Sommet sur la nutrition à Paris : "Ça devait être un sommet des chefs d'État, ça va être une réunion ministérielle", regrette Action contre la faim

Le sommet "Sommet Nutrition for Growth 2025" s'ouvre à Paris alors que le secteur de l'humanitaire s'inquiète de la baisse des financements pour l'aide au développement. Michael Siegel, directeur délégué du plaidoyer d'Action Contre la Faim France, est l'invité éco de franceinfo.

Article rédigé par Isabelle Raymond
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Michael Siegel, directeur délégué du plaidoyer pour Action contre la faim France, invité éco de franceinfo le 26 mars 2025. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)
Michael Siegel, directeur délégué du plaidoyer pour Action contre la faim France, invité éco de franceinfo le 26 mars 2025. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Deux sommets ont lieu en même temps à Paris jeudi 27 mars, l'un beaucoup plus médiatisé que l'autre. Le premier est à l'initiative d'Emmanuel Macron autour de la guerre en Ukraine, le président de la République reçoit d'ailleurs le Premier ministre ukrainien Volodymir Zelensky mercredi. Le second sommet et le sommet international sur la nutrition qui se tient tous les quatre ans. Michael Siegel, le directeur délégué du plaidoyer pour Action contre la faim France est l'invité éco de franceinfo.

Le Sommet international sur la nutrition "qui est censé être un sommet des chefs d'État, va en fait être tout simplement une réunion ministérielle", a regretté Michael Siegel, directeur délégué du plaidoyer d'Action contre la faim France, ce mercredi sur franceinfo.

"Nutrition for Growth" est organisé jeudi et vendredi à Paris, mais il est éclipsé par le sommet dédié au soutien européen à l'Ukraine, avec la venue du président ukrainien Volodymyr Zelensky à Paris. "Ça fait deux ans qu'on prépare ce sommet sur la malnutrition et l'autre sommet a été annoncé il y a une semaine", constate Michael Siegel. Ce dernier sait que "le conflit en Ukraine est très important", Action contre la faim "a des programmes en Ukraine, mais il ne faut pas qu'ils éclipsent l'enjeu de la faim qui explose ces derniers mois".

Cette absence de chef d'État va forcément avoir une répercussion sur le sommet international, assure le directeur de plaidoyer chez Action contre la faim : "On a besoin d'un portage politique de haut niveau pour prendre des engagements forts pour lutter contre la faim dans le monde", explique-t-il.

Les conséquences de la fin de l'aide américaine

D'autant que les ONG, qui se battent contre la malnutrition dans le monde, vivent une période difficile avec des restrictions massives dans leurs budgets. "On a une coupe de 2,1 milliards d'euros" dans le budget 2025 du gouvernement. "Ça représente un tiers du budget de l'aide publique au développement de l'année dernière, c'est inédit, c'est le budget qui a été le plus coupé dans le projet de loi de finances 2025", déplore Michael Siegel.

Mais ce sont les dernières décisions américaines qui ont eu des conséquences très lourdes sur les ONG. Washington a supprimé 92% des financements de programmes à l'étranger de l'agence américaine de développement USAID, dont le budget annuel s'élevait à 42,8 milliards de dollars, soit 42% de l'aide humanitaire déboursée dans le monde. "Action contre la faim a dû suspendre ou même arrêter 50 programmes", atteste Michael Siegel, puisque son ONG n'a pas été payée par les États-Unis et est "en train de puiser dans la trésorerie".

"Concrètement, en République démocratique du Congo (RDC), dès qu'une mère vient dans un centre nutritionnel avec un enfant en situation de malnutrition aiguë sévère, on est obligé de lui dire de rentrer chez elle tout en sachant que cet enfant va mourir", affirme-t-il. "C'est 1,5 million de personnes qui sont impactées par ces coupes juste pour Action contre la faim, dont 800 000 personnes qui sont en danger de vie ou de mort, c'est-à-dire qui vont mourir dans les prochaines semaines", chiffre-t-il. "La plupart des centres nutritionnels qui sont gérés par Action contre la faim vont fermer d'ici quelques mois", alerte le directeur délégué du plaidoyer de l'ONG.

Sur ce sommet contre la malnutrition dans le monde, qui se déroule sur deux jours, Action contre la faim attendait "des chefs d'États sur les causes structurelles et politiques de la faim". Éclipsé par le sommet dédié à la défense de l'Ukraine, la "coalition des volontaires", "il y a un très grand risque qu'il y ait très peu d'annonces financières vu les derniers budgets qui ont été adoptés, regrette Michael Siegel. L'argent et les pistes existent" pour lutter contre la malnutrition et sachant que "la France s'est engagée à allouer 0,7% de son revenu national brut à l'aide publique au développement."

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