Bientôt des bombes nucléaires françaises déployées en Europe ?

Mardi, le président de la République sur TF1 a franchi un pas supplémentaire vers l'élargissement de sa dissuasion nucléaire à l'Europe. Emmanuel Macron se dit prêt à ouvrir la discussion.

Article rédigé par Sébastien Laugénie
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Des avions de combat Rafale stationnés dans un hangar sous le pont principal du porte-avions à propulsion nucléaire Charles de Gaulle, le 4 janvier 2025. (PUNIT PARANJPE / AFP)
Des avions de combat Rafale stationnés dans un hangar sous le pont principal du porte-avions à propulsion nucléaire Charles de Gaulle, le 4 janvier 2025. (PUNIT PARANJPE / AFP)

Le sujet ne cesse de revenir sur la table ces derniers mois. La France peut-elle servir de parapluie nucléaire à d'autres pays européens ? Cette question, Emmanuel Macron l’a posée à plusieurs reprises ces dernières années. Mais jusqu’ici il n'a jamais fait de déclarations concrètes sur ce que pourrait signifier un tel élargissement. Mardi soir, pour la première fois, Emmanuel Macron est allé plus loin, en évoquant le déploiement possible de bombes nucléaires françaises dans des pays européens alliés.

"Nous sommes prêts à ouvrir cette discussion. J'en définirai le cadre de manière très officielle dans les semaines et les mois qui viennent", a déclaré le président sur TF1. Le chef de l'État a en revanche mis trois conditions à cette hypothèse : "la France ne paiera pas pour la sécurité des autres", ce déploiement potentiel "ne viendra pas en soustraction de ce dont (la France) a besoin" et enfin "la décision finale reviendra toujours au président de la République, chef des armées". 

Des Rafales en Pologne  ?

Précisément, il s'agirait d'installer des bombes nucléaires de fabrication française, avec des avions capables de les utiliser, des Rafales, sur le sol d'autre pays européens. Par exemple en Pologne, très demandeuse. 

C'est quelque chose qui existe déjà avec les Américains. Près de 150 bombes américaines sont actuellement déployées dans cinq pays, en Allemagne, en Italie, aux Pays Bas, en Belgique et en Turquie. Mais jusqu'ici la France n'a jamais franchi ce cap. Ce qu'a dit le président de la République, c'est qu'une discussion était ouverte et qu'il en dirait plus d'ici quelques semaines. Mais une discussion à certaines conditions.

La première de ces conditions, c'est qu'il n'est pas question de partager le bouton nucléaire. C'est la France, toujours, qui décidera d'employer l'arme atomique. Deuxième condition, pas question de payer pour les autres car la création d'une base nucléaire ailleurs en Europe coûterait très cher. Et enfin pas question non plus de réduire l'arsenal nécessaire à la défense de la France, qui dispose aujourdh'ui d'environ 300 bombes nucléaires sur son sol.

Le contexte géopolitique a changé

Ce processus n'en est qu'au tout début, mais quelque chose se passe manifestement. Parce que le contexte géopolitique a changé. Les États-Unis de Trump entretiennent le flou sur la relation avec Moscou. Les Européens s'inquiètent de ne plus pouvoir compter sur le parapluie nucléaire américain. Et puis, plus récemment, les lignes ont bougé en Europe. Plusieurs pays se disent favorables à ce que la France et la Grande-Bretagne, qui est aussi dotée de l'arme nucléaire, étendent leur dissuasion à tout le continent. 

Les pays scandinaves le souhaitent, les pays baltes, la Pologne, la Roumanie et surtout l’Allemagne de Friedrich Merz, le nouveau chancelier, qui, à peine élu, s'est tout de suite ranger à l'idée. Reste que cela fait cinq ans, dès 2020, qu'Emmanuel Macron a soulevé ce débat et qu'à ce jour cela n'a jamais été suivi d'effets.

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