: Vidéo "Nuggets" et "boulettes" interdits deviennent "neugâtes" et "boulaites" : la guerre des mots entre le camp de la viande et l'industrie végétale
Dans la guerre des mots, "pro" et "anti"-viande ne font pas de quartiers. Dans cet extrait de "Complément d'enquête", voici comment le camp de la viande a manœuvré dans les coulisses du pouvoir pour interdire à l'industrie végétale d'appeler ses produits "steaks", "lardons" ou "boulettes".
"Ils veulent dire qu'ils ne font pas de la viande, mais ils utilisent quand même des mots de viande", proteste Christiane Lambert. L'ancienne dirigeante de la FNSEA, le puissant syndicat agricole, dénonce dans cet extrait de "Complément d'enquête" "une copie pas conforme". Non contente de leur piquer des parts de marché, les marques végétales ne pillent-elles pas les noms des produits carnés ? Dans les rayons des hypermarchés, on trouve leurs "bacon", "boulettes", "escalopes", "nuggets", "saucisses", "steaks"… dépourvus de toute protéine animale. Alors ces dénominations se sont retrouvées au cœur d'une bataille féroce avec le camp carnivore.
Les marques végétales telles que La Vie, Accro ou HappyVore, présentes en grande distribution, ne représentent que 2% des ventes des rayons viande et charcuterie emballée, mais la filière viande tient absolument à conserver l'exclusivité de tous les mots carnés. Une "espèce d'obsession" qui montre bien qu'"ils ont peur", pointe Nicolas Schweitzer, cofondateur de La Vie.
"Les acteurs, les lobbies de la viande intensive ont bien compris qu'il y avait un risque assez réel, à court terme, qu'on commence à venir leur manger des parts de marché. Et donc ils font tout pour nous mettre des bâtons dans les roues."
Nicolas Schweitzer, cofondateur de la start-up La Viedans "Complément d'enquête"
Le camp de la viande a en tout cas mobilisé tous ses soutiens dans les couloirs de l'Assemblée nationale. En 2019, le député et éleveur Jean-Baptiste Moreau soutenait dans l'hémicycle qu'"associer le terme de 'lait', 'steak' ou encore 'fromage' aux produits d'origine végétale, qui ne comportent ni lait ni viande, ou très peu", serait "une pratique commerciale trompeuse pour le consommateur". En 2022, un décret lui donne raison : les "saucisses", "lardons" et autres "cordons bleus", soit plus de 300 appellations, sont interdites aux produits végés.
Ne dites plus "merguez", mais "tige cylindrique à bouts ronds"
Un "coup de tonnerre" pour les marques végétales, et une menace pour leur développement, selon Nicolas Schweitzer : "On avait deux ou trois mois pour se mettre en conformité, ce qui n'est physiquement pas possible au vu des délais d'approvisionnement des packs, etc., avec des pénalités financières monstrueuses".
Alors, avec d'autres acteurs du végétal, La Vie décide de contre-attaquer et dépose un recours au Conseil d'Etat. Dans l'attente de la décision, les marques choisissent de tourner l'interdiction en ridicule sur leurs réseaux sociaux. Les merguez deviennent des "tiges cylindriques à bouts ronds", les steaks des "sphères aplaties". Se jouant de l'orthographe, les nuggets et les boulettes sont rebaptisés "neugâtes" et "boulaites".
"On n'a pas le choix, plaide Nicolas Schweitzer. On est tellement petits que notre seule arme, c'est l'humour." Une façon aussi de tenir bon face aux tentatives d'intimidation et aux multiples rebondissements qu'a connus ce décret. En juillet 2022, il est suspendu ; deux ans plus tard, sa publication fait figure de cadeau aux agriculteurs en colère ; et finalement, le Conseil d'Etat le retoque définitivement. Conformément à la législation européenne, "la France ne peut interdire l'utilisation de dénominations usuelles d'aliments d'origine animale pour commercialiser des aliments contenant des protéines végétales".
Extrait de "Touche pas à mon steak", à voir dans "Complément d'enquête" le 12 juin 2025.
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