Édito
Une droite sans cap, entre querelles internes et rapprochement avec le RN

Les prises de paroles successives de Bruno Retailleau et Laurent Wauquiez illustrent la cacophonie d’une droite qui comme souvent n'a plus de boussole, mais qui se retrouve en plein virage stratégique. Peu à peu, LR se résigne à l’idée d’une alliance implicite avec le RN.

Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Bruno Retailleau (à droite) et Laurent Wauquiez (à gauche) à Matignon, à Paris, le 2 septembre 2025. (THOMAS SAMSON / AFP)
Bruno Retailleau (à droite) et Laurent Wauquiez (à gauche) à Matignon, à Paris, le 2 septembre 2025. (THOMAS SAMSON / AFP)

Bruno Retailleau et Laurent Wauquiez ne manquent pas une occasion de se tacler. Jeudi 4 septembre, le patron de LR a rectifié le président du groupe, coupable d’avoir annoncé qu’il ne censurerait pas d’office un éventuel gouvernement socialiste. Intolérable pour Bruno Retailleau, qui promet "d’empêcher la gauche d’accéder au pouvoir". Lundi, c’est Laurent Wauquiez qui réclamait, en vain, une consultation des adhérents LR, avant de concéder, jeudi, du bout des lèvres, qu’il votera finalement la confiance à François Bayrou lundi 8 septembre. Mais beaucoup de députés de son groupe ne le feront pas.

Dans le même temps, Nicolas Sarkozy réclame une dissolution, tandis que Valérie Pécresse, Jean-François Copé et David Lisnard souhaitent le départ d’Emmanuel Macron, deux hypothèses récusées par Bruno Retailleau. Bref, comme souvent, la droite n’a plus de boussole. Pourtant, derrière cette cacophonie, elle a entamé un vrai virage stratégique.

LR semble se rapprocher d’un renversement d’alliances

En réalité, s’achève aujourd’hui la semaine où la droite a, par avance, adoubé l’arrivée au pouvoir… de l’extrême droite, car jeudi, Laurent Wauquiez a indiqué qu’il ne censurerait pas non plus un gouvernement RN. Ce que n’a pas contesté Bruno Retailleau. À ses yeux, un gouvernement socialiste serait intolérable, mais un gouvernement RN tout à fait acceptable. Il rejoint ainsi Nicolas Sarkozy. Après avoir reçu Jordan Bardella et Sébastien Chenu, puis souhaité que Marine Le Pen puisse concourir à la présidentielle, l’ancien chef de l’État expliquait mercredi dans Le Figaro que le RN est un parti comme un autre, tout à fait républicain, et qu’il peut parfaitement remporter les législatives à l’issue de la dissolution qu’il appelle de ses vœux.


C’est un tournant. Jamais depuis quarante ans, la droite ne s’était ainsi résignée à l’avance à l’accession aux affaires du FN devenu RN. On sait que le chaos engendré par les grandes crises politiques est souvent source de ruptures historiques. Les plaques tectoniques de la politique bougent un peu partout en Europe. Dans plusieurs pays, droite et extrême droite ont convergé idéologiquement avant de s’allier électoralement. LR semble bien se rapprocher peu à peu d’un renversement d’alliances historique, qui pourrait se concrétiser à l’issue d’une dissolution ou après la présidentielle de 2027.

Au risque, pour le duo Retailleau-Wauquiez, de finir en supplétifs du tandem Le Pen-Bardella, qui pèse trois fois plus lourd dans les sondages d’intentions de vote.

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