À quel point la baisse de l’allocation chômage à partir du 7e mois modifie-t-elle les comportements des chômeurs concernés ?

"Pour ou contre la dégressivité des allocations chômage" ? La question avait enflammé les débats avant la grande réforme de l’Assurance chômage de 2019. Depuis, la mesure s’applique à 3 % des chômeurs indemnisés. Qui sont-ils et comment cela influence-t-il leur comportement ?

Article rédigé par Sarah Lemoine
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Les chômeurs dont l'allocation baisse au maximum de 30 %, à partir du 7e mois d'indemnisation, retrouvent un travail un mois et demi plus rapidement, en moyenne, selon la Dares. (Photo d'illustration) (WESTEND61 / WESTEND61)
Les chômeurs dont l'allocation baisse au maximum de 30 %, à partir du 7e mois d'indemnisation, retrouvent un travail un mois et demi plus rapidement, en moyenne, selon la Dares. (Photo d'illustration) (WESTEND61 / WESTEND61)

Les chômeurs concernés par la réforme de la dégressivité ont tous un point commun. Ils gagnaient plus de 4900 euros bruts par mois, avant de s’inscrire au chômage. Depuis l’entrée en vigueur de la mesure, à l'automne 2021, ces personnes voient leur allocation baisser subitement à partir du 7e mois d’indemnisation, jusqu’à 30 % pour les plus aisés d’entre eux.

Ce sont très majoritairement des hommes, cadres, fortement diplômés, âgés de plus de 45 ans. Ils quittent plus fréquemment leur entreprise après un licenciement ou une rupture conventionnelle. Rares sont ceux qui sont en CDD ou en intérim. C’est ce que montre le rapport d’évaluation publié début avril par les services du ministère du travail.

Retour au travail plus rapide

À quel point la dégressivité de l’allocation modifie-t-elle les comportements ? C’est ce qu’a cherché à mesurer la Dares en comparant les 3 % de chômeurs qui subissent la dégressivité à ceux qui n’y sont pas soumis, et en analysant la façon dont les uns et les autres consomment leur droit avant et après l’application de réforme.

Sans surprise, le premier résultat montre que quand l’allocation est dégressive, la sortie du chômage et le retour à l’emploi sont accélérés. Surtout pour ceux frappés par la baisse maximale de 30 % : en moyenne, ils ont retrouvé un travail un mois et demi plus rapidement qu'avant la réforme. Contre 20 jours pour ceux dont l'allocation a baissé moins fortement.

Autre enseignement, le retour à l’emploi est plus important pendant la période de différé, c’est-à-dire quand les chômeurs sont inscrits à France Travail mais ne touchent pas encore l'allocation, parce qu’ils bénéficient d’indemnités de licenciement ou de rupture conventionnelle qu'on leur demande de consommer. Cela montre une réaction par anticipation nettement plus marquée qu’auparavant souligne Raphaël Lardeux, économiste à la Dares.

35 % d'économies en plus

Mais en retrouvant un travail plus rapidement, les chômeurs concernés ont-ils dû faire des concessions ? Non, d'après le rapport d'évaluation. Ce retour accéléré à l’emploi ne diminue pas les chances d'obtenir un emploi durable. 75 % des chômeurs pénalisés par la dégressivité ont accédé à un CDI dans les mêmes proportions qu’avant la réforme. Leur salaire de base n’a pas baissé non plus. Pour les primes et les compléments, par contre, on ne le sait pas.

Au final, quelles sont les économies générées par la réforme ? On savait déjà que l'effet mécanique de la dégressivité à partir du 7e mois réduisait de 500 millions d'euros par an les dépenses de l'Assurance chômage. La Dares calcule que le changement comportemental, qui incite à retrouver un emploi avant le 7e mois, génère un gain supplémentaire de 35 %. À noter que la réforme de la dégressivité a été légèrement aménagée début avril. Désormais, les cadres à hauts revenus en sont exemptés dès 55 ans, contre 57 ans auparavant.

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