Procès de l'attentat de la basilique de Nice : cinq choses à savoir sur le parcours de l'accusé, Brahim Aouissaoui, qui assure avoir tout oublié
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Ce Tunisien de 25 ans est jugé à partir de lundi pour l'assassinat de trois personnes en octobre 2020. "Son amnésie ne résistera pas à l'oralité des débats", espère Philippe Soussi, avocat de l'Association française des victimes du terrorisme.
Va-t-il recouvrer la mémoire pendant le procès ? Le Tunisien Brahim Aouissaoui est jugé à partir du lundi 10 février par la cour d'assises spéciale de Paris pour l'attentat de la basilique de Nice. Il est accusé d'avoir tué à l'aide d'un couteau, le 29 octobre 2020, Nadine Devillers, une fidèle de 60 ans, Simone Barreto Silva, une mère de famille franco-brésilienne de 44 ans, et le sacristain Vincent Loquès, 55 ans, père de deux filles.
Grièvement blessé par les forces de l'ordre, Brahim Aouissaoui s'est rétabli à l'hôpital. Il prétend, depuis, ne se souvenir de rien. Il comparaît pour "assassinats et tentatives d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste". Le procès doit durer jusqu'au 26 février. Franceinfo revient sur le parcours de l'homme de 25 ans.
Un vendeur d'essence en Tunisie radicalisé
Né le 29 mars 1999 à Jhina, en Tunisie, Brahim Aouissaoui est le cinquième enfant d'une fratrie de six. Selon sa famille, interrogée par les enquêteurs, il est placé en centre de rééducation pour mineurs en 2015 ou 2016 après avoir commis une agression au couteau sous l'effet de stupéfiants et d'alcool. Après une scolarité limitée, il enchaîne des petits boulots avant de tenir un point de vente d'essence de contrebande.
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Toujours selon ses proches, Brahim Aouissaoui change de comportement fin 2018, adoptant une pratique rigoriste de la religion et s'isolant de plus en plus dans son local à essence. Comme le mentionnent les juges dans l'ordonnance de mise en accusation, le jeune homme ne fréquente plus que des salafistes, dont certains impliqués dans des dossiers terroristes.
Un départ clandestin pour l'Italie en septembre 2020
Dans la nuit du 19 au 20 septembre 2020, Brahim Aouissaoui quitte la ville de Sfax à bord d'une embarcation avec dix autres personnes, sans prévenir sa famille. Il débarque à Lampedusa, en Italie, et est transféré à bord du navire Rhapsody Rav pour y subir une quarantaine en pleine crise du Covid-19. Il y reste confiné jusqu'au 9 octobre, avant de rejoindre Bari, puis la Sicile, où il travaille comme ouvrier agricole.
A cette période, Brahim Aouissaoui commence à envoyer à ses contacts sur Facebook des liens vers le compte de Khaled al-Rached. Ce prédicateur musulman saoudien demande la fermeture de l'ambassade du Danemark pour protester contre la publication des caricatures portant atteinte, selon lui, au prophète.
Les enquêteurs retrouvent aussi dans son téléphone une photo du terroriste tchétchène Abdoullakh Anzorov, l'assassin du professeur Samuel Paty, publiée le 22 octobre par Al-Naba, média du groupe Etat islamique, incitant les jeunes musulmans à tuer des Français par tous les moyens. Après un passage par Rome, Gênes et Vintimille, Brahim Aouissaoui arrive en gare de Nice le 27 octobre.
Il passe cinq fois devant la basilique avant l'attentat
Son séjour dans la ville des Alpes-Maritimes a pu être presque intégralement reconstitué grâce aux nombreuses caméras de surveillance installées en ville. Les enquêteurs ont ainsi pu établir que Brahim Aouissaoui était passé cinq fois devant la basilique Notre-Dame-de-l'Assomption avant l'attentat. La veille au soir, dans un message audio, il explique à un compatriote résidant en région parisienne qu'il ne peut pas se rendre à Paris, faute d'argent. Toutefois, il ajoute : "J'ai un autre programme dans ma tête. Que Dieu le facilite."
Après deux nuits dans le hall d'un immeuble de la rue d'Angleterre, Brahim Aouissaoui entre dans la basilique à 8h29 le matin du 29 octobre, armé d'un couteau de cuisine muni d'une lame de 17 cm. Selon les policiers qui l'ont interpellé dans l'édifice après l'attentat, Brahim Aouissaoui a crié "Allah Akbar" en les menaçant avec son couteau. Touché par huit balles, électrocuté par un taser, il est menotté avant d'être hospitalisé. Il est à peine 9 heures.
Même si le choix définitif de la cible semble n'avoir été arrêté que la veille des faits, les juges estiment que l'accusé préméditait une attaque depuis plusieurs semaines, pour répondre aux appels à commettre des attentats en France. C'est ce qui justifie son renvoi devant la cour d'assises pour assassinats, et non meurtres.
Une amnésie qui a duré durant toute l'instruction
Le jeune homme est mis en examen le 7 décembre 2020. Selon le médecin légiste chargé d'examiner ses blessures, afin de se prononcer sur la compatibilité de son état avec des interrogatoires et son maintien en détention, le rétablissement de Brahim Aouissaoui est spectaculaire. Il ne présente aucune blessure susceptible d’entraîner des pertes de mémoire.
L'intéressé assure pourtant avoir tout oublié, y compris le prénom de ses parents, qu'il imagine morts. Interrogé à cinq reprises pendant l'instruction, il maintient ne se souvenir ni de son départ de Tunisie ni des faits qui ont suivi. Lorsque les vidéosurveillances le filmant en Italie ou en France lui sont présentées, il soutient ne pas se reconnaître sur les images et en conclut qu'il n'est pas l'homme entré dans la basilique de Nice.
Selon l'expertise neuropsychiatrique, réalisée par Bernard Gueguen et Daniel Zagury, son amnésie est "opportuniste" relève "d'un système de défense". Les écoutes de ses conversations téléphoniques avec ses proches en détention confirment, selon l'accusation, "que sa prétendue amnésie [est] pour le moins très exagérée".
"Son amnésie ne résistera pas à l'oralité des débats", espère Philippe Soussi, avocat de l'Association française des victimes du terrorisme. "Depuis son réveil du coma, il y a maintenant plus de quatre ans, M. Aouissaoui a toujours indiqué ne pas avoir de souvenirs des actes qu'il aurait pu commettre en octobre 2020", oppose son avocat, Martin Méchin.
Un comportement inquiétant en détention
Les cinq établissements pénitentiaires qu'il a fréquentés ont tous transmis des rapports sur son comportement en détention. Les surveillants de la prison de Fresnes (Val-de-Marne) ont décrit une personnalité inquiétante, adoptant "une attitude provocatrice, exigeante et de défiance" à leur égard. Consacrant son temps à une pratique rigoriste de la religion, selon l'administration pénitentiaire, il a été transféré à plusieurs reprises en urgence, après des échanges avec d'autres détenus incarcérés pour terrorisme. Au centre pénitentiaire de Meaux (Seine-et-Marne), Brahim Aouissaoui est parvenu à convaincre tout le monde qu'il préparait un nouvel attentat, relèvent les juges d'instruction.
Pour son avocat, "après plus de quatre ans de détention à l'isolement total, la question qui va se poser à l'ouverture de l'audience sera celle de son état de santé mentale actuel, de sa capacité à comprendre les charges qui pèsent contre lui, et donc de sa capacité à pouvoir se défendre comme tout accusé a le droit de le faire". Pour les familles des victimes, ce rendez-vous judiciaire est avant tout "une étape cruciale" dans leur reconstruction psychologique. Comme il l'explique à "ici Azur", Joffrey Devillers, qui a perdu sa femme dans l'attentat, n'attend toutefois pas "grand-chose de l'accusé, malheureusement, à moins d'un miracle".
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