"Sept Français sur 10 vont dans un centre commercial au moins une fois par mois", selon la Fédération des acteurs du commerce dans les territoires

Selon Marie Cheval, présidente de la Fédération des acteurs du commerce dans les territoires (FACT), la fréquentation des centres commerciaux a progressé de 1,1% en 2024.

Article rédigé par Camille Revel
Radio France
Publié
Temps de lecture : 8min
Marie Cheval, présidente de la fédération des acteurs du commerce dans les territoire (FACT), le 6 février 2025. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)
Marie Cheval, présidente de la fédération des acteurs du commerce dans les territoire (FACT), le 6 février 2025. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Les Français ont-ils boudé ou plébiscité les centres commerciaux en 2024 ? "Sept Français sur dix vont dans un centre commercial au moins une fois par mois", assure, jeudi 6 février, Marie Cheval, présidente de la Fédération des acteurs du commerce dans les territoires (FACT) et PDG de Carmila foncière, qui détient plus de 200 centres commerciaux Carrefour en France, Italie et Espagne.

franceinfo : Vous publiez aujourd'hui un bilan pour l'année 2024 et voilà ce que vous nous dites : dans un contexte économique qu'on peut qualifier d'incertain, les centres commerciaux ont quand même plutôt résisté ?

Oui, tout à fait. Les centres commerciaux progressent en 2024. Quand on regarde en termes de fréquentation, donc en nombre de clients qui entrent tous les jours dans les centres commerciaux, ça progresse de +1,1%. Ça montre la place des centres commerciaux dans la vie des Français.

Ce qui représente combien de millions de Français ?

Ça veut dire que tous les jours que ce sont 7 millions de Français qui passent la porte d'un centre commercial. Quand vous regardez au global, sept Français sur dix vont dans un centre commercial au moins une fois par mois. C'est donc très important. Pourquoi ils y vont ? Parce que ce sont des lieux d'ancrage territorial. Ce sont des lieux évidemment, on fait des achats, mais ce sont aussi des lieux de lien social où on aime se promener, se rassembler. C'est très important, je crois, en ce moment, dans notre pays.

Il y a plusieurs types de centres commerciaux en centre-ville, en zone commerciale, des grands centres, en extérieur. Qui tient mieux le choc ?

Quand on regarde, tous les centres commerciaux progressent. Ceux qui croissent le plus, on a d'abord les très grands centres commerciaux, ces centres commerciaux qui avaient beaucoup souffert post-Covid et qui rattrapent énormément. Et puis les centres commerciaux de centre-ville.

Est-on revenu à l'avant-Covid ?

On est pratiquement revenu à l'avant-Covid. Les centres commerciaux de centre-ville qui là aussi progressent beaucoup. Pourquoi ? Je pense qu'il y a un besoin aussi de proximité et un centre commercial de centre-ville, il y a à la fois la proximité et puis l'offre et le choix.

Les Français rentrent dans les centres commerciaux, mais est-ce qu'ils dépensent ?

Oui, ils dépensent. Les dépenses de consommation des Français dans les biens ont augmenté en 2024 de +1,1%. C'est certes moins que l'inflation, mais ça progresse. Et quand on regarde les dépenses dans les centres commerciaux, elles augmentent davantage : +1,3%. Pourquoi ils dépensent ? Certes, ils épargnent beaucoup, certes le contexte est un peu incertain, mais ils aiment se faire plaisir et manifestement, ils veulent être beaux et en meilleure santé. Parce que le secteur qui progresse le plus, c'est le secteur beauté-santé, avec des taux de croissance supérieurs à 6%.

Là, on parle des secteurs qui marchent. Il y en a qui marchent moins, la maison par exemple ?

Oui, la maison, c'est vrai que c'est plus difficile en 2024. Alors, c'est très lié au nombre d'achats et de transactions immobilières. Quand on achète moins d'appartements, on achète aussi moins de canapés, moins de choses pour bricoler dans la maison, moins de décoration. À l'inverse, les secteurs qui se portent bien au-delà de la beauté-santé : le divertissement, notamment les cinémas. Et puis un petit mot de l'équipement de la personne. On a beaucoup parlé du prêt-à-porter. On voit dans les chiffres que le secteur diminue un petit peu, mais beaucoup moins que les autres années. Et quand on regarde les magasins comparables, c'est-à-dire les magasins qui étaient présents l'année dernière et cette année, là, ça progresse.

Faut-il qu'il y ait un cinéma dans un centre commercial pour qu'il continue de bien marcher ?

Alors, il ne faut pas. Mais dans les très grands centres commerciaux, quand il y a un cinéma, c'est quelque chose de très positif.

"Ça fait partie de la transformation des centres commerciaux : on met de plus en plus de loisirs. On pense au cinéma, mais il y a aussi du karaoké, des speed park, tous ces éléments qui font des centres commerciaux, des lieux où on se retrouve et on a plaisir à aller."

Marie Cheval

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Mais est-ce que ça a encore du sens, aujourd'hui, des centres commerciaux gigantesques ? Est-ce que vous arrivez à vous adapter aux enjeux désormais environnementaux, numériques ? Ce modèle-là n'est-il pas dépassé finalement ?

Ce que nous disent les clients, qui d'ailleurs viennent de plus en plus souvent dans les centres commerciaux, c'est qu'ils aiment les centres commerciaux. Les centres commerciaux, ils se sont puissamment transformés. D'abord pour adapter l'offre commerciale. C'est plus de sport, plus de loisirs, c'est plus de discount, c'est plus de beauté-santé par exemple. Beaucoup de plus grandes pharmacies, des cabinets dentaires que vous ne trouviez pas là quelques années. Donc ça, c'est toute l'évolution de l'offre commerciale. Et puis les centres commerciaux, ils se transforment aussi en s'intégrant davantage avec la ville. Et ça, c'est tout le sujet de la transformation des zones commerciales et comment on relie davantage les centres commerciaux et la ville.

Par exemple, comment vous allez pouvoir utiliser le parking pour faire d'autres choses, pour mettre un peu de résidentiel. Comment vous allez améliorer les environnements des centres commerciaux. Nous nous sommes également très engagés dans la transition environnementale. Toute l'industrie, tout le secteur. Et on a, par exemple, réduit nos empreintes carbone d'environ 50% quand on regarde les principales foncières, entre 2019 et 2023.

Les soldes viennent de se terminer. Quel bilan tirez-vous ?

Un bilan, quand on regarde la fréquentation, puisque nous n'avons pas encore les chiffres d'affaires, la fréquentation sur janvier, c'est stable +0,1%, ça n'a pas vraiment bougé. On sait que les soldes d'année en année s'étiolent, mais ça reste quand même des moments importants.

En avez-vous toujours besoin ?

On en a toujours besoin. Et quand on regarde d'autres événements commerciaux qui là se développent beaucoup, notamment le Black Friday, cette année, c'est 13 millions de Français qui étaient dans un centre commercial le samedi, en progression de +13%. Et ce qui est intéressant d'ailleurs, c'est qu'on voit que le Black Friday, qui est un événement qui est né dans le digital, est maintenant la troisième journée de fréquentation dans les centres commerciaux. Donc, on voit bien là la convergence des différents canaux. Il ne faut surtout pas opposer digital et magasin ou centre-ville et centre commercial, parce que les clients, ils veulent tout.

On parle beaucoup de nouveautés, d'achats, de promotions, mais le secteur de la seconde main, est-ce quelque chose qui compte ?

Le secteur de la seconde main, c'est d'abord quelque chose que demandent beaucoup les clients. Et donc il y a plusieurs niveaux de seconde main. Nous, on compte beaucoup sur les enseignes, les marques qui développent la reprise de leurs produits. Et ça, il y a quelques grandes marques qui font ça de façon très bien et c'est sûr que c'est quelque chose qui va se développer.

Là, vous avez des rivaux. La présence de la vente en ligne n'est pas nouvelle, en revanche, il y a des géants Chinois, notamment Shein et Temu, qui se sont installés. Et vous, vous demandez plus de régulation ?

Nous, on demande l'équité.

"Je trouve assez inacceptable que ces grandes plateformes que vous avez citées, Shein et Temu, ne créent aucun emploi en France, ne payent pas d'impôts en France, ne soient pas soumises aux mêmes règles environnementales que tous les commerçants en France et comme ça puissent envahir carrément notre marché."

Marie Cheval

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Et donc c'est pour ça que nous demandons les mêmes règles pour tous. L'Union européenne a récemment dit qu'elle allait réfléchir pour mettre enfin des taxes de douane sur ces produits-là. Je pense que c'est indispensable et il faut le faire rapidement.

Parce que sinon, c'est de la concurrence déloyale ?

Parce que c'est de la concurrence déloyale et c'est une concurrence énorme. C'est pratiquement 20 % des colis en France qui sont concernés par ces deux plateformes-là.

Comment pouvez-vous faire la différence, au-delà de la question d'un encadrement législatif européen ?

Nous, on fait la différence. Les enseignes que nous avons sont des enseignes qui respectent les lois françaises, qui créent des emplois en France. Un centre commercial, ce sont 400 emplois. C'est quelque chose de très important également pour le tissu local. Donc attention quand nous consommons à l'impact que nous avons sur ces emplois et le tissu local.

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