Livraison de chars européens à l'Ukraine : "Le problème, c'est le volume. Si on donne une centaine de blindés, ça ne suffira pas", explique un ancien colonel français
Plusieurs pays européens ont annoncé livrer des chars à l'Ukraine. Pour Peer de Jong, un spécialiste en géopolitique et ancien colonel, ces livraisons devront être plus rapides et plus nombreuses pour soutenir Kiev.
Le Royaume-Uni annonce ce samedi qu'il va livrer des chars d'assaut Challenger 2 à l'Ukraine, devenant ainsi le premier pays à fournir des chars lourds de facture occidentale à Kiev. Une décision contestée par la Russie qui n'a pas tardé à réagir. D'autres pays européens annoncent également qu'ils seraient prêts à envoyer des chars Leopard à l'Ukraine.
Pour Peer de Jong, vice-président de l'institut de formation Themiis, spécialiste de géopolitique et ancien colonel des troupes marines, ces annonces sont une bonne nouvelle pour Kiev mais ne régleront pas tout puisque plusieurs problèmes se posent notamment concernant "le volume" ou encore le "délai".
franceinfo : Pourquoi la Russie veut-elle conquérir la petite ville de Soledar ? Est-ce si important pour Moscou et si oui pourquoi ?
Peer de Jong : Soledar n'a quasiment aucune importance tactique ni stratégique. Bakhmout qui est plus au sud ou Kramatorsk sont plus importantes parce que ce sont des nœuds routiers et ferroviaires. Le problème de Soledar c'est qu'elle est sur la route de Kiev et Karkhiv, c'est donc une première étape dans l'itinéraire potentiel qui mènerait les forces russes en direction de la capitale ukrainienne. Le deuxième point important, c'est que la bataille de Soledar - comme toutes les batailles qui ont lieu actuellement dans le Donbass - fixe une partie des effectifs de l'armée ukrainienne dans cette partie du pays et donc ça l'empêche de mener des opérations offensives ailleurs. Étant donc en défensive, les Ukrainiens perdent leur initiative.
Sur le plan de l'armement, la Grande-Bretagne va fournir à l'Ukraine des chars Challenger 2, plusieurs pays européens seraient prêts à envoyer des chars Leopard, est-on en train de changer de le rapport de force de cette guerre ?
Ces armes sont de l'armement lourd, des blindés lourds : 50 tonnes, 60 tonnes. Ce sont des engins considérables et performants qui servent à percer des lignes, des tranchées. Le problème, c'est le volume. Si on donne une centaine de blindés, ça ne suffira pas. Il en faut des centaines, avec quelques dizaines on ne change pas le rapport de force. Autre problème, le délai. Pour déplacer ce genre de véhicules qui pèsent donc plusieurs tonnes, il faut des moyens logistiques extrêmement importants. Ils n'arriveront donc sur le front que dans un, deux ou trois mois. On est donc sur un modèle très pénalisant pour les Ukrainiens qui peuvent défendre mais pas mener d'opérations offensives en direction des Russes. Enfin, dernier problème, cette fois logistique, avec le fait d'avoir des engins différents les uns des autres, des calibres de canons différents, des provenances différentes... C'est donc extrêmement difficile à soutenir.
La France doit-elle livrer à l'Ukraine plusieurs de ses chars Leclerc ?
L'effort de l'OTAN, de la France et de l'ensemble des partenaires européens doit continuer et être important. La question se pose donc sur nos chars Leclerc. Le problème, c'est que l'armée française - comme les armées européennes - est sur des modèles restreints. Depuis 1990 et la chute des budgets de la défense, il ne reste à la France que 222 de ces chars contre 1 500 chars lourds il y a 20 ans ou 30 ans. Deux cents chars Leclerc, ce n'est pas grand-chose. On peut donc se demander s'il faut donner notre force vive ou pas. Le second point, c'est que la Russie a un avantage puisqu'elle a la profondeur stratégique : géographique, humaine et industrielle. Ça, c'est ce que n'a pas l'Ukraine et la seule manière de compenser ce déficit stratégique ukrainien c'est de mettre en place du matériel performant et lourd. On est donc pris dans un engrenage qui nous oblige à donner à l'Ukraine de plus en plus de matériels pour que le pays puisse résister.
À regarder
-
Avion low cost : payer pour incliner son siège
-
Cédric Jubillar : ses défenseurs passent à l'attaque
-
Salomé Zourabichvili : "La Russie utilise la Géorgie comme test"
-
Se faire recruter dans l’armée par tirage au sort ?
-
La détresse de Cécile Kohler et Jacques Paris, otages en Iran
-
Le fléau des courses-poursuites à Los Angeles
-
Bac sans calculette : les conseils de Lucas Maths
-
Menace des drones : la France déploie ses armes
-
Un couple sauvé des eaux au Mexique
-
Ces méthodes spectaculaires contre les courses-poursuites
-
Opération anti-drogue : 400 policiers mobilisés à Grenoble
-
En Turquie, une femme sauvée in extremis devant un tramway
-
14 milliards d'impôts en plus, qui va payer ?
-
Gaza : comment désarmer le Hamas ?
-
Menace sur les réseaux : 100 000 euros pour t*er un juge
-
Cédric Jubillar : 30 ans requis contre l'accusé
-
Impôts, retraites, que prévoit le budget 2026 ?
-
Rihanna, reine des streams sans rien faire
-
Que changera la suspension de la réforme des retraites si elle est votée ?
-
Salaire : êtes-vous prêts à jouer la transparence ?
-
Ici, des collégiens dorment à la rue
-
Nouvelle éruption d'un volcan dans l'est de l'Indonésie
-
Cœur artificiel : l'angoisse des greffés Carmat
-
Pourquoi le vote du budget peut te concerner
-
Le nouveau ministre du Travail rouvre les débats sur les retraites
-
Laurent Nuñez, nouveau ministère de l'Intérieur, se confie sur les attentats de 2015
-
Adèle Exarchopoulos : "Quand le monde se résigne à banaliser la violence... Ce qui reste, c'est le collectif"
-
Un mois après sa mort, le message de Charlie Kirk résonne encore
-
Le rappeur SCH déclare sa flamme à Marcel Pagnol dans un film d'animation consacré au célèbre cinéaste
-
Plan de paix pour Gaza : quatre nouveaux corps d'otages ont été remis à Israël
Commentaires
Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.
Déjà un compte ? Se connecter