La hausse des tarifs des mutuelles est justifiée, selon la Macif, pour qui revenir en arrière "n'est pas une solution"

"Les mutuelles complémentaires, aujourd'hui, sont à peine à l'équilibre, voire en déficit", plaide, jeudi sur franceinfo, Jean-Philippe Dogneton, directeur général de la Macif.

Article rédigé par Isabelle Raymond
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 9min
Jean-Philippe Dogneton, directeur général de la Macif, le 16 janvier 2025. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)
Jean-Philippe Dogneton, directeur général de la Macif, le 16 janvier 2025. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Les tarifs des mutuelles augmenteront en moyenne de 6% en 2025, selon la Mutualité française. Une augmentation qui intervient après deux années de hausses consécutives, plus de 4,7% en 2023 et plus de 8,1% en 2024. Une hausse qui est justifiée "parce que les soins sont en augmentation en nombre et en valeur. La population vieillit, le coût des médicaments augmente, le coût des services augmente également. Ça, c'est une réalité", dit jeudi 16 janvier Jean-Philippe Dogneton, directeur général de la Macif.

"Les mutuelles complémentaires, qui ont eu beaucoup de transferts de charges, aujourd'hui, sont à peine à l'équilibre, voire en déficit", poursuit Jean-Philippe Dogneton. Donc, revenir sur cette augmentation "ce n'est pas une solution".

franceinfo : La Macif est le sponsor de Charlie Dalin, vainqueur du Vendée Globe, qui a franchi la ligne d'arrivée le premier après 64 jours, 19 heures 22 minutes et 49 secondes. Au-delà du record, de l'immense fierté et de l'émotion intense, que représente cette victoire concrètement, financièrement comme retombées économiques ?

Jean-Philippe Dogneton : On n'aborde pas ce sujet-là spontanément. D'abord, on vibre, il y a toute l'émotion. C'est un immense succès, c'est un immense monsieur et c'est une immense aventure. Et je crois que tous les Français, nos concitoyens, l'ont perçu comme ça au travers de leur télé, mais pas seulement. Ils étaient des millions à venir voir le départ du Vendée Globe. Ils étaient des milliers à braver le froid au moment de l'arrivée. Donc tout le monde a perçu qu'il y avait derrière une aventure humaine incroyable. Et puis il y a un sacré monsieur, c'est d'abord Charlie Dalin.

Vous étiez à l'arrivée du Vendée Globe ?

Ah oui, j'étais à l'arrivée ! Et j'avoue que j'ai encore cette émotion. Je vibre. C'est un formidable monsieur. C'est un grand professionnel qui a préparé pendant quatre ans intensivement ce Vendée Globe. Il voulait le gagner. Conception du bateau, réglages, tout est dans le détail. Et puis c'est un formidable stratège. C'est un type qui a des valeurs incroyables de fidélité, d'engagement, de loyauté.

Quelles sont les retombées de cette aventure pour un sponsor ?

Je vous jure que je n'ai pas les yeux sur le compteur, mais évidemment, chaque euro investi retrouve sa rentabilité. Ce sont des montants très raisonnables et ce sont quelques centimes par sociétaire adhérent.

Vous avez 5,8 millions de sociétaires et de clients.

La vraie question c'est : est-ce que la Macif est légitime à être sur l'eau ? Elle l'est, parce qu'elle est le premier assureur de navigation de plaisance, parce qu'elle a une école de voile qui a formé des milliers de petits jeunes ou de parents, qui accompagne la SNSM, qui accompagne Jean-Louis Etienne dans sa recherche sur les puits de carbone dans l'Antarctique, qui s'investit dans la RSE, qui lutte contre les plastiques. Donc notre légitimité est totale.

Avez-vous de nouveaux clients qui ont vu justement le nom de la Macif sur la voile de Charlie Dalin pendant tous ces jours de traversée ?

Très certainement, parce qu'elle est très visible. Mais la Macif, c'est la marque préférée d'assurance des Français. Et cette notoriété-là, elle se bâtit sur notre légitimité, sur la confiance et sur la cohérence de notre parcours.

Donc vous ne regrettez absolument pas ce sponsoring ?

Ah non ! Et puis vous savez, on est dans le dans l'Imoca et dans le Vendée Globe depuis des années. On avait déjà gagné avec François Gabart.

Avez-vous eu de nouveaux sociétaires avec cette course ?

On peut l'imaginer, mais au fond, c'est un cercle vertueux. En tout cas on nous remercie de participer à cette aventure, de la rendre possible. Et je crois qu'il y a beaucoup plus de sponsors qu'il n'y en avait. Et on peut saluer aussi le second, Yohann Richomme, qui est de l'école, skipper Macif, lui, avec Paprec, est arrivé second. Et c'est évidemment pour les sponsors, un véritable retour d'image.

Cette année, les tarifs des mutuelles vont augmenter de 6% en moyenne, en prévision d'un transfert de restes à charge de l'Assurance maladie vers les complémentaires. Sauf que, mardi, dans son discours de politique générale, le Premier ministre François Bayrou a dit qu'il revenait dessus. Allez-vous rendre cette hausse de tarifs aux patients ?

Ce qui me frappe déjà, c'est l'inconstance de la politique en matière de santé. Huit ministres en huit ans. Un coup on transfère, un coup on transfère moins, un coup on fait de la grande Sécu, un coup on revient en arrière. Donc c'est l'inconstance et l'imprévisibilité. Dans notre métier, c'est vraiment un vrai drame.

Parce que les tarifs des mutuelles, ils augmentent au 1er janvier.

Ils augmentent, ils s'arrêtent bien avant. Et surtout, vous ne vous imaginez pas que les mutuelles répercutent tout ce qui leur est transféré. Ce n'est pas comme ça qu'on fonctionne. Et les mutuelles d'assurance, elles sont à peine à l'équilibre, même en déficit selon les différentes études.

De combien les tarifs de la Macif ont-ils augmenté au 1er janvier, en moyenne ?

C'est à peu près 4%.

Donc moins que la moyenne.

Notre credo, c'est l'accessibilité et donc c'est le pouvoir d'achat. Donc, vous imaginez bien qu'on prend sur nous-mêmes et on compense une partie de ces charges-là. Et il faut se dire aussi que sans ces mutuelles d'assurance, on n'aurait pas les filets de sécurité que l'on offre pour la population qui évidemment est exposée à ces situations.

Qu'allez-vous faire, sachant que les transferts de charges ne vont pas avoir lieu ? Vous aviez anticipé une hausse du ticket modérateur notamment.

Pas dans cette proportion-là. Et ensuite, je crois qu'il faut retenir l'idée positive qui a été soutenue par le Premier ministre d'une vision sur un plus long terme. Et la vision au coup par coup n'est pas une bonne solution pour le monde de la santé. Donc il faut imaginer une vision pluriannuelle et c'est ce qui est proposé.

Cette hausse des tarifs, vous pensez qu'elle est justifiée, qu'elle correspond donc à la réalité du coût des soins et donc il n'est pas question de la rendre aux patients puisqu'elle est indépendante du transfert de compétences ?

Absolument. Parce que les soins sont en augmentation en nombre et en valeur. La population vieillit, le coût des médicaments augmente, le coût des services augmente également. Ça, c'est une réalité. Et les mutuelles complémentaires, qui ont eu beaucoup de transferts de charges, aujourd'hui, sont à peine à l'équilibre, voire en déficit. Donc, ce n'est pas une solution.

Donc, ce que vous dites, c'est que vous ne faites pas de l'argent sur le dos des patients.

Absolument pas.

Sauf que la ministre de la Santé, Catherine Vautrin, a dit dans la foulée de ce discours de politique générale, qu'elle voulait récupérer cet argent, de l'ordre d'un milliard. Avez-vous discuté avec ses services ? Que lui répondez-vous ?

Non, pas encore. Et on évoque dans les médias une taxation.

Craignez-vous une taxe sur le modèle de la taxe Covid, qui a eu lieu au moment de la crise sanitaire ?

Que représente la taxation aujourd'hui sur les contrats santé ? C'est deux mois de votre contrat de santé individuel. Chaque adhérent paye à peu près l'équivalent de deux mois en taxes. On peut toujours imaginer d'en rajouter. Mais si on considère que la santé est un besoin élémentaire et un besoin premier, on verrait plutôt un ordre décroissant, une taxe plus faible.

Cette taxe n'a pas lieu d'être ?

Elle n'a pas en tout cas de légitimité et elle crée un risque pour nos concitoyens d'exposition à une taxe supplémentaire. Car, indirectement, vous voyez bien que l'acteur risque de répercuter cette taxe.

La craignez-vous cette taxe, aujourd'hui ?

Je la crains pour nos concitoyens et je dis qu'ils payent déjà l'équivalent de deux mois de leurs contrats. Faut-il qu'ils en payent plus ?

Avez-vous parlé avec vos autres confrères mutualistes ?

C'est encore très frais, mais les positions des fédérations sont claires et alignées sur cette analyse-là.

Je résume : la hausse des tarifs de l'ordre de 4% pour la Macif est justifiée et il n'est pas question d'une taxe sur les mutuelles cette année ?

En tout cas, ce n'est pas notre recommandation et nous nous inscrivons plutôt dans la logique d'une vision pluriannuelle du financement de la santé.

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