Avec son idée de droits de douane réciproques, Donald Trump menace de franchir un nouveau cap dans sa guerre commerciale

Après avoir annoncé l'instauration de droits de douane à 25% sur l'aluminium et l'acier, le président américain promet de mettre en place des droits de douane réciproques, en appliquant pour tous les pays des tarifs équivalents à ceux qu'ils appliquent sur un produit venant des États-Unis. Une stratégie économiquement incertaine.

Article rédigé par Nicolas Teillard
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le président américain Donald Trump lors d'une conférence de presse à la Maison Blanche à Washington, DC, le 13 février 2025. (ANDREW CABALLERO-REYNOLDS / AFP)
Le président américain Donald Trump lors d'une conférence de presse à la Maison Blanche à Washington, DC, le 13 février 2025. (ANDREW CABALLERO-REYNOLDS / AFP)

C'est la loi du talion, appliquée au commerce mondial. Fidèle à sa devise, America First ("l'Amérique d'abord"), Donald Trump a décidé d'accentuer la pression sur les partenaires économiques des États-Unis. Le président américain, qui a déjà engagé une taxe supplémentaire de 10% sur les produits chinois, et un tarif de 25% sur l'aluminium et l'acier, menace désormais, jeudi 13 février, d'instaurer des "droits de douane réciproques".

"Si des pays nous imposent un droit de douane ou une taxe, on leur impose exactement le même niveau de droit de douane ou de taxe", résume Donald Trump pour expliquer une mesure de rétorsion qu'il compte appliquer d'ici quelques semaines. Pour prendre un exemple, sur l'automobile, ça signifierait que l'Union européenne, qui impose 10% de taxes aux voitures en provenance des Etats-Unis, se verrait appliquer le même taux pour exporter ses véhicules, aujourd’hui taxés à 2.5%. Pour l'Inde qui applique une taxe à 25%, le bond serait considérable, mais Donald Trump y voit un juste retour des choses. Convaincu que les États-Unis seraient lésés, il promet de passer en revue toutes les disparités douanières avec ses partenaires d'ici fin mars, et d'appliquer à partir d'avril ces "droits réciproques", pour rétablir une "équité" bafouée selon la Maison Blanche.

Les chiffres de la balance commerciale américaine traduisent le sentiment du président. En 2024, le déficit commercial américain s'est encore creusé, pour dépasser les 900 milliards de dollars, c’est-à-dire que les Américains achètent beaucoup plus à l'étranger qu'ils n'exportent des biens. C’est particulièrement vrai avec la Chine qui représente à elle seule un quart de ce déficit, et c'est vrai aussi avec l'Union européenne. Mais là où Donald Trump voit une injustice à réparer, la plupart des économistes ne lient pas cette balance commerciale déficitaire aux tarifs douaniers, y voyant au contraire le résultat de la puissance de l'économie américaine. Un dollar très fort, qui limite les exportations, et un marché de plus de 300 millions de consommateurs qui ont un niveau de vie important, du pouvoir d'achat, et qui achètent beaucoup de produits fabriqués à l'étranger.

Le risque de faire augmenter l'inflation

Les indicateurs de l'économie américaine montrent d'ailleurs qu'elle se porte bien ! La croissance atteint presque 3%, le marché du travail offre une situation de quasi plein emploi, et le pays, qui a des ressources considérables en hydrocarbures, dispose d'entreprises de pointe sur les secteurs d'avenir et de services, des banques aux nouvelles technologies, jusqu'à l'intelligence artificielle.

Seule ombre au tableau, l'inflation, très forte, ce qui a sans doute participé à l'élection de Donald Trump. Or, avec ce bras de fer sur les tarifs douaniers, elle risque d'augmenter, ce que le président a d'ailleurs admis, et qui fait dire au Wall Street Journal qu'il engage la "guerre commerciale la plus idiote de l'histoire".

Le pari est double. En menaçant d'augmenter les tarifs douaniers, Donald Trump compte obtenir des concessions, que ce soit sur l'immigration avec le Mexique, ou sur la régulation des GAFAM en Europe. Il espère aussi que ça poussera les entreprises à choisir de s'installer aux États-Unis, pour échapper à ses taxes et bénéficier des conditions fiscales très favorables offertes par la nouvelle administration. L'enjeu est de taille, c'est ainsi qu'il compte financer les baisses d'impôts massives promises aux Américains.

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