont donc venus et ont rencontré les habitants du Maghreb 8000 ans avant notre ère.

Une traversée mystérieuse

Impossible toutefois de dire par où ils sont venus, à partir de ce si petit échantillon. Les chercheurs font tout de même des hypothèses. Ils pensent à la Sicile, juste de l’autre côté du bras de mer qui sépare à cet endroit l’Afrique de la Méditerranée, ou aux îles aux alentours. Une hypothèse qui colle avec d’autres indices, qui avaient été rassemblés avant cette étude. Les archéologues avaient déjà retrouvé en Tunisie des pierres volcaniques venant de Sicile : de l’obsidienne, une pierre utilisée pour fabriquer des outils, des armes et des bijoux depuis la préhistoire.

Impossible également de dire comment ces populations ont traversé la Méditerrannée, pas à la nage en tout cas. Aujourd’hui, la Sicile et la Tunisie sont éloignées de 140 kilomètres. Il n’existe par ailleurs aucune trace d’embarcations – le bois ne résistant pas au passage du temps – mais les chercheurs imaginent qu’ils devaient naviguer sur des sortes de canoés en bois. Sans doute une navigation de cabotage, d’île en île – dont beaucoup ont disparu aujourd’hui, submergées par la hausse du niveau des mers.

Un périple, dangereux et pénible, qui montre une fois de plus cette aptitude humaine à la découverte et cette irrésistible envie de parcourir le monde, d’aller derrière la montagne, de l’autre côté de la mer. Pour chercher de la nourriture, des lieux de vie plus favorables, ou tout simplement par curiosité.

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