L'abus de contrats précaires dans le viseur des inspecteurs du travail

La précarité du travail a été multipliée par deux en 40 ans. En 1980, les contrats en CDD et d'intérim représentaient 4,5% de l'emploi total. L'an dernier, c'était près de 10%. Pour vérifier que ces contrats sont utilisés à bon escient, l'inspection du travail lance une grande campagne de contrôle spécifique.

Article rédigé par Sarah Lemoine
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
Environ 3.000 entreprises vont être contrôlées d'ici fin 2025 par l'Inspection générale du travail. (SKYNESHER / E+ / GETTY IMAGES)
Environ 3.000 entreprises vont être contrôlées d'ici fin 2025 par l'Inspection générale du travail. (SKYNESHER / E+ / GETTY IMAGES)

"Bonjour, c'est l'inspection du travail !" À partir de début juin, 3.000 entreprises vont recevoir la visite d'un inspecteur du travail sur un sujet bien précis : la lutte contre le recours abusif aux contrats précaires. Cette campagne nationale de contrôle va se dérouler pendant 6 mois sur l'ensemble du territoire et dans tous les secteurs d'activité.

"Les entreprises qui vont faire l'objet d'un contrôle ne sont pas choisies au hasard", précise Christelle Chambarlhac, cheffe du bureau du pilotage à la Direction générale du travail (DGT). Elles sont ciblées parce que leur taux de recours aux contrats en CDD et en intérim est supérieur à la moyenne, dans leur branche d'activité, au niveau régional. Les inspecteurs le savent, ils ont accès aux données sociales nominatives de chaque entreprise et un outil numérique a été conçu pour les comparer.

"Un effectif précaire à 99%, dans certaines petites structures culturelles ou associatives"

L'abus de contrats précaires, c'est lorsqu’une entreprise recrute un CDD ou un intérimaire sur un poste permanent et habituel, qui pourrait être transformé en CDI. "C'est devenu la norme pour certains employeurs" affirme Christelle Chambarlhac, pour réduire le risque quand l'activité économique ralentit, pour échapper aussi à la réglementation liée aux CDI ou pour tester le salarié en guise de période d'essai.

Dans certaines petites structures associatives ou culturelles,"il n'est pas rare de voir un effectif à 99% précaire en dehors du dirigeant", dit-elle. "Ou des chantiers de BTP qui tournent avec un seul salarié permanent, et tous les autres en intérim".

Dans le cadre des contrôles, les motifs de recours aux contrats précaires seront particulièrement scrutés. "L'accroissement temporaire d'activité", souvent "utilisé à toutes les sauces". Le "remplacement de salarié absent" aussi, surtout quand personne n'est absent. Ou le recours au CDD d'usage, (CDDU) réservé à certains secteurs d'activité, et qui ne donne pas droit à la prime de précarité.

Un rapport d'évaluation attendu fin 2026

"Les entreprises ne sont pas prises en traître" affirme Christelle Chambarlhac, de la DGT. Les organisations patronales ont été prévenues et sensibilisées en amont de l'opération, afin que les entreprises puissent régulariser par elles-mêmes les situations abusives. "La sanction n'est pas la première intention, mais si l'employeur ne se met pas en conformité, alors l'inspecteur dresse un procès-verbal qui a vocation à être envoyé au parquet".

Cette campagne nationale de contrôle fera l'objet d'une évaluation. Le rapport sera rendu public fin 2026.

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