Serge Atlaoui, dix ans de procédures et une vie en suspens
La Cour administrative de Jakarta entend, mercredi, un nouvel expert dans le cadre d'un recours déposé par le Français, condamné à mort. Francetv info revient sur l'histoire de cet ouvrier-soudeur détenu depuis 2005 en Indonésie.
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L'ultime recours de Serge Atlaoui, condamné à mort pour trafic de drogue, a été rejeté par la justice indonésienne, lundi 22 juin. Le parquet a déclaré que ce recours en grâce était bien la dernière voie de recours à disposition du Français, même si aucune date n'a encore été fixée pour son exécution. Mais son avocat a promis de chercher quand même de nouvelles voies de recours. Retour sur cette affaire complexe, qui a débuté il y a dix ans.
Mi-2005 : le départ pour l'Indonésie
Lorsqu'en 2005, Serge Atlaoui décide d'accepter en Indonésie un travail bien payé, mais non déclaré, il est dans une passe financière difficile. Il a "quelques dettes à régler et de gros besoins", explique 20 Minutes. "Déjà père de trois enfants, Serge Atlaoui attend avec son épouse un quatrième enfant. Elle est femme de chambre. Lui enchaîne les chantiers de fonderie à tours de bras", y compris à l'étranger.
En juin 2007, depuis sa cellule, Serge Atlaoui explique à Paris Match comment s'est décidé son départ. "Je vivotais aux Pays-Bas pour une moyenne de 1 600 euros par mois. A peine de quoi payer un logement et assurer le quotidien de ma compagne et de mes enfants. Un jour, un ami néerlandais me propose de me mettre en contact avec un employeur en Indonésie. Pour 2 000 euros la semaine, je suis chargé d'installer des machines à distiller pour une fabrique d'acrylique."
Automne 2005 : un chantier trop bien payé
La paie est généreuse. Un peu trop ? En novembre 2005, Serge Atlaoui est arrêté lors d'un raid des forces spéciales et découvre alors, explique-t-il, que le chantier abritait un laboratoire clandestin de production d'ecstasy.
Il a tout de même eu quelques doutes lors de cette seconde mission, pour des travaux de maintenance, dans cette "usine" située près de Jakarta. Car l'endroit a changé depuis son premier séjour. Le Français, selon Paris Match, "remarque une porte dérobée qui camoufle un local de parfait chimiste". Il "risque quelques questions". On lui assure "qu'il ne s'agit que d'un laboratoire pour tester du MDMA, le composant d'un stupéfiant : l'ecstasy. Et Serge est un homme simple, la réponse lui suffit."
Sa femme, Sabine, assure à France 2 "qu'il ne savait pas ce qu'il se passait réellement lorsqu'il est arrivé. C'est en étant sur place qu'il a appris les activités illégales et il a voulu partir. Sauf qu'il n'avait pas d'argent. Il n'avait pas de billet d'avion."
2007 : Serge Atlaoui est condamné à mort
La justice indonésienne se met en marche. Serge Atlaoui est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité "au terme d’un premier procès – durant lequel il n'a pas le droit à un interprète, ne pouvant s'exprimer que dans un mauvais anglais", expose L'Obs. "Le Français fait appel et voit finalement sa peine requalifiée en peine de mort à l’issue de trois procès fleuves", en 2007.
Car Jakarta entend faire des exemples avec les Occidentaux qui se livrent au trafic de drogue. Pendant huit ans, sur fond de relative indifférence médiatique en France, les différentes procédures d'appel échouent, les unes après les autres.
Serge Atlaoui passe de cellule en cellule : il est d'abord enfermé à Tangerang, "à trois dans des cellules de 6 m2, c'était pire que l'enfer", explique-t-il à Paris Match, puis à Jakarta, et enfin dans l'île prison de Nusakambangan.
La mobilisation médiatique, elle, reste faible jusqu'à ce que, début 2015, l'exécution paraisse imminente. Des manifestations de soutien ont ainsi lieu le 24 mars, à l'appel de l'association Ensemble contre la peine de mort.
Début 2015 : exécutions en série en Indonésie
Depuis 2014, les procédures juridiques en Indonésie s'inscrivent dans un nouveau contexte : celui de l'accession à la présidence, en juillet, de Joko Widodo. Perçu à l'étranger comme un défenseur des droits de l'homme, ce chef d'Etat défend néanmoins la peine de mort pour les trafiquants de drogue, essentiellement à des fins intérieures, selon Le Monde (article payant).
Une rupture avec la période précédente : "Si Serge Atlaoui n'a pas été fusillé plus tôt, il le devait jusqu'ici à une forme de moratoire, note L'Obs. De fait, entre 2008 et 2012, aucune exécution n'a eu lieu en Indonésie."
En 2015, alors que le président indonésien a rejeté la demande de grâce de Serge Atlaoui, le calendrier s'accélère. Le 18 janvier 2015, six condamnés, parmi lesquels cinq étrangers, sont fusillés. C'est une première depuis 2013.
Printemps 2015 : le sort du Français ne tient qu'à un fil
Fin janvier, le président de la République, François Hollande, écrit à Joko Widodo pour lui demander de surseoir à l'exécution du Français, indique France 3 Lorraine. Le 17 février, l'ambassadeur d'Indonésie en France est convoqué par le gouvernement. En vain.
Le mardi 28 avril, malgré les pressions internationales, huit condamnés à mort pour trafic de drogue, parmi lesquels sept étrangers (deux Australiens, un Brésilien, quatre Nigérians), sont fusillés sur l'île-prison de Nusakambangan, où est détenu Serge Atlaoui. Le Français, lui, obtient au dernier moment un sursis. Ses proches suivent de près les ultimes procédures. "Ils sont inquiets. La situation est préoccupante, explique l'avocat de Serge Atlaoui, Richard Sédillot. C'est évidemment très difficile." Mais la famille de Serge Atlaoui veut garder espoir, d'autant que la procédure du recours pourrait être longue.
Été 2015 : ultime recours rejeté
Le 22 juin, le dernier recours du Français est écarté par la justice indonésienne. Cette décision était très attendue, dans la mesure où des recours semblables introduits par d'autres condamnés à mort en Indonésie ont été rejetés par le passé par la cour administrative de Jakarta, qui s'était déclarée incompétente. L'avocat de Serge Atlaoui affirme qu'il va chercher de nouveaux recours même le parquet indique qu'il s'agit bien de l'ultime recours à disposition.
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