Les déodorants corporels nouvelles stars des réseaux et nouvelle injonction
Déodorants pour tout le corps, brumes parfumées à appliquer de la tête aux pieds, routines “clean girl” qui inondent TikTok : l’industrie de l’hygiène multiplie les injonctions à sentir toujours plus “frais”. Un phénomène qui, derrière l’esthétique glacée des réseaux sociaux, entretient une véritable anxiété olfactive.
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Depuis deux ans, les publicités pour "whole body deodorants" se multiplient sur TikTok et Instagram. Vendus comme de simples sticks ou sprays, ils ne se limitent plus aux aisselles. Les slogans promettent de protéger toutes les zones du corps : plis sous la poitrine, dos, cuisses, voire parties intimes. Aux États-Unis, Unilever parle d’une "innovation de l’année", et la marque Lume a dépassé les 300 millions de dollars de ventes en 2023.
Si la plupart de ces produits ne sont que des déclinaisons des déodorants classiques (poudres absorbantes et parfums), certains innovent avec des ingrédients antibactériens comme l’acide mandélique ou le magnésium hydroxyde, censés tuer les bactéries responsables des mauvaises odeurs. Pourtant, les dermatologues rappellent que seules certaines zones du corps (aisselles et aines) sont réellement productrices d’odeurs fortes, via les glandes apocrines. "Nous ne puons pas de partout", résume une dermatologue interrogée par CNN.
Quand les brumes parfumées deviennent un rituel
À côté des déodorants "corps entier", une autre tendance s’impose : les brumes parfumées. La marque brésilienne Sol de Janeiro cartonne auprès des adolescentes et jeunes adultes. Ces "body mists", plus légères que des parfums classiques, s’appliquent généreusement sur cheveux, vêtements et peau, plusieurs fois par jour. Sur TikTok, les vidéos "layering", qui montrent comment superposer plusieurs brumes pour "tenir toute la journée", cumulent des millions de vues.
Cette obsession va parfois jusqu’au ridicule : certains tutos recommandent des dizaines de pschitts à la suite pour "sentir bon de la tête aux pieds", dans une surenchère qui transforme le parfum en accessoire de performance sociale.
La "clean girl" et la chasse aux odeurs
Derrière ces produits se dessine une esthétique plus large : celle de la clean girl. Ce modèle, popularisé par les influenceuses sur TikTok, valorise une image impeccable : cheveux tirés en arrière, teint lisse, vêtements sobres et, bien sûr, odeur irréprochable. À chaque rentrée, des centaines de vidéos apparaissent sous le titre "comment sentir bon pour la rentrée".
Selon The Atlantic, cette hypersensibilité aux odeurs serait renforcée par la pandémie : après les confinements, la tolérance aux effluves corporels des autres aurait chuté, déclenchant une anxiété nouvelle. Dans ce contexte, se vaporiser de brume ou se couvrir de déodorant devient une manière de reprendre le contrôle de son image.
Une américanisation de l’hygiène
Cette obsession s’inscrit dans une culture américaine du "smell averse" littéralement, qui fuit l’odeur. Aux États-Unis, héritiers d’un puritanisme hygiéniste, l’odeur corporelle est associée à la honte et au manque de maîtrise de soi. L’industrie cosmétique capitalise sur cette peur : hier avec Odorono, le premier déodorant industriel, aujourd’hui avec des gammes entières de produits censés neutraliser chaque parcelle de peau.
La France suit désormais cette tendance, portée par des influenceuses comme Poupette Kenza, ou Milla Jasmine qui promeuvent aussi bien des rituels intimes que des parfums pour "sentir bon en bas". Le sexe féminin ne doit plus avoir d’odeur. Une injonction qui pèse lourdement sur les adolescentes, souvent en quête de repères.
Derrière les slogans marketing, les spécialistes alertent : trop se laver ou se parfumer peut déséquilibrer la flore cutanée ou vaginale, provoquer irritations et infections. Plus largement, cette chasse à l’odeur gomme un élément essentiel de notre identité : l’odeur naturelle, qui joue un rôle dans l’attirance, la reconnaissance ou la perception de la santé.
En cherchant à neutraliser toute trace de soi, les jeunes générations risquent de s’uniformiser dans une aseptisation sociale où chacun doit sentir pareil. "Hyperdéodoriser", conclut The Atlantic, c’est ne plus sentir mauvais, mais c’est aussi ne plus sentir bon.
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