: Vidéo La prix Nobel Emmanuelle Charpentier : "La France aurait eu du mal à me donner les mêmes moyens qu'en Allemagne"
Elle est la troisième chercheuse française à obtenir le prix Nobel de chimie. La scientifique a répondu aux questions de France 2 dans les locaux de l'Institut Max-Planck, à Berlin (Allemagne), où elle dirige une unité.
C'est le temps des honneurs pour la généticienne Emmanuelle Charpentier. La Française de 51 ans a décroché le prix Nobel de chimie, mercredi 7 octobre, en compagnie de l'Américaine Jennifer Doudna. Les deux femmes sont récompensées pour leur découverte d'une technique d'édition du génome baptisée Crispr-Cas9, des "ciseaux moléculaires" aptes à éliminer et à ajouter des fractions de matériel génétique avec une extrême précision.
La chercheuse dirige aujourd'hui le Centre de recherches Max-Planck pour la science des pathogènes, à Berlin. Elle a répondu aux questions de Laurent Desbonnets, correspondant de France 2 en Allemagne.
France 2 : Comment avez-vous appris la nouvelle ?
Emmanuelle Charpentier : J'ai appris la nouvelle dans mon bureau. J'ai reçu un coup de téléphone de Stockholm, de l'Académie royale des sciences de Suède. J'étais très émue, bien sûr.
Vous vous y attendiez ?
Emmanuelle Charpentier : Il était clair qu'un jour ou l'autre, Crispr-Cas9 serait reconnu avec un prix Nobel. Maintenant... Est-ce que ça serait moi ? Quand est-ce que la nouvelle arriverait... Ce n'était pas clair, donc je me suis rendu compte ce matin que j'étais très émue parce que j'avais du mal à réagir et à comprendre que c'était réel. Et aussi parce que cela reflétait les dix dernières années qui ont été extrêmement intenses parce que j'ai été en Autriche, puis en Suède, en Allemagne. J'ai créé des bibliothèques et j'ai eu beaucoup de prix.
Vous avez un message à faire passer aux jeunes femmes ?
Emmanuelle Charpentier : J'ai un message à faire passer d'abord pour la recherche fondamentale. Cette découverte est vraiment issue d'une recherche en microbiologie fondamentale et maladies infectieuses. Je pense que, maintenant, les gens comprennent ce que sont les maladies infectieuses. [Il y a] donc le besoin de soutenir la recherche fondamentale dans le monde entier sur les virus, les bactéries.
Et [il y a] un deuxième message qui est bien sûr... Ce prix a été donné aujourd'hui à deux femmes scientifiques, ça reflète ce qui se passe à l'heure actuelle. Il y a davantage de femmes qui ont des laboratoires et qui font de la recherche. J'espère que [cette récompense] peut donner le message, pour les jeunes filles, de continuer la recherche, de commencer la recherche. La reconnaissance scientifique, ou le fait de trouver quelque chose d'important, est indépendant d'être un homme ou une femme, c'est être un scientifique et de se tenir en tant que scientifique.
N'est-il pas dommage de ne pas faire votre travail de recherche en France ?
Emmanuelle Charpentier : Je suis partie de France déjà depuis vingt-quatre ans, si je compte bien. J'ai un parcours international, je suis une "mobile scientist", une scientifique mobile, un électron libre. Je pense que la France aurait du mal à me donner les moyens que j'ai en Allemagne. Cela ne veut pas dire que tout le monde a des bons moyens en Allemagne. Il s'est trouvé que les circonstances m'ont emmenée à Berlin. Je pense que la recherche scientifique a besoin d'être soutenue par le gouvernement, par tous les fonds publics et privés.
Ça ne l'est pas assez en France ?
Emmanuelle Charpentier : Ça ne l'est pas assez dans le monde entier, mais ça ne l'est pas assez en France. Je pense que c'est un petit peu en France, mais aussi en Allemagne et ailleurs. Les scientifiques sont un peu débordés par des fonctions ou des demandes administratives et managériales qui prennent beaucoup de temps par rapport à la science. La science, c'est long, c'est un travail ardu. Ce n'est pas en donnant de l'argent qui permet de payer un étudiant en thèse pour trois ans qu'on peut vraiment avoir une vision de la recherche et faire de la recherche solide. Et ça, ça ne doit pas être oublié.
Qu'est-ce que ça fait d'être dans la lignée de Marie Curie ?
Emmanuelle Charpentier : Je ne sais pas, Marie Curie a eu deux prix Nobel [en 1903 et 1911]. Donc le challenge, c'est un deuxième... ou pas.
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