Proposition de cessez-le-feu en Ukraine : comment Vladimir Poutine cherche à gagner du temps ?

Jeudi soir, Vladimir Poutine a enfin répondu à Donald Trump sur la proposition de cessez-le-feu déjà accepté sans condition par Vlodymyr Zelensky. Un "oui mais" qui sonne comme un "non". La suite est maintenant dans les mains de l'imprévisible Donald Trump.

Article rédigé par Louise Bodet
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Vladimir Poutine au Grand Palais du Kremlin, à l'occasion de la rencontre bilatérale avec le président biélorusse Alexandre Loukachenko, le 13 mars 2025. (CONTRIBUTOR / GETTY IMAGES EUROPE)
Vladimir Poutine au Grand Palais du Kremlin, à l'occasion de la rencontre bilatérale avec le président biélorusse Alexandre Loukachenko, le 13 mars 2025. (CONTRIBUTOR / GETTY IMAGES EUROPE)

Vladimir Poutine a déclaré, jeudi 13 mars, soutenir la proposition de trêve portée le président américain - et acceptée par l'Ukraine - tout en ajoutant des nuances. Il s'agit d'un refus poli d'une trêve censée être sans condition. "Les questions importantes" qui doivent être "réglées", les "causes profondes" auxquelles il faut s'attaquer, tout cela est avancé par Vladimir Poutine pour gagner du temps, lui qui estime être en position de force sur le plan militaire.

Le président russe vient de s'afficher en treillis dans la région de Koursk, où son armée est en train de reprendre à toute vitesse les territoires occupés par les Ukrainiens depuis août 2024. Sur le plan diplomatique, le chef du Kremlin ne dépend pas de l'aide des États-Unis, contrairement à Volodymyr Zelensky. Celui-ci est tenu par Donald Trump. Ainsi, sans dire sèchement "non" au président américain - on sait ce qu'il en coûte - Vladimir Poutine temporise, convaincu que le temps joue pour lui.

Les conditions maximalistes de Vladimir Poutine

D'abord, le président russe ne veut pas que l'Ukraine profite d'une trêve pour retrouver de l'air, pour se réarmer, pour recruter. Et puis les "causes profondes" du conflit dont il parle et qu'il faut, selon lui, "régler dans le cadre d'une paix durable", n'ont pas changé. Elles reflètent le maximalisme des prétentions russes : une Ukraine privée de 20% de son territoire, neutralisée par l'impossibilité de rejoindre l'Otan, et un changement de régime à Kiev.

Vladimir Poutine veut que tout cela soit mis sur la table en préalable à toute discussion. C'est l'inverse du plan imaginé par Donald Trump. Le président américain a pourtant jugé la déclaration de Vladimir Poutine "très prometteuse". Une réaction pour le moins conciliante, quand on se souvient du même Donald Trump vitupérant contre Volodymyr Zelensky dans le bureau ovale, l'accusant de "jouer avec la vie de millions de gens" et avec "une possible Troisième Guerre mondiale". Cette fois, il estime qu'un refus de Vladimir Poutine serait "décevant", et que sa réponse est incomplète. Pas de menaces précises, ni même de mention claire des moyens de pression dont il dispose contre le président russe.

Sanction contre les Russes

Alors, il y a quand même eu cette nuit l'annonce dun début de de sanction contre les Russes. Les États-Unis ne renouvellent pas l'autorisation faite aux banques russes de continuer à utiliser le système bancaire américain pour les transactions pétrolières. Jeudi, le secrétaire au Trésor Scott Bessent a déclaré sur la chaîne CNBC que son ministère était prêt à renforcer les sanctions envers la Russie. "Cela fait partie de la volonté du président Trump de créer les conditions nécessaires à des négociations réussies. Il est prêt à mettre une pression maximale sur les deux camps", a-t-il affirmé.

Cela ressemble bien à un coup de pression, mais Donald Trump ira-t-il plus loin ou choisira-t-il de tordre encore le bras à l'Ukraine ? La balle est dans le camp du président américain qui, comme on le sait, est parfaitement imprévisible.

Les Européens spectateurs ?

Dans cette négociation, l'Europe ne joue pas même un second rôle. En témoigne l'inconfort manifeste de Mark Rutte, le secrétaire général de l'Otan, ancien Premier ministre néerlandais pris au piège du bureau ovale où il est venu rencontrer Donald Trump jeudi 13 mars. Devant les caméras il a remercié le président américain d'avoir mis "fin à l'impasse" dans le dossier ukrainien, le félicitant donc pour sa main tendue à la Russie, perçue pourtant comme une menace par tous les membres européens de l'Alliance atlantique. Mark Rutte et son petit rire gêné quand, à ses côtés, Donald Trump réaffirme sa volonté d'annexer le Groenland, voire le Canada... image troublante d'un allié encore loin de s'émanciper.

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