L'Inde de Narendra Modi se rapproche de Pékin

En conflit avec son allié américain, le Premier ministre indien a profité du Sommet de l'organisation de coopération de Shangaï pour effectuer sa première visite en Chine depuis 2018. L'occasion d'un rapprochement spectaculaire avec la Chine, même si les sujets de tension restent importants entre les deux géants.

Article rédigé par Nicolas Teillard
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le Premier ministre indien Narendra Modi assiste à une réunion avec le président russe en marge du sommet de l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS), à Tianjin, le 1er septembre 2025. (VLADIMIR SMIRNOV / POOL)
Le Premier ministre indien Narendra Modi assiste à une réunion avec le président russe en marge du sommet de l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS), à Tianjin, le 1er septembre 2025. (VLADIMIR SMIRNOV / POOL)

Avec un accueil en grande pompe et une rencontre d'une heure. Narendra Modi, le Premier ministre indien, a été reçu dimanche 31 août par le président chinois, juste avant l'ouverture d'un sommet réunissant une vingtaine de chefs d'États, dont Vladimir Poutine, à Tianjin, près de Pékin.

Un déplacement marquant pour le dirigeant indien, qui n'avait plus posé le pied en Chine depuis sept ans. À eux seuls, les deux pays représentent près de trois milliards d'habitants, mais les grands rivaux du continent sont en froid, pour des questions de suprématie et de frontières. En 2020, des combats directs avaient éclaté entre soldats dans la région du Ladakh, dans l'Himalaya, et causé la mort de 20 militaires indiens.

Des tensions en partie oubliées, à en croire cette visite et les appels de Narendra Modi à "intensifier la coopération avec Pékin". "Le dragon et l'éléphant doivent mener ensemble un pas de deux" a imagé de son côté le dirigeant chinois, qui saisit l'opportunité de voir un puissant allié des États-Unis se rapprocher de lui.

Un effet Trump

L'influence du président américain est incontestable dans cette bascule. Comme dans un effet papillon diplomatique, le gros coup de froid entre New Dehli et Washington provoque un réchauffement à l'Est, avec Pékin. Narendra Modi a subi une série d'affronts de la part de Donald Trump, qui avait reçu le chef des armées pakistanaises à la Maison Blanche au printemps, juste après des affrontements militaires violents au Cachemire. Il a surtout doublé les droits de douane visant l'Inde depuis la semaine dernière, en les portant à 50%, pour en faire l'un des pays les plus violemment touchés par ses mesures tarifaires.

Donald Trump reproche à l'Inde d'acheter du pétrole russe, mais il aurait aussi mal vécu le refus de Narendra Modi de le proposer officiellement comme Prix Nobel de la paix. De quoi pousser New Dehli dans les bras de la Chine, même si le tournant était déjà en partie enclenché depuis quelques mois.

L'Inde doit faire avec la réalité d'une forte dépendance vis-à-vis de la Chine, illustrée par une balance commerciale déficitaire de près de 100 milliards de dollars. Le pays achète beaucoup à son puissant voisin, et notamment des matières indispensables à son industrie, et donc à ses propres exportations.

New Dehli a besoin d'investisseurs et de nouveaux marchés, encore plus avec la pression commerciale américaine. Alors qu'importe si la Chine soutient son ennemi juré pakistanais, et si les questions frontalières sont encore loin d'être réglées, l'éléphant indien regarde désormais le dragon chinois avec une tendresse nouvelle, et s'éloigne des griffes de l'aigle américain. L'amitié de façade aurait sans doute inspiré La Fontaine, mais plus qu'une fable, c'est le symbole d'un monde qui bouge.

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