Témoignages "J'ai subi des agressions tout au long de ma carrière" : ces pompiers sortent du silence et dénoncent les violences quotidiennes

Article rédigé par Willy Moreau
Radio France
Publié Mis à jour
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Un sapeur-pompier dans le département de l'Eure, en Normandie. Photo d'illustration. (LOU BENOIST / AFP)
Un sapeur-pompier dans le département de l'Eure, en Normandie. Photo d'illustration. (LOU BENOIST / AFP)

L’agression d’un pompier à Évian-les-Bains a relancé le débat sur les violences envers les sapeurs-pompiers. Entre crachats, insultes et coups, ces professionnels de l’urgence font face à un climat tendu, parfois banalisé, même si les statistiques officielles signalent une légère baisse des agressions en 2024.

Des insultes, des crachats, des coups de poing… Les sapeurs-pompiers sont particulièrement confrontés à la violence. L'agression d'un pompier volontaire samedi 10 mai en Haute-Savoie a remis le sujet au cœur de l'actualité. Un jeune homme l'a percuté avec sa voiture près de la caserne d'Evian-les-Bains. L'homme de 39 ans est très grièvement blessé.

Un cas extrême mais symptomatique d'un quotidien difficile car quel que soit l'endroit où se trouve leur caserne, les retours de ces pompiers sont toujours plus ou moins les mêmes : "J'ai effectivement, tout au long de ma carrière, subi des agressions verbales et des dégradations"; explique un pompier.

"Quand il y a des choses qui ne leur plaisent pas ou alors parce qu'ils doivent être pris en charge par la police, et bien, ça dégénère un peu... jusqu'à une épaule démise"

Un pompier

à franceinfo

Mais la majorité des interventions se passent bien malgré tout insiste l'un d'eux. D'ailleurs, les agressions ont par exemple baissé en 2023 avec -7% selon un rapport de l'Observatoire national des violences envers les sapeurs-pompiers. "Il faut pondérer un peu à ces chiffres", indique Guillaume Desneiges, qui fait partie de cet observatoire. Il est professionnel en Essonne et membre du syndicat SNSPP-PATS.

"Ces chiffres sont basés sur le dépôt de plainte, nuance-t-il. Aujourd'hui, vous avez beaucoup de sapeurs-pompiers qui banalisent la violence à laquelle ils font face. Une agression verbale, avec des insultes, pour eux, ne mérite pas un dépôt de plainte."

"Le pompier se faisait moins insulter en face-à-face"

Les agressions ont surtout évolué au fur et à mesure des années comme l'explique ce pompier qui souhaite rester anonyme. "Avant, il y avait quasiment des embuscades, ce n'était pas rare, explique ce pompier avec 16 ans de carrière en Île-de-France. Et ça, c'est fini, en tout cas, dans mon secteur, ça c'est très rare. En revanche, c'est vrai qu'il y a quinze ou vingt ans, le pompier se faisait moins insulter en face-à-face." Dans la moitié des cas, ces agressions ont lieu sur fond d'alcool et de drogue. 

Ces pompiers souhaitent d'abord qu'il y ait une vraie prise de compte de la situation par les politiques, hors faits exceptionnels comme ce qui s'est passé le week-end dernier en Haute-Savoie. Ils réclament aussi davantage de formations pour gérer au mieux les conflits ou encore des caméras piétons comme dans les Yvelines.

Jérémy Courtel, secrétaire général adjoint de la Fédération autonome des sapeurs-pompiers avance d'autres pistes : "C'est l'anonymisation de nos dépôts de plainte. Car lorsqu'on porte plainte, quand on est agressé, c'est notre adresse, c'est notre nom de famille et notre prénom qui sont écrits lors des procès-verbaux de tribunaux. Et ce qu'on demande, nous, c'est justement d'être anonymisés dans le but de porter plainte au nom du service et non pas au nom de l'agent et que derrière l'agresseur puisse nous retrouver dans le civil." D'autres demandent des procédures judiciaires plus rapides ou encore des sanctions plus sévères et effectives.

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