Migrants: "Les États européens se renvoient la balle et cette balle, ce sont des êtres humains"
François Gemenne, spécialiste des flux migratoires et notamment chercheur à Sciences-Po Paris, a expliqué, mercredi sur franceinfo, que sans "solution pérenne" à l'échelle nationale et européenne, "de nouveaux camps se reconstitueront".
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Un total de 1 016 migrants ont été évacués, dans la matinée du mercredi 30 mai, lors d'une opération de mise à l'abri sur le campement du "Millénaire", à Paris. Ils ont été transportés dans une vingtaine de bus vers 24 centres d'accueil à Paris et en Île-de-France, le temps de mettre en place le dispositif administratif des demandes d'asile.
"Il est certain que sans solutions pérennes au niveau national et européen, de nouveaux campements se reconstitueront", affirme François Gemenne, spécialiste des flux migratoires et chercheur à l'université de Liège et à Sciences-Po Paris, mercredi, sur franceinfo.
franceinfo : Comment expliquer que ces migrants en provenance du Soudan, de Somalie et d'Erythrée se soient retrouvés dans ce campement à Paris, porte de la Villette ?
François Gemenne : Tout d'abord, les migrants ont naturellement tendance à se regrouper en fonction de leurs affinités et de leurs origines géographiques. C'est pour cette raison que dans ce campement de la Villette se trouvaient principalement des migrants originaires de la Corne de l'Afrique, alors qu'à d'autres endroits de Paris se trouvent des migrants venus d'Afghanistan, par exemple. Ils développent des réseaux d'entraide et la Corne de l'Afrique est l'une des principales régions d'origine des migrants, car c'est une région traversée à la fois par des régimes d'oppression et dictatoriaux, des crises violentes, des famines et des crises humanitaires. Paris se trouve en effet sur leur route, tant pour ceux qui souhaitent la poursuivre jusqu'en Angleterre que pour ceux qui demanderont asile en France.
Peut-on dire que davantage de personnes se retrouvent à Paris parce qu'il est plus compliqué d'attendre à Calais un passage vers l'Angleterre ?
Compte tenu de la manière dont l'État gère la situation à Calais, c'est-à-dire en ne fournissant pas de conditions de vie décentes et minimales, il est certain qu'une partie préfère attendre à Paris, où la mairie avait malgré tout mis en place quelques facilités, notamment de l'eau, des douches, des distributions de repas, en attendant l'opportunité de partir en Angleterre. Cependant, une partie d'entre eux souhaite rester en France et une partie de ceux qui étaient dans ce camp sont en attente d'une réponse de la part de l'Ofpra.
Une fois les campements du canal Saint-Martin et de la porte de la Chapelle évacués à leur tour, à Paris, cela signifie que de nouveaux camps se reformeront ?
Il est certain que sans solution pérenne, et notamment sans révision des accords du Touquet avec le Royaume-Uni, les migrants en attente de franchir la frontière avec le Royaume-Uni reconstitueront de nouveaux camps. Il faut également une solution durable au niveau européen, car une partie de ces migrants sont ce que l'on appelle des "Dublinés", des individus ayant déjà déposé une demande d'asile dans un autre pays européen, qui se sont fait refuser ou sont encore en attente d'une réponse, et où ils devraient normalement être renvoyés. Il s'agit d'une partie de ping-pong permanente dont les migrants sont victimes, entre les pays européens ainsi qu'entre la mairie de Paris et le ministère de l'Intérieur. Heureusement, l'une d'entre elles s'est terminée avec la mise à l'abri [mercredi matin] des migrants de La Villette, mais il en reste beaucoup d'autres à Paris et ailleurs en France, qui sont les victimes d'une fuite en avant en termes de prise de responsabilité. Le dispositif mis en place pour les demandeurs d'asile à la suite de l'évacuation est assez mal adapté. D'abord à cause du manque d'harmonisation européenne, les critères d'octroi du statut de réfugiés et les conditions d'accueil et d'hébergement étant très différents entre les pays de l'Union européenne. Aujourd'hui, le système de Dublin ne fonctionne pas car les États européens se renvoient la balle, et cette balle ce sont des êtres humains, des migrants.
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