Édito
Après la rue, le Parlement : Sébastien Lecornu sous pression pour trouver un accord de non-censure avec le PS

Au matin de son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait été accueilli par le mouvement baptisé "Bloquons tout !", qui n’avait pas bloqué grand-chose. Huit jours plus tard, il s'est heurté à une mobilisation beaucoup plus conséquente.

Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Sébastien Lecornu avec le directeur de cabinet du président lors d'une réunion au Centre opérationnel de gestion interministérielle des crises, à l'hôtel de Beauvau, le 10 septembre 2025. (THIBAUD MORITZ / AFP)
Sébastien Lecornu avec le directeur de cabinet du président lors d'une réunion au Centre opérationnel de gestion interministérielle des crises, à l'hôtel de Beauvau, le 10 septembre 2025. (THIBAUD MORITZ / AFP)

Lors des consultations lancées à Matignon, le Premier ministre avait déjà reçu les syndicats. Au lendemain de la mobilisation du jeudi 18 septembre, il s'est contenté d'un communiqué prudent, annonçant qu'il va remettre ça "dans les jours qui viennent". Un deuxième tour de consultations, un peu comme un deuxième tour de manège, mais la queue du Mickey va être difficile à attraper.

Sébastien Lecornu ne veut pas dévoiler son jeu tout de suite. Jusqu'ici, il n'a rien dit, à part l'abandon de la suppression de deux jours fériés. Jeudi, les syndicats n'avaient donc pas de mesures à se mettre sous la dent. Dès qu'il lâchera quelque chose de précis, le Premier ministre prendra le risque de les braquer un peu plus, et d'attiser la contestation. Or, à court terme, ce n'est pas pour lui, le front le plus urgent à gérer.

D'abord, éviter la censure du Parlement

Sa survie politique dépend d'abord du Parlement. Il doit trouver un accord avec les socialistes pour surmonter la censure qu'il affrontera dès la formation de son gouvernement, début octobre. Et ce terrain politique est tout aussi dangereux que le terrain social. D'un côté, il se heurte aux socialistes qui font monter les enchères - en écho avec la CFDT - pour réclamer notamment une taxation des plus fortunés et la suspension de la réforme des retraites. De l'autre, Sébastien Lecornu doit gérer les états d'âme du socle commun (Renaissance, Horizons, MoDem et LR), dont il a reçu les chefs à déjeuner, jeudi, et qui pour l'heure ne veulent pas lâcher grand-chose à la gauche.

Il espère donc se frayer un chemin en se hâtant lentement, à un train de sénateur - un mandat qu'il a empoché dès ses 34 ans. Et puis, vu sa fragilité politique, Sébastien Lecornu veut faire du judo, c'est-à-dire jouer alternativement sur les forces de ses adversaires pour avancer.

Forcer un accord entre syndicats et patronat

Ainsi, la mobilisation syndicale peut inquiéter les patrons, la colère de ceux-ci peut le conforter aux yeux du PS, et les exigences de ces derniers peuvent resserrer les rangs du bloc central. Il peut espérer négocier un troc final avec, par exemple, une taxe pour les plus fortunés qui ne menace pas les entreprises, une CSG allégée pour un coup de pouce au pouvoir d'achat qui préserve l'activité, et des économies revues à la baisse.

Mais le défi est loin d'être gagné, d'autant que, même s'il réussit à éteindre l'incendie au Parlement, il restera sous la menace de voir la rue s'embraser de nouveau.

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