Au procès des attentats du 13-Novembre, le bruit et les images du massacre au Bataclan figent la salle d'audience
Au 104e jour des débats, la cour d'assises a finalement diffusé vendredi trois extraits sonores de l'attaque dans la salle de concert ainsi que des photos prises après l'assaut.
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La musique interrompue par les tirs, les cris, les corps qui tombent les uns sur les autres, le carnage et le sol maculé de sang. Depuis le début du procès des attentats du 13-Novembre, ces scènes ont été racontées des dizaines de fois à la barre par les rescapés du Bataclan. Chacun s'en était fait une représentation, un récit plus ou moins proche de la réalité. Au 104e jour des débats, la cour d'assises spéciale de Paris y a ajouté le son et l'image. Accédant à la demande de plusieurs parties civiles, elle a diffusé pendant une demi-heure, vendredi 1er avril, trois extraits sonores tirés d'un enregistrement audio retrouvé après l'attaque ainsi qu'une trentaine de photos de constatation prises après l'assaut dans la salle de concert.
Dans une salle d'audience comble pour la première fois depuis longtemps dans ce procès-fleuve, la chanson Kiss The Devil, du groupe de rock Eagles of Death Metal, résonne. ll est 21h47, ce soir-là. Les tirs commencent quelques secondes plus tard, la musique s'arrête. Des cris s'élèvent et les tirs continuent. Ils sont interminables. En rafales, saccadés, au coup par coup, ponctués par des hurlements. Leur nombre donne la mesure du massacre. Un silence fait espérer un répit, mais le bruit des Kalachnikov reprend rapidement.
"Ils vont tout faire péter"
La salle d'audience est en apnée. Au deuxième extrait sonore, on entend indistinctement la voix d'un otage hurler : "Ils ont des ceintures explosives, ils vont tout faire péter !"
Le troisième extrait sonore renvoie au moment de l'assaut de la Brigade de recherche et d'intervention (BRI), alors que des otages sont retenus par deux terroristes dans un couloir à l'étage. Il faut tendre l'oreille pour distinguer, dans le brouhaha, les voix des policiers. Une grande confusion règne. Un tir retentit, suivi de rafales, de cris, d'une explosion, de nouveaux cris, d'ordres donnés par les policiers de la BRI pour évacuer : "Allez, allez, allez !" Une femme supplie : "Mon mari, il y a mon mari." L'évacuation des victimes se poursuit dans une grande tension. "Est-ce qu'on a les otages là ? Oui, ils sont descendus !"
Aux bruits de l'enfer succèdent des images de désolation. Avant la projection des photos du carnage, quelques personnes quittent la salle. Le président de la cour d'assises, Jean-Louis Périès, commente les clichés qui défilent sur les écrans pour les parties civiles. Nous sommes maintenant devant le Bataclan, face à l'entrée principale. Les débris de verre qui jonchent le sol et un tas de manteaux laissent entrevoir le mouvement de panique. La cour progresse à l'intérieur, dans le hall, avec le vestiaire sur la droite, puis dans la salle.
"On voit de nombreux corps au sol"
Ces images n'ont rien à voir avec celles, édulcorées, qui avaient été projetées à l'automne, au début du procès. Le Bataclan avait alors été refait et les corps remplacés par des points bleus. Ils apparaissent désormais sans détours, parfois enchevêtrés. Devant le bar. A l'extrémité de la fosse. Dans la fosse. Devant la scène. La voix de Jean-Louis Périès décrit les différentes zones photographiées et répète pudiquement : "On voit de nombreux corps au sol." Pas de points bleus, mais du rouge, beaucoup de rouge. Une photo est noire, elle a été "occultée" car l’on pouvait distinguer les visages des victimes.
Les clichés pris depuis le balcon donnent le vertige. Quatre-vingt-dix personnes ont été tuées et des centaines d'autres blessées. Toujours à l'étage, l'objectif de l'appareil photo saisit "l'accès à la zone où seront retenus les otages et l'escalier où seront retrouvés les corps des terroristes". Le président parle au futur mais la cour est replongée six ans plus tôt. Les marches de l'escalier laissent entrevoir les restes du corps de Foued Mohamed Aggad, qui s'est fait exploser. Des accusés regardent, d'autres baissent la tête.
"Parfois, la violence, il faut la voir, pour avoir autre chose qu'une reconstitution imaginaire ou symbolique", avait plaidé la veille Véronique Truong, avocate de deux rescapés du Bataclan. Vendredi, comme tout procès d'assises, celui des attentats du 13-Novembre n'a pas fait l'économie de cette violence.
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