En Espagne, malgré 600 ans de présence, les Gitans souffrent toujours de discrimination

Si 2025 a été déclarée année du peuple gitan et qu'un hommage leur a été rendu au Parlement, les stéréotypes ont la vie dure et l'inclusion n'est pas évidente.

Article rédigé par Mathieu de Taillac
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Des Gitans jettent des pétales dans la rivière en hommage aux traditions, lors de la Journé internationale du peuple gitan, à Barcelone, le 8 avril 2025. (MARC ASENSIO / NURPHOTO / AFP)
Des Gitans jettent des pétales dans la rivière en hommage aux traditions, lors de la Journé internationale du peuple gitan, à Barcelone, le 8 avril 2025. (MARC ASENSIO / NURPHOTO / AFP)

C'est la minorité la plus importante d'Europe et c'est aussi un peuple méconnu, victime souvent de préjugés. En France, on les appelle souvent "les Gens du Voyage" alors que les nomades sont minoritaires. En Espagne, même, ils sont à 95% sédentarisés, les Gitans fêtent en 2025 les 600 ans de leur arrivée dans la péninsule ibérique, un laissez-passer du roi d'Aragon datant de 1425 a été retrouvé, et 2025 a été déclarée année du peuple gitan.

Un hommage a été rendu en avril, lors de la journée internationale du peuple Rom, c'était au Parlement espagnol en présence du roi Felipe VI. Un moment fort où les représentants de la Nation rendaient hommage à un peuple qui a été souvent maltraité à travers l'histoire Ce jour-là, dans un beau salon, la salle constitutionnelle, des ministres, des élus de tous les partis, des représentants de nombreux collectifs gitans, se tiennent debout pour écouter Gelem Gelem l'hymne du peuple rom interprété en direct.

Il y a eu plusieurs discours, d'un ministre, d'un patriarche ancien député, notamment, et puis celui du roi, qui se concluait par un remerciement en langue romani. "Aujourd'hui, cette pause sur le chemin nous offre l'opportunité de nous engager pour un présent où l'indifférence n'a pas sa place, et de regarder vers un avenir ou l'inclusion sera complète. Merci beaucoup, nais tuque", avait-il déclaré.

L'inclusion ne va pas de soi. Sara Gimenez est la directrice générale de la Fondation du secrétariat gitan, une grande association de 1 300 salariés et près de 80 bureaux à travers le pays. Elle donne un exemple parmi d'autres. "Même si ça s'améliore, le rejet reste très important", assure-t-elle.

"L'un des derniers chiffres montre que plus de 45% des familles ne souhaitent pas que leur enfant ait pour camarade un élève gitan."

Sara Gimenez, DG de la Fondation du Secrétariat Gitan

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À noter qu'en France, selon l'Eurobarometre sur les discriminations, ce taux de familles mal à l'aise à l'idée de partager la classe avec un camarade gitan grimpe à 70%.

Les discriminations à l'embauche perdurent

En Espagne, les Roms venus d'Europe de l'Est sont minoritaires. La grande majorité de la communauté est composée de Gitans de nationalité espagnole, descendants de ces groupes arrivés d'Inde au cours des six derniers siècles. Et c'est à Séville, dans le sud du Pays, en Andalousie, que sont installés à peu près 40% des Gitans d'Espagne, un bon endroit pour se rendre compte de leur intégration.

La vente ambulante reste la source de revenus la plus fréquente des familles gitanes andalouses, devant l'agriculture ou la construction. Sur un marché, Toni, 54 ans, dit avoir été refusé sur des chantiers à des postes où ont été pris des travailleurs qui n'étaient pas gitans. Mais il voit aussi une amélioration. "Ça, c'était avant, raconte-t-il. Parce que j'ai été présenter ma candidature et j'ai eu le travail. J'étais garde de sécurité sur un chantier, à l'église de la Macarena. J'avais mon uniforme, ma casquette, j'ai travaillé quatre ans et demi ou cinq ans et je n'ai eu aucun problème, rien !".

Une spécialiste de l'orientation professionnelle à la Fédération secrétariat gitan nuance un peu le propos. Embaucher des Tsiganes comme agents de sécurité est parfois aussi une forme de discrimination, parce qu'on attribue aux Gitans des comportements violents ou bien la protection du clan. Pour cette association, la meilleure façon d'éradiquer les stéréotypes, c'est d'embaucher des travailleurs et des travailleuses gitans, de constater au quotidien que les généralisations sont infondées.

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