Vidéo Des cancers diagnostiqués plus tard à cause de la pénurie de dermatologues ? C'est la conclusion d'une étude réalisée par une équipe hospitalière

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Article rédigé par France 2
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Non seulement les dermatologues se font rares, mais parmi ceux qui restent, beaucoup privilégient les actes esthétiques, plus rémunérateurs. Avec quelles conséquences pour la santé des Français ? Un extrait d'"Envoyé spécial".

En hausse de 320% : en France, le nombre de cancers de la peau a explosé ces quinze dernières années. Cette augmentation est principalement due au vieillissement d'une population qui s'est beaucoup exposée aux rayons UV, mais un autre constat inquiète aussi les médecins.

Au CHU de Saint-Etienne, comme dans tous les hôpitaux français, les soignants voient arriver des patients atteints de mélanomes à des stades de plus en plus avancés. Or, il est crucial de diagnostiquer le plus tôt possible ce type de cancer de la peau, car il peut répandre ses métastases dans tout le corps en quelques mois seulement. Mais s'il est soigné à temps, le taux de guérison atteint 93%.

Le Pr Jean-Luc Perrot se souvient avec émotion d'un patient arrivé en larmes dans son service. Cela faisait un an, avait-il expliqué, qu'il cherchait à consulter un dermatologue en ville pour un grain de beauté et un ganglion qui grossissaient, sans obtenir de rendez-vous. Malheureusement, la prise en charge a eu lieu trop tard et le patient n'a pas pu être sauvé. Après ce cas particulièrement dramatique, l'équipe du CHU a décidé de se concentrer sur la cancérologie. Toutes les semaines, elle se réunit pour étudier les dossiers des patients suivis dans le service... et doit se résoudre à orienter certains d'entre eux vers des soins palliatifs.

"Un véritable enjeu de santé publique"

Impuissante face au nombre croissant de cancers cutanés diagnostiqués au stade métastatique, l'équipe du Pr Perrot a entamé un travail de recherche. Sur les quinze dernières années, elle a réussi à corréler l'aggravation des cancers de la peau pris en charge à l'hôpital et la baisse du nombre de dermatologues. Moins de spécialistes, cela signifie de plus en plus de mélanomes découverts trop tardivement.

La conclusion de l'étude est sans appel quant aux conséquences de la difficulté d'accès à un dermatologue : "Le parcours de soin actuel aboutit donc à un retard diagnostique impactant directement le pronostic des patients et devient un véritable enjeu de santé publique." Et de pointer le grand tabou de la profession : 

"Même s'il s'agit d'un sujet très sensible, il paraît logique de poser la question du temps dermatologique absorbé par la pratique de la médecine esthétique au détriment de l'activité de soin."

Partout en France, l'activité médicale de ces trop rares dermatologues a baissé. Combien sont-ils à délaisser la santé au profit de séances beaucoup plus lucratives d'épilation au laser ou d'injections de Botox ? En avril 2024, l'actuel ministre chargé de la Santé et de l'Accès aux soins Yannick Neuder, alors député, avait déposé une proposition de loi visant à réguler cette pratique... 

Extrait de "Où sont passés les dermatos ?", un reportage à voir dans "Envoyé spécial" le 20 février 2025.

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