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"Ils ont vécu Charlie" (3/6) : une policière face aux frères Kouachi
Elle était l'une des premières à arriver sur les lieux le matin du 7 janvier 2015 : une policière de la brigade VTT du 11e arrondissement de Paris. Ce matin-là, elle perd un collègue, Ahmed Merabet et vit avec le traumatisme d'avoir fait face aux frères Kouachi.
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"Il y a un avant et un après. Forcément, on voit la vie différemment, on apprend à vivre avec ce stress post-traumatique qu'on a en soi à vie" : quand la policière part en intervention ce mercredi 7 janvier 2015, elle est loin d'imaginer qu'un attentat terroriste vient de viser la rédaction du journal Charlie Hebdo. Douze personnes vont perdre la vie ce jour-là, dont l'un de ses collègues. "On était trois effectifs, on est sortis avec nos VTT dehors et là on capte un appel de secours, notre station directrice qui parle à la radio, qui dit : "10 rue Nicolas Appert, des coups de feu" mais sans plus de précision, à savoir que c'était la BAC qui était sollicitée, se souvient-elle. On s'est regardés avec mes collègues, on n'était pas spécialement loin, donc on s'est dit qu'on allait y aller tranquillement".
La brigadière rejoint les équipages de la BAC avec ses collègues qui ne savaient, à ce moment-là, pas ce qu'il se passait. Tout à coup, raconte la policière, "deux hommes surgissent derrière nous, des hommes cagoulés en noir qui nous crient 'Allah akbar' et qui nous tirent dessus. Moi, j'étais donc sur mon vélo, j'ai jeté mon vélo à terre, j'ai couru du mieux que je pouvais pour me sauver. Les balles sont passées à quelques centimètres dans mon dos, j'entends encore les sifflements des balles qui résonnent."
"On a aperçu mon collègue Ahmed à terre. J'ai vu un peu de sang au niveau de sa jambe et je lui ai dit 'Ahmed, ne t'inquiète pas, ça va aller'. Mais j'ai un peu compris qu'il n'était pas bien, il avait des yeux vitreux, j'essayais de lui parler, il ne me répondait pas."
La policièreà franceinfo
"J'étais là, robotisée et professionnelle, se rappelle la jeune femme. Je gardais mes traces à indices (...) J'ai même dit à Monsieur Hollande : 'faites attention, vous marchez sur les traces à indices', c'était une douille". Les fonctionnaires de police sont transportés à l'hôpital Georges-Pompidou, ils y rencontrent une psychologue. "Et là on apprend le décès d'Ahmed Merabet, et là tout s'écroule parce que je vois là l'importance du danger et le fait que nous aussi, on a failli y rester. Clairement, on se fait la scène 10 000 fois dans la tête : 'Pourquoi j'ai fait ci ? Pourquoi je n'ai pas fait ça ? Et pourquoi Ahmed est mort ? Et pourquoi moi je suis là ?' C'est vraiment très, très compliqué."
"Je n'arrive plus à prendre la tenue"
Depuis le 7 janvier 2015, la policière, dans la police depuis septembre 2004 et qui se définit à l'origine comme "une femme de terrain", n'est pas retournée sur la voie publique. "Ça m'a tellement traumatisée que je n'arrive plus à prendre la tenue, reconnaît-elle. J'ai été suivie pendant dix ans par des psychiatres et des psychologues et avec des traitements. Je touche du bois parce que ça a fonctionné mais il faut savoir que ça m'a laissé quand même pas mal de séquelles. Je suis devenue un peu maniaque, je sursaute au moindre bruit, je ne supporte plus la foule et je suis parfois irritable."
Après l'attentat, la policière a été mutée dans un autre service, toujours à Paris en juin 2016, puis elle a été mutée en septembre 2017 dans un commissariat, loin de Paris. Puis, depuis 2019, la jeune femme est devenue chargée de communication. "J'ai rejoint ma famille et les miens et je ne voulais plus vivre tous ces attentats, tout ce bouleversement qui faisait de moi quelqu'un qui se sentait renfermé et vraiment pas bien quoi, confie-t-elle. J'avais l'impression de ne plus me sentir en sécurité et j'avais besoin de voir autre chose."
Le procès de l'attentat de janvier 2015 a été un moment extrêmement difficile pour cette ancienne collègue d'Ahmed Merabet, mais c'était aussi un soulagement, "ça m'a fait du bien". Quand elle se souvient des manifestations après les attentats, "d'avoir autant de reconnaissance à ce moment-là, bien sûr, ça fait du bien, confie-t-elle. Maintenant, c'est vrai que les gens ne se rappellent plus de tout ça. C'est fort dommage parce que j'aurais voulu que les citoyens nous applaudissent tous les jours comme ils l'ont fait le 7 janvier 2015. On ne devrait pas attendre des attentats pour qu'on soit autant applaudis. Je veux aussi que cela rappelle que les policiers, au-delà de l'uniforme, sont des personnes qui donnent tout. On est des humains, on n'est pas des machines."
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