Séisme dévastateur en Afghanistan : ce que l'on sait de la catastrophe qui a déjà fait plus de 2 200 morts dans l'est du pays
Le tremblement de terre, survenu dans la nuit de dimanche à lundi dans des zones montagneuses, pourrait avoir touché "des centaines de milliers de personnes", selon l'ONU.
/2023/07/06/64a68815cd1a7_placeholder-36b69ec8.png)
/2025/09/02/000-734e8lx-68b6d42530481458496612.jpg)
Une course contre-la-montre. Les opérations de secours se poursuivent après le puissant séisme et ses violentes répliques qui ont frappé l'est de l'Afghanistan dans la nuit du dimanche 31 août au lundi 1er septembre. Le tremblement de terre a fait plus de 2 200 morts et au moins 3 600 blessés, selon un nouveau bilan du gouvernement taliban, jeudi.
Plusieurs pays et institutions ont déjà assuré de leur soutien logistique, humanitaire et financier, alors que l'aide internationale s'est drastiquement réduite, ces derniers mois, dans ce pays contrôlé par les talibans. Franceinfo fait le point sur ce que l'on sait de cette catastrophe dont le bilan officiel est loin d'être définitif.
Un bilan déjà très lourd et des centaines de milliers de personnes potentiellement "touchées"
Le tremblement de terre de magnitude 6, suivi de plusieurs fortes répliques, a dévasté plusieurs provinces afghanes montagneuses (Nangarhar, Kounar et Laghman), frontalières du Pakistan, au cœur de la nuit de dimanche à lundi. L'épicentre du tremblement de terre a été localisé à 27 km à l'est de la ville Jalalabad, à seulement huit kilomètres de profondeur, ce qui explique le lourd bilan et l'étendue des dégâts.
La quasi-totalité des morts ont été recensées dans la province de Kounar, a précisé Mohammed Hamad, porte-parole de l'Autorité de gestion des catastrophes, tandis que la province voisine de Nangarhar compte une dizaine de morts. Selon le nouveau bilan donné jeudi par le porte-parole adjoint du gouvernement, Hamdullah Fitrat, 2 205 personnes sont mortes et 3 640 ont été blessées dans la seule province de Kounar.
Un bilan déjà très lourd et qui pourrait fortement s'alourdir. Selon le coordinateur de l'action humanitaire de l'ONU en Afghanistan, Indrika Ratwatte, le séisme pourrait avoir affecté "des centaines de milliers de personnes". S'exprimant depuis Kaboul, la capitale du pays, il a expliqué que son estimation se basait sur "les chiffres des précédents tremblements de terre dans cette région". "Il ne fait aucun doute que le bilan va augmenter à un rythme exponentiel. Le plus grand défi est d'atteindre ces zones reculées alors que l'accès routier est extrêmement endommagé."
En 2023, un séisme à Hérat, dans l'ouest du pays, avait détruit 63 000 habitations et fait 1 500 morts, le bilan le plus meurtrier depuis ving-cinq ans alors que l'Afghanistan est fréquemment frappé par des tremblements de terre, en particulier dans la chaîne montagneuse de l'Hindou Kouch, près de la jonction des plaques tectoniques eurasienne et indienne. Depuis 1900, le nord-est de ce pays a connu 12 séismes d'une magnitude supérieure à 7, selon Brian Baptie, sismologue au British Geological Survey.
Les secours cherchent encore des victimes
Des hélicoptères militaires ont poursuivu leur ballet mardi vers les zones sinistrées, acheminant de l'aide et évacuant morts et blessés. Ehsanullah Ehsan, chef de l'Autorité de gestion des catastrophes de la province de Kounar, a assuré mardi que "les opérations ont continué toute la nuit". "Grâce à la mobilisation de nos employés et d'habitants venus des districts aux alentours, les recherches n'ont pas cessé", a-t-il expliqué à l'AFP, alors que les secours peinent encore à approcher certains villages coupés du monde par des glissements de terrain. "La priorité est d'aider les blessés, puis nous distribuerons des tentes et des repas chauds aux sans-abris", a ajouté ce responsable.
Rahmatullah Khaksar, directeur des urgences d'un hôpital de Jalalabad, chef-lieu de la province de Nangarhar, assure avoir reçu 600 blessés depuis dimanche soir. "La plupart des patients sont traités en traumatologie, blessés à la tête, au dos, à l'abdomen et aux jambes, a-t-il déclaré à l'AFP. Pour ceux qui sont sans proches, nous avons mis à disposition une partie de l'hôpital pour qu'ils y restent jusqu'à ce qu'ils retrouvent leurs familles".
Depuis plus de 36 heures, des dizaines d'habitants des villages de Wadir et de Mazar Dara, sur les coteaux verdoyants de Kounar, déblayent à la pelle ou à la main ce qu'il reste des maisons écroulées. Partout, après des prières funéraires, des rangées de corps, parfois d'enfants, enveloppés dans un linceul blanc conformément au rite musulman, sont mis en terre.
Une catastrophe qui arrive "au pire moment", alors que l'aide étrangère s'est réduite
Déjà frappé par des séismes meurtriers en 2022 et 2023, l'Afghanistan doit cette fois se relever d'un tremblement de terre dévastateur avec un budget réduit. Les aides étrangères ont fondu depuis le début de l'année, dans un pays contrôlé par les talibans. "Nous fournissons les services de base (...) mais la réinsertion des survivants et la reconstruction ne peuvent pas être pris en charge par l'Emirat islamique seul", affirme Atiqullah Azizi, un haut responsable du ministère de l'Information et de la Culture taliban, appelant la communauté internationale à aider le régime.
Les agences des Nations unies ont toutes lancé des campagnes d'appel au don et un montant initial de cinq millions de dollars a été débloqué du fonds mondial d'intervention d'urgence de l'ONU. Le Royaume-Uni, de son côté, a débloqué un million de livres pour soutenir les familles touchées. L'Union européenne a quant à elle annoncé, mardi dans un communiqué, l'envoi dès cette semaine de 130 tonnes d'aide humanitaire. L'UE a également prévu de débloquer un million d'euros d'aide d'urgence en faveur des organismes internationaux déjà présents sur place.
Le séisme intervient "au pire moment", déplore Rahmat Nabi Shirzad, chargé de la communication de l'ONG britannique Islamic Relief en Afghanistan. "A cause des coupes (budgétaires), l'aide apportée aux habitants de la province de Kounar est insuffisante", surtout en termes de structures de santé, explique-t-il à l'AFP. "Les rescapés font face à des cliniques surchargées, de longues attentes et une pénurie grave de médecins et de médicaments, pile au moment où les soins d'urgence et de traumatologie sont les plus pressants", abonde Indrika Ratwatte, coordinateur humanitaire de l'ONU dans le pays.
L'Afghanistan, dont les autorités talibanes ne sont reconnues que par Moscou, est l'un des pays les plus pauvres du globe. Depuis le début de l'année, le secteur humanitaire ne cesse d'appeler à l'aide dans le pays, touché par une sécheresse accrue et le retour par millions de migrants chassés des pays voisins. Principaux donateurs de l'Afghanistan, les Etats-Unis, qui ont déboursé 3,71 milliards de dollars depuis le retour des talibans au pouvoir en 2021, ont sabré cette aide en janvier, plongeant l'ensemble du secteur humanitaire dans une grave crise budgétaire. Les Nations unies ont aussi réduit drastiquement leur aide en juin face "aux pires coupes financières" des pays donateurs, généralement frileux à l'idée d'aider le régime des talibans.
Commentaires
Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.
Déjà un compte ? Se connecter