Témoignages "On a perdu tout espoir" : en Cisjordanie occupée, les détentions administratives se multiplient

Il reste au moins 3 5000 prisonniers administratifs palestiniens, détenus dans des conditions difficiles.

Article rédigé par franceinfo
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La ville de Ramallah en Cisjordanie occupée, le 9 octobre 2025. (ZAIN JAAFAR / AFP)
La ville de Ramallah en Cisjordanie occupée, le 9 octobre 2025. (ZAIN JAAFAR / AFP)

Depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu à Gaza le 13 octobre, près de 200 personnes ont été arrêtées en Cisjordanie occupée. La plupart, sans qu'aucune charge ne soit retenue contre elles : c'est le principe de la détention administrative. Une pratique héritée du mandat britannique et qui permet à l'armée israélienne de prolonger ces détentions sans limite de temps depuis le 7 octobre 2023. Deux ex-prisonniers ont témoigné sous couvert d'anonymat de cette expérience.

Une véritable torture psychologique. C'est le souvenir que ce jeune palestinien, libéré mi-octobre gardera de sa détention : "On en vient à espérer mourir. La vie en prison devient une forme de mort tellement on a perdu tout espoir", témoigne le jeune homme.

En l'absence de charges et sans prise sur leur libération, les détenus vivent dans l'inconnu. Cette pratique irait à l'encontre du droit international, selon cette avocate de l'ONG palestinienne Addameer : "C'est un crime de guerre, il n'y a aucune procédure légale. L'avocat ne peut pas défendre le prisonnier puisqu'il ne sait rien à son sujet, il n'y a pas de charge", expose la juriste.

Deux fois plus de détention depuis le 7-Octobre

Un dispositif auquel l'armée israélienne a eu de plus en plus recours depuis le déclenchement de son offensive à Gaza : "Avant le 7-Octobre, il y avait environ 1 200 Palestiniens en détention administrative. À l'époque déjà, c'était considéré comme un chiffre très élevé. Aujourd'hui, on parle d'environ 3 500 Palestiniens détenus sous ce régime", chiffre l'avocate de l'ONG. "Ils imposent des mesures punitives contre des civils."

Libéré en avril, cet autre Palestinien a déjà été emprisonné trois fois, sans jamais savoir ce qu'on lui reprochait : "À chaque fois que je suis placé en détention administrative, je demande toujours au juge 'De quoi m'accuse-t-on ? Pourquoi suis-je en prison ?' Et il se contente de me répondre : 'Nous avons des informations secrètes, nous ne pouvons pas vous les révéler.' Et à cause de cela, tu restes enfermé."

En Cisjordanie occupée, sous administration militaire israélienne depuis 1967, ce ne sont pas des tribunaux civils qui jugent et prolongent ces détentions, mais des cours militaires.

"Tu restes une demi-heure allongé par terre, quelqu’un est debout sur toi, te piétinant, te frappant avec ses armes et t’insultant."

Ancien prisonnier palestinien

à franceinfo

Cet homme aura passé, cette fois-ci, dix-huit mois en prison, où la violence est quotidienne. Il en est sorti amaigri de quarante kilos : "On leur demandait : 'Pourquoi vous nous frappez comme ça ?' C'était juste pour le plaisir, comme ils disent, selon leur humeur. Ils frappaient sans aucune raison", se souvient douloureusement l'ancien prisonnier. "Même le Croissant-Rouge n'avait pas le droit de nous rendre visite. Nous étions complètement coupés du monde extérieur", témoigne le Palestinien. Sur les 3 500 prisonniers palestiniens placés en détention administrative, une centaine sont des enfants.

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