Vidéo "La haine mène à des Auschwitz" : Ginette Kolinka, "petite jeune fille de 99 ans trois quarts" rescapée de l'enfer, s'inquiète de l'antisémitisme présent chez "beaucoup de monde"

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Article rédigé par France 2
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"Une petite jeune fille de 99 ans trois quarts, qui a eu la chance de survivre au camp de l'enfer d'Auschwitz-Birkenau" : c'est ainsi que se présente Ginette Kolinka. Devant la caméra d'"Envoyé spécial", elle garde les yeux fermés et s'en explique : "Je ne pourrais pas raconter ce que je raconte avec les yeux ouverts."

Il y a quatre-vingts ans, Ginette Kolinka a été déportée à Auschwitz-Birkenau, en même temps que 1 500 personnes – dans le même convoi qu'une certaine Simone Veil, qui portait alors le nom de Jacob. C'était le 13 avril 1944, elle avait 19 ans et s'appelait encore Ginette Cherkasky.

Les souffrances infligées par les nazis, qui hantent ceux qui ont échappé aux chambres à gaz, commencent dès la descente du train. La jeune fille est conduite dans une salle où on l'oblige "à être nue, devant tout le monde" avant de la raser. "Des moments tellement, tellement affreux" que, "à partir de ce moment-là, dit-elle, je ne suis plus rien. J'étais anéantie, complètement. J'étais devenue une loque humaine, à qui on pouvait faire tout ce qu'on voulait. Aucune réaction."

Depuis les années 2000, elle fait le tour des lycées qui l'invitent pour raconter la Shoah aux adolescents, pour que "'plus jamais ça' devienne réalité". Ce jour-là, c'est au mémorial de la Shoah de Drancy que Ginette Kolinka intervient. Avant d'être mise dans un wagon à bestiaux pour Auschwitz, la jeune fille a transité par le camp d'internement de Drancy, comme 63 000 personnes au total – soit environ 80% des juifs déportés de France.

"Je suis juive, il y a des antisémites"

Quand elle livre son témoignage, sobre et poignant, à des jeunes particulièrement attentifs, Ginette Kolinka ne veut "absolument pas" qu'on la remercie. "C'est moi qui dois remercier tous ces enfants, ces élèves, proteste-t-elle avec force. Ils m'ont écoutée, et je leur demande d'être des passeurs de mémoire. Ça veut dire qu'il faut que vous racontiez ce que vous avez écouté. La haine mène à des Auschwitz."

Que va faire cette génération du récit d'une ancienne déportée ? Comment cette mémoire sera-t-elle transmise ? "J'aimerais être dans un trou de souris, et écouter ce que ces enfants vont dire à leurs parents", confie Ginette, espérant que "ça va faire un débat".

"Je suis juive, il y a des antisémites. J'aimerais entendre un antisémite me dire pourquoi il n'aime pas les juifs." L'ancienne déportée raconte avoir reçu un jour ces réponses d'un petit garçon : "Parce que vous êtes tous riches. Parce que vous êtes partout." Des réponses qui sont "malheureusement, dans la tête de beaucoup, beaucoup de monde", déplore-t-elle.

Extrait de "Ginette Kolinka : mémoire vive", un reportage à voir dans "Envoyé spécial" le 23 janvier 2025.

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