Reportage "Si on régule d'un loup ou deux, ce ne sera pas un drame écologique" : dans la Manche, des éleveurs espèrent un assouplissement des règles pour abattre l'animal

Le déclassement du statut de protection du loup, qui passe d'espèce "strictement protégée" à "protégée", va être entériné jeudi par le Parlement européen. Il peut ainsi mener à un allègement des règles de tir sur l'animal.

Article rédigé par franceinfo
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Illustration d'un loup gris dans la forêt. (ALLILI MOURAD / MAXPPP)
Illustration d'un loup gris dans la forêt. (ALLILI MOURAD / MAXPPP)

C’est un débat inflammable qui oppose deux camps irréconciliables. Le Parlement européen va entériner jeudi 8 mai la baisse du statut de protection du loup. L’espèce doit passer de "strictement protégée" à "protégée", ce qui ouvre la voie vers des règles plus souples pour abattre l’animal. Le loup, qui progresse chaque année en France avec désormais plus d’un millier d’individus, ne se concentre plus dans le sud-est. Il fait même des incursions jusqu’en Normandie au grand désespoir des éleveurs.

Dans la Manche, à Céaux dans la baie du Mont Saint-Michel, Raphaël Morin élève des moutons et des agneaux en plein cœur des prés-salés. C'est là qu'il a aperçu un loup en janvier dernier : "C'était de la sidération. Je me suis demandé ce qu'il faisait là. J'ai pu le suivre en voiture et à pied pendant une quinzaine de minutes et à la fin, j'étais convaincu que c'était un loup". Sept de ses bêtes ont été tuées. Aujourd'hui, l'éleveur est encore très marqué. "Juste après, on se sent très mal, vraiment très très mal", reconnaît-il. 

"J'ai fait des veilles de nuit pendant trois semaines. C'était du stress, de l'épuisement et puis, un sentiment de solitude". 

Raphaël Morin, éleveur de moutons

à franceinfo

Depuis, l’Office français de la biodiversité a confirmé qu’un loup rôdait probablement cet hiver dans le Sud-Manche, ce qui ouvre la voie à des aides pour protéger les troupeaux sauf que dans ce département, les élevages sont très vulnérables. Il n'est pas simple d'encadrer les immenses prés-salés et des centaines de moutons. 

"Parce que ça pose une question sur mon métier, indique Raphaël Morin, sur ma manière de l'exercer, c'est-à-dire des moutons qui pâturent à l'extérieur sans avoir à les parquer. Ce sont des zones qui sont recouvertes par la mer où il peut être difficile de mettre en place certains moyens de contension ou clôtures parce que la mer détruit facilement ces ouvrages. Et puis, on est dans un secteur où il y a beaucoup de tourisme. Si on a des chiens de protection chez nous, ce serait un carnage. Je n'ai pas envie d'assumer les attaques de mes chiens sur des touristes". 

"Il n'est pas question de dire qu'il faut éradiquer le loup, c'est simplement pouvoir protéger les troupeaux en cas d'attaque".

Jean-Michel Hamel, président de la FDSEA de la Manche

à franceinfo

Les éleveurs attendent donc beaucoup de l’abaissement du statut de protection du loup pour alléger les règles de tir. Jean-Michel Hamel, président de la FDSEA de la Manche "espère un assouplissement des règles de façon à ce que les producteurs puissent défendre leurs troupeaux et si ça doit passer par du tir, et bien ça passera par du tir. Si on régule d'un loup ou deux chez nous, ce ne sera pas un drame écologique". Les associations de défense de l’environnement dénoncent cela. Elles s’inquiètent d’une révision à la hausse du quota de chasse annuel fixé aujourd’hui à 20% de la population nationale de loup.

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