Vidéo "Bouffée délirante aiguë", "désorientation totale"... Soumis par une église évangélique à une thérapie de conversion, ce jeune homosexuel aurait pu "finir en hôpital psychiatrique"

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Article rédigé par France 2
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Le courant évangélique est en plein essor en France, mais certains "déconvertis" dénoncent une face plutôt sombre. Dans cet extrait d'"Envoyé spécial", les regrets d'un ancien pasteur qui prêchait que l'homosexualité est un péché, et le témoignage d'un jeune homme victime d'une thérapie de conversion.

Thomas est né dans une famille évangélique, ce courant religieux en plein essor en France auquel s'intéresse "Envoyé spécial". A 19 ans, il trouve le courage d’avouer à son pasteur son secret : une homosexualité longtemps refoulée par peur d’être rejeté. L'ecclésiastique panique, lui dit qu'il ne sait pas "comment gérer ça", adresse des prières à Dieu pour "guérir Thomas de ses attirances homosexuelles", raconte le jeune homme.

Pour les évangéliques les plus rigoristes, "Dieu considère l’homosexualité comme un péché abominable, et donc il faut absolument que vous vous en détachiez, que vous deveniez quelqu’un d’hétérosexuel", explique Hugo, un ancien pasteur qui raconte sa "déconversion" dans le reportage. Il regrette d'avoir participé à une emprise qu'il dénonce désormais, "d'avoir prêché des choses avec lesquelles [il est] complètement en désaccord aujourd'hui". L’un des pasteurs de son église proposait même des thérapies de conversion, un délit puni de deux ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. En France, tous les propos ou comportements répétés visant à modifier l’orientation sexuelle sont interdits depuis 2022.

Une prière d'autoflagellation

Une thérapie de conversion, c'est ce qu'a vécu Thomas, sous forme de stage avec des pasteurs spécialistes de la "libération", selon le terme employé. Cette "formation" serait encore dispensée à l'heure actuelle, précise le jeune homme. Dans le livret qui lui a été remis pour qu'il travaille sur ses "péchés", entre le divorce et l'avortement, l'homosexualité fait l'objet d'une prière : "Je renonce à toute pensée, tout désir, penchant et acte homosexuel, et je dénonce toutes combines par lesquelles Satan a perverti mes relations."

Cette prière d'autoflagellation, Thomas "la lisai[t] en boucle, tout le temps, raconte-t-il. Je voulais changer, à ce moment-là. C’est un conditionnement, en fait. On nous dit depuis petit que ce n'est pas normal, et donc naturellement, on va vers des personnes qui nous disent de changer. Ça a fait que j’ai eu un grand rejet de moi-même, pendant longtemps, je ne m’aimais pas, et encore aujourd’hui, j’apprends à m’aimer."

A force de prier pour cette transformation impossible, Thomas sombre psychologiquement. "On prie pour moi. Mais moi, je ne vois rien qui s’améliore. Pire, je me vois aller de plus en plus mal, être malheureux, angoissé. J’ai fait une bouffée délirante aiguë, [qui a mené à] un épisode de désorientation totale. J’ai dû voir un psychiatre. Il m’a dit : 'Si vous ne quittez pas votre secte, vous allez devenir fou, vous allez finir en hôpital psychiatrique'."

Aujourd'hui, le jeune homme vit encore sous traitement médical. Contactée, l'église de Thomas n'a pas répondu aux sollicitations du magazine.

    Extrait de "Evangéliques : un succès pas si angélique ?", un reportage à voir dans "Envoyé spécial" le 25 septembre 2025.

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