Trêve à Gaza : la libération "au compte-gouttes" des otages israéliens est "une torture", dénonce Ofer Bronchtein, président du Forum international pour la Paix

Ofer Bronchtein, président du Forum international pour la Paix, ancien collaborateur d’Yitzhak Rabin, a estimé jeudi 30 janvier sur franceinfo que la libération "au compte-gouttes" des otages israéliens est "une torture". Israël et le Hamas doivent effectuer, jeudi, leur troisième échange d’otages contre des prisonniers, avec la libération de trois otages israéliens et cinq Thaïlandais dans le cadre de l’accord de cessez-le-feu.

Ofer Bronchtein, chargé de mission par Emmanuel Macron pour le rapprochement israélo-palestinien, dénonce la mise en scène du Hamas lors de la libération des otages israéliens : "Les images sont assez surréalistes. On dirait qu’on est au duty-free et aux Jeux olympiques", dit-il. Il critique également vivement le Hamas et le gouvernement israélien qui font "vivre un feuilleton, une série tous les jours" en menaçant de remettre en cause l'accord. "Je trouve ça d'un cynisme terrible. Derrière ça, il y a des morts", rappelle-t-il.

franceinfo : Dans quel état d’esprit êtes-vous ?

Ofer Bronchtein : Ce sont vraiment les montagnes russes. Du côté israélien, c’est un pays entier qui est derrière les otages depuis un an et demi. Tous les jours, il est là pour faire entendre sa voix auprès du gouvernement pour demander à ce que les otages soient libérés à tout prix. Pour le pays, c'est un soulagement de voir chaque jour quelques otages libérés. Mais d’un autre côté, c’est une torture terrible parce qu'ils sont libérés au compte-gouttes. Je ne comprends plus la logique de ces accords. Pourquoi au compte-gouttes ? Les paramètres sont très clairs. Les otages qui sont vivants et les cadavres doivent être libérés et la guerre doit s'arrêter. Ce sont les deux paramètres viables. C'est vraiment de la torture à la fois pour les Palestiniens et à la fois pour les Israéliens.

Les otages israéliens ont reçu un "sac cadeau" lors de leur remise en liberté. Que vous inspire la mise en scène du Hamas ?

Je me pince parfois parce que les images sont assez surréalistes. On dirait qu’on est au duty-free et aux Jeux olympiques. Ils reçoivent une médaille. C’est vraiment surréaliste. Derrière, il y a des kilomètres de pauvres Palestiniens qui ne savent plus où aller. Ils sont bloqués vers le nord puisqu’Israël n’a plus autorisé le retour vers le nord. Et ils ne peuvent plus retourner vers le sud. C'est lunaire comme image. Je trouve ça tellement triste. Derrière ça, il y a toute une population gazaouie qui est dans une détresse terrible et Israël qui est encore paralysé par ce qui s'est passé le 7 octobre.

Le Hamas a averti que les prochaines libérations d’otages, prévues samedi, pourraient être compromises. Il accuse Israël de retarder l'entrée de l'aide humanitaire à Gaza. L’accord reste fragile ?

Ils nous font vivre un feuilleton, une série tous les jours, Il y aura des rebondissements tous les jours. Tous les jours, ils auront une excuse, l'un ou l'autre, pour dire qu’on arrête tout, on ne joue plus le jeu. Et à la fin, ils trouvent un arrangement. Je trouve ça d'un cynisme terrible. Derrière ça, il y a des morts. Derrière ça, il y a des blessés. Derrière ça, il y a une détresse, il y a un pays comme Israël qui a peur pour son existence même alors qu'on célébrait le 80e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz. Derrière ça, il y a des millions de Palestiniens, des dizaines de milliers de morts, des centaines de milliers de blessés. Gaza est détruite. Je trouve ça vraiment triste et cynique. Il faut que ça s'arrête le plus vite possible. On doit redonner espoir aux deux peuples parce qu'il n'y aura pas de solution militaire au conflit israélo-palestinien. Il faut surtout qu'on mette bien ça dans la tête des Palestiniens et des Israéliens.