Une radiologie américaine assure avoir créé un outil capable de déceler les violences conjugales

Cet outil, utilisant l'intelligence artificielle, s’appuie sur une série de données pouvant aller de l'historique des fractures à l'annulation de rendez-vous. Il est développé par une praticienne installée à Boston.

Article rédigé par Loïc Pialat
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
L’outil développé par la praticienne américaine s’appelle AIRS , abréviation pour "système automatisé de soutien face au risque de violence intime", (photo d'illustration) (SIMARIK / E+)
L’outil développé par la praticienne américaine s’appelle AIRS , abréviation pour "système automatisé de soutien face au risque de violence intime", (photo d'illustration) (SIMARIK / E+)

Une radiologue de la région de Boston aux États-Unis a mis au point, en ce premier trimestre 2025, grâce à l’intelligence artificielle, un outil qui serait capable, selon elle, de déterminer rapidement si une personne est victime de violences conjugales. L’outil s’appelle AIRS , abréviation pour "système automatisé de soutien face au risque de violence intime". L’outil s’appuie sur une série de données comme l’historique des fractures d’un ou d’une patiente, l’annulation de rendez-vous, les visites aux urgences et analyse également les types de blessures.

Des blessures défensives suggèrent qu’une victime a essayé de se protéger, une fracture près du petit doigt comme si la main avait été placée devant le visage, une fracture près du pouce indique plutôt que le patient a tenté de se rattraper pendant une chute, par exemple. AIRS surveille aussi les "cibles", c’est-à-dire les parties du corps souvent visées par l’agresseur, les os autour des yeux et des joues. Le rôle des radios est donc essentiel ici. Un radiologue n’a pas forcément le temps d’étudier l’historique d’un patient. L’outil va aussi proposer des angles de discussions pour assister le personnel médical face aux victimes.

La docteure Bharti Khurana travaille aux urgences de l’hôpital Brigham à Boston. Elle travaille sur AIRS depuis cinq ans. L’idée est venue après avoir entendu une infirmière qui s’étonnait que la médecine ne s’intéresse pas plus aux causes des blessures qui envoient des patients aux urgences. En tant que radiologue, elle s’est sentie visée. Aux États-Unis, une femme sur quatre et un homme sur sept ont été victimes de violences de la part d’un partenaire. Et donc, avec une ingénieure du MIT, Bharti Khurana a commencé à développer AIRS, aidée par une bourse de trois millions de dollars accordée par l’institut national de la santé qui a aussi fourni 7000 images pour nourrir et former l’intelligence artificielle de AIRS.

Un système fiable, selon sa créatrice

Un hôpital de San Francisco a décidé d’utiliser lui aussi cet outil. La docteur Bharti Khurana affirme qu’en moyenne AIRS va détecter les cas de violence conjugale quatre ans avant que la victime ait la force, le courage ou la possibilité tout simplement de le signaler. C’est important parce que, dit la radiologue, ces violences sont un cycle d’abus et les blessures s’aggravent avec le temps donc intervenir le plus rapidement possible peut éviter le pire. Dans 80% des cas, l’IA ne se trompe pas si l’on en croit Bharti Khurana. Ce n'est pas encore 100% donc, mais une étude de la revue Nature publiée au printemps 2024 estimait que seulement 25% des cas de violence conjugale étaient diagnostiqués correctement par les médecins. Une spécialiste de l’œil interviewée par Fast Company se méfie toutefois de l’enthousiasme excessif autour de l’IA. Ce n’est pas une baguette magique qui va remplacer l’expérience d’un médecin et l’histoire médicale d’un patient ou d’une patiente peut être trompeuse.

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