Bateau de migrants lacéré par des gendarmes dans le Pas-de-Calais : "Une pratique inhumaine", déplore l’association Osmose 62

Des gendarmes français ont crevé à l'aide de cutters un canot pneumatique mis à l'eau avec des migrants à bord, au large de Saint-Étienne-au-Mont, dans le Pas-de-Calais, vendredi.

Article rédigé par franceinfo
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Un gendarme français face à un bateau transportant des exilés, à la plage d'Equihen, dans le Pas-de-Calais, le 30 juin 2025. (photo d'illustration) (SAMEER AL-DOUMY / AFP)
Un gendarme français face à un bateau transportant des exilés, à la plage d'Equihen, dans le Pas-de-Calais, le 30 juin 2025. (photo d'illustration) (SAMEER AL-DOUMY / AFP)

Le bateau de migrants qui a été lacéré, vendredi 4 juillet, par des gendarmes près de la plage de Saint-Étienne-au-Mont, dans le Pas-de-Calais, est une "pratique inhumaine", déplore Dany Patoux, présidente fondatrice de l’association Osmose 62, qui vient en aide aux migrants, sur franceinfo samedi. La BBC a diffusé des images où l'on voit des membres des forces de l'ordre françaises débarquer sur la plage, atteindre le bateau situé dans une eau peu profonde, et percer avec un cutter les boudins du pneumatique pour empêcher que ses passagers ne prennent la mer afin de traverser la Manche et rejoindre l'Angleterre.

Le gouvernement britannique s'est félicité vendredi d'un "durcissement" dans les pratiques des forces de l'ordre françaises pour intercepter les migrants. "Nous voyons de nouvelles tactiques utilisées pour perturber ces bateaux avant qu'ils ne commencent leur voyage", a ajouté le porte-parole du gouvernement britannique.

"Absurde"

La pratique est "absurde, elle ne mène à rien", critique Dany Patoux, dénonçant au passage "les années de répression qui ne font qu'augmenter et qui provoquent des morts supplémentaires dans la Manche". Le droit international de la mer stipule qu'une fois qu'une embarcation navigue, les autorités ne doivent faire que du sauvetage et ne sont pas supposées intervenir pour intercepter les migrants, afin d'éviter des noyades.

"Les personnes situées à l'eau à l'arrière du small boat couraient un danger immédiat", ce qui a conduit les gendarmes à intervenir afin d'éviter une "prise de risque aux passagers d'un esquif d'évidence très fragile", a expliqué de son côté la préfecture des Hauts-de-France.

"Le tissu juridique est volontairement brouillé pour que les forces de l'ordre puissent avoir plus de droits", analyse Dany Patoux. "Sur les côtes, on sait que c'est le droit maritime qui prime, on ne peut pas disperser les bateaux et poursuivre les exilés qui sont déjà en mer. Et là, on aborde un changement avec la pression des forces britanniques et du gouvernement français, avec Monsieur Retailleau [ministre de l'Intérieur] qui change de cap, semble-t-il." Le Royaume-Uni souhaiterait que la France modifie la "doctrine" d'intervention des policiers et des gendarmes en mer afin d'intercepter les embarcations jusqu'à 300 mètres des côtes.

"Des scènes de guerre"

La présidente fondatrice de l’association Osmose 62 reconnaît que percer les boudins d'un pneumatique fragile pour l'empêcher de traverser la Manche peut sauver des vies, mais elle ne pense pas que ce type de pratiques des forces de l'ordre décourage les passeurs qui organisent ce type d'expéditions. "Sur l'année 2025, 89 personnes ont perdu la vie, poursuivies par les forces de l'ordre. Il faut assister ici à un départ en direct pour voir quelle violence, quelle tension il y a. C'est inhumain. Ce sont vraiment des scènes de guerre qui se passent ici sur le littoral quand les forces de l'ordre poursuivent les exilés jusqu'à l'eau", dénonce-t-elle.

Emmanuel Macron est attendu mardi au Royaume-Uni pour une visite d'État jusqu'à jeudi. Il prononcera un discours au Parlement britannique et une série d'annonces sur la défense ou l'immigration.

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