L’extrême droite allemande, 80 ans d’activisme : l'info de l'histoire du 22 février

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Article rédigé par Fabrice d'Almeida
Radio France
Publié
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Franz Schönhuber, ancien dirigeant du Republikaner Partei, en campagne à Dresde (Allemagne) pour les législatives de septembre 2005 (NORBERT MILLAUER / DDP)
Franz Schönhuber, ancien dirigeant du Republikaner Partei, en campagne à Dresde (Allemagne) pour les législatives de septembre 2005 (NORBERT MILLAUER / DDP)

L'extrême droite atteint un niveau jamais égalé en Allemagne, 80 ans après la fin de la guerre et la destruction du IIIe Reich. Ce retour au premier plan s’est effectué par étape. Car, aussi fou que cela puisse paraître, l’extrême droite recommence à agir dès le lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Le Deutsche Reichspartei, animé par des nostalgiques de Hitler, est créé dès 1946. Ce parti a été rapidement interdit avec la naissance de la nouvelle Allemagne démocratique en 1949. D’autres prennent la suite. Ainsi le NPD de von Thadden, dès 1966, présente-t-il des candidats aux élections, et se prétend parlementaire, conforme à la Constitution. Mais ce mouvement reste marginal. 

À la fin des années 1980, un ancien Waffen SS, Franz Schönhuber, réussit à développer un autre parti, le Parti Républicain (Republikaner Partei). Il remporte des sièges nationaux et dans les élections européennes. Schönhuber est reçu en France au congrès du Front national en 1990, où il est assis en bonne place à côté de Jean-Marie Le Pen.  

L'année 1990 marque un autre tournant, car après la chute du mur de Berlin, on découvre soudain que l’Allemagne de l’Est n’a pas connu le même processus mémorial que l’Allemagne de l’Ouest. À l’ouest, le travail de mémoire contre le nazisme a joué à plein. À l’est, le régime communiste a limité la pédagogie démocratique et laissé un grand nombre de nostalgiques du IIIe Reich. C’est dans ces nouveaux Länder de l’Est que va se déployer le parti national démocrate NPD, qui obtient des succès à des élections locales, et commence à diffuser des thématiques néonazies : négationnisme sur la question de l’extermination des juifs, victimisation des Allemands autour de la question des bombardements, notamment celui de Dresde en 1945, sur la question des réfugiés, ces Allemands, chassés d’Europe centrale, au lendemain de la guerre.  

L'AfD surfe dès 2015 sur le rejet des réfugiés accueillis par Angela Merkel

L’Allemagne de l’Est est donc propice à un discours victimisant, hostile aux valeurs de l’Ouest. C’est là qu’est mal vécue l’aide donnée à la vague de réfugiés de 2015. Cette immigration déclenche une nouvelle vague d’engagement hostile à l’ouverture et à l’islam. Ce choix de la chancelière Merkel est vécu comme une trahison. L’Alternativ für Deuschtland (AfD) un jeune parti alors, profite de cette vague de mécontentement. Cela lui permet une ascension rapide dans les élections et même de gagner des voix à l’Ouest, depuis 2021.

Ultra-nationaliste, xénophobe, l’AfD se présente pourtant comme pacifiste face à la Russie et au conflit ukrainien. Ce pacifisme d’une famille politique, qui a toujours été belliciste, peu étonner, mais il correspond aux désirs de soutenir des États réactionnaires en matière de mœurs et de religion. C’est sur cette base qu’elle obtient le soutien d’Elon Musk, membre de l’administration Trump. Mais le pire est qu’aujourd’hui, l’AfD est dépassé sur sa droite par des groupuscules ultra radicaux et néonazis. Ces derniers sont moins connus, mais veulent passer à l’acte. Ils pratiquent des entraînements militaires et rêve de coup d’Etat, d’attentats, et de tuer leurs adversaires politiques, socialistes, écologistes, juifs, musulmans... Comme Breivik en Norvège, et comme lors de l’attentat de Halle. Dans la folle radicalisation actuelle, les Européens semblent se livrer à une course effrénée vers les pires solutions que l’histoire nous a laissées en héritage.  

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