Édito
Un meeting du RN pour quoi faire, enterrer le plan B comme Jordan Bardella ?

Dimanche 6 avril, Marine Le Pen a mobilisé ses partisans à Paris pour dénoncer sa condamnation, se posant en victime d'une "chasse aux sorcières". Cependant, pour échapper à une nouvelle condamnation en appel, elle va devoir changer de défense.

Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Marine Le Pen lors du meeting le dimanche 6 avril à Paris. (ALEXIS SCIARD / MAXPPP)
Marine Le Pen lors du meeting le dimanche 6 avril à Paris. (ALEXIS SCIARD / MAXPPP)

Marine Le Pen a mobilisé ses supporters dimanche 6 avril à Paris pour protester contre sa condamnation. C'était en quelque sorte un dimanche à Marineland, pas les orques et les otaries du parc aquatique qui a fermé en début d'année, mais ce monde parallèle où évolue Marine Le Pen depuis une semaine. Dans ce monde imaginaire, elle qui a été condamnée pour un détournement massif de fonds publics, plus de 4 millions d’euros, devient victime d’une "chasse aux sorcières", une "décision politique" qui "bafoue l’État de droit" et même "l’État de démocratie".

La patronne de l’extrême droite s’est revendiquée de Martin Luther King et son combat pour les droits civiques dans l’Amérique ségrégationniste. Très sérieusement ! Et pourquoi pas Gandhi ou Nelson Mandela ? Et dans cet univers fantasmagorique, le peuple, "son peuple", dit-elle, déferle en masse pour lui témoigner son soutien. En fait, ils n’étaient que quelques milliers sur une place parisienne à moitié vide, et dans les sondages, deux Français sur trois approuvent la sentence.

Un soutien symbolique face à la réalité judiciaire

Ce meeting a d’abord servi à la réconforter. Une sorte de thérapie de groupe, avec plusieurs de ses complices eux aussi condamnés, le maire de Perpignan Louis Aliot, le député Julien Odoul et d’autres alignés en rang d’oignon sur l’estrade. Un peu comme au tribunal sur le banc des accusés. Mais ce rassemblement servait surtout à enterrer le plan B. Noyé dans la masse des députés RN, Jordan Bardella a été obligé de jurer fidélité à supérieure. Marine Le Pen n’a guère goûté son absence au procès, il avait préféré se lancer dans une tournée de signatures de son livre. Elle n’a pas davantage apprécié son premier tweet à l’annonce de la décision des juges. Jordan Bardella s’était indigné d’un "scandale démocratique" qui "empêche" Marine Le Pen "d’être candidate en 2027", comme s’il tournait déjà la page pour prendre la suite. Surtout, elle mesure combien la popularité de ce plan B auprès des électeurs RN peut menacer sa détermination à s’accrocher jusqu’au bout.      

Pour échapper à une nouvelle condamnation en appel, elle va devoir quitter le monde des "vérités alternatives" chères à Donald Trump, lui qui appelle à "libérer Marine Le Pen", et revenir sur terre. "Le réel, c’est quand on se cogne", disait Lacan. En l’occurrence, le réel, ce sont des charges très lourdes qu’elle continue de nier en bloc. Pour s’en sortir, Marine Le Pen va devoir changer de défense, et parler aux magistrats plutôt que de les insulter. Elle a concédé dimanche qu’elle ne les mettait "pas tous dans le même sac…". C’est un début timide, pas encore un acte de contrition. Comme disait le marquis de Sade, "encore un effort pour être républicain" !

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