"La conception commence à l’érection" : pour dénoncer l’hypocrisie des anti-avortements, une élue de l'Ohio veut criminaliser le sexe non-protégé

Aux États-Unis, l'élue de l'Ohio Anita Somani propose de radicaliser les rapports sexuels non protégés n'ayant pas pour but la reproduction. Derrière cette idée radicale, l'élue cherche à ouvrir le débat sur les droits reproductifs en rappelant qu’une femme ne tombe pas enceinte toute seule.

Article rédigé par Loïc Pialat
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Anita Somani, élue démocrate de l'Ohio propose une loi pour criminaliser le sexe non-protégé. (Photo d'illustration). (CHASSENET / BSIP)
Anita Somani, élue démocrate de l'Ohio propose une loi pour criminaliser le sexe non-protégé. (Photo d'illustration). (CHASSENET / BSIP)

"La conception commence à l’érection". C’est le nom d’une proposition de loi présentée, en ce mois de février, par Anitat Somani, une élue démocrate de l’Ohio aux États-Unis et gynécologue depuis 30 ans. Ce texte vise à criminaliser tout rapport sexuel non-protégé qui n’aurait pas pour but la reproduction. Mais le vrai sens de cette proposition de loi est ailleurs. 

La loi, si elle était adoptée, ferait de tout homme un criminel s'il "décharge du sperme ou du matériel génétique sans intention de fertiliser un embryon". Pour un premier manquement à la loi, l'amende serait de 1 000 dollars, tandis qu'une deuxième infraction entraînerait une amende de 5 000 dollars, et 10 000 dollars en cas de troisième offense. Le texte prévoit des exceptions dans le cas de la masturbation, d’un don de sperme ou si une protection est utilisée. De plus, la communauté LGBT serait exemptée de cette loi. 

Cette proposition de loi a immédiatement provoqué de vives réactions dans l'Ohio. Une chaîne locale a interviewé des hommes de l’Ohio. "C’est dingue", s’est plaint l’un d’entre eux. "On dirait bien que tous les mâles qui ont vécu dans l’Ohio vont devenir des criminels. Je ne connais personne qui ne sera pas arrêté si la loi passe", ajoute-t-il. Un autre estime que la proposition est "anormale". Un élu anti-avortement crie lui au ridicule. "Une moquerie des concepts les plus basiques de la biologie", dit-il encore. Cet homme, Austin Beigel, défend lui-même un texte qui assurerait à tout embryon la même protection qu’à n’importe quel citoyen américain. Il argue que, même si une majorité d’électeurs s’est prononcée en faveur du droit à l’avortement il y a deux ans, la majorité peut parfois se tromper, comme ce fut le cas avec l'esclavage. 

Une loi qui a peu de chances de passer

Malgré l'attention médiatique qu'elle suscite, cette proposition a peu de chances d'être adoptée. La raison principale étant que les républicains contrôlent largement les deux chambres de l'Ohio. Ensuite,  comme l'a précisé Anita Somani, l'objectif n'est pas réellement de faire passer cette loi. "Je sais que ma proposition a l’air grotesque" écrit-elle dans une tribune du Colombus Dispatch, consciente que rien que le nom de la loi est provocant. "L’important, c’est que nous ayons cette conversation", poursuit-elle. L’élue rappelle qu’une femme ne tombe pas enceinte toute seule et pointe l’hypocrisie des anti-avortements en rappelant que dix États qui interdisent l’avortement même en cas de viol. Elle questionne également la différence de protection du corps des hommes d’un État à l’autre. "Je ne suis pas là pour réguler les droits reproductifs, je suis là pour montrer l’absurdité de réguler les droits reproductifs de quelqu’un", résume Anita Somani.

Si on peut trouver son idée extrême, la presse américaine signale que l’un des juges conservateurs de la Cour suprême envisagerait de remettre en cause l’arrêt Griswold contre le Connecticut. C’est-à-dire l’arrêt qui a permis de légaliser la contraception aux États-Unis il y a 60 ans.

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