Allemagne : comment Chemnitz, ex-bastion néonazi devenu capitale européenne de la culture, espère améliorer son image de marque

La ville allemande de Chemnitz devient capitale européenne de la culture. Elle était pourtant plus connue jusqu’à présent pour les débordements des néonazis que pour son patrimoine culturel.

Article rédigé par Sébastien Baer
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
"C the unseen" ("Découvrir l'invisible") : le slogan de Chemnitz, capitale européenne de la culture, affiché sur la mairie le 18 janvier 2025 (HENDRIK SCHMIDT / DPA)
"C the unseen" ("Découvrir l'invisible") : le slogan de Chemnitz, capitale européenne de la culture, affiché sur la mairie le 18 janvier 2025 (HENDRIK SCHMIDT / DPA)

Chemnitz, 250 000 habitants, tout à l’est de l’Allemagne, devient officiellement samedi 18 janvier capitale européenne de la culture, ainsi que Nova Gorica, en Slovénie. C'est une divine surprise pour la ville allemande, dont la réputation n'est pas très flatteuse : elle est connue pour son buste de Karl Marx, sa desserte ferroviaire catastrophique, ses artères longues et grises, sa population la plus âgée d’Allemagne et ses défilés de l’ultradroite.

Chemnitz a fait la une de la presse internationale en 2018, quand des néonazis et des hooligans ont pris en chasse des migrants après le meurtre d’un Allemand par un Syrien. Ces images ont choqué l’Allemagne et le monde entier.

C'était autrefois une ville industrielle, florissante, dans laquelle on fabriquait du textile, des machines à vapeur, des locomotives… La ville avait même été surnommée "la Manchester de la Saxe". Mais après la chute du Mur de Berlin, en 1989, Chemnitz a décliné, marquée par les faillites d’usines, le chômage massif et l’exode d’une partie de sa population, qui est passée en 35 ans de 300 000 à 250 000 habitants. Pas évident donc a priori d’associer les mots "Chemnitz" et "culture".

Pour coiffer au poteau Nuremberg, Dresde ou Hanovre – dont les candidatures semblaient avoir plus de chances de l’emporter – , Chemnitz a décidé de jouer la carte de la transparence : les organisateurs ont même collé en une de leur dossier de candidature l’article du New York Times consacré, en 2018, aux débordements néonazis. La ville a voulu prendre le contre-pied et ne pas dissimuler ses problèmes. Son slogan dit tout : "Découvrir l’invisible"

Le programme des festivités fait 500 pages, il pèse un kilo. Plus de 1 000 manifestations sont prévues,  qui exploitent le passé dans l’ex-RDA. Les friches, les bâtiments industriels, les arrière-cours et les garages, où les habitants garaient leur Trabant, ont été réquisitionnés. Et 38 communes des alentours participent aux festivités.

L'ombre des extrêmes continue à planer sur la ville

Des groupes d’ultra-droite, opposés aux dépenses pour la culture, ont tenté de faire barrage à la candidature de Chemnitz. L’extrême-droite a d’ailleurs prévu de manifester samedi dans la ville, en signe de protestatio.… Ces dernières semaines, des groupes artistiques locaux ont été pris pour cibles, avec parfois des agressions physiques.

Dans le programme, les organisateurs ont d’ailleurs glissé plusieurs rendez-vous, des conférences, pour alerter sur les dangers des extrêmes. Chemnitz veut se défaire de son étiquette de bastion néonazi. Le maire veut renvoyer l’image d’une ville attractive, bien au-delà de la région de Saxe. 20% des Allemands de l’Ouest ne sont jamais allés à l’Est. Chemnitz veut leur prouver qu’ils ont tort. Deux millions de visiteurs sont attendus.

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