Procès de Pierre Palmade : l'humoriste est condamné à cinq ans de prison, dont deux ferme, pour son accident de la route sous l'emprise de drogues

Article rédigé par Raphaël Godet
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Le comédien Pierre Palmade, le 20 novembre 2024, au tribunal correctionnel de Melun (Seine-et-Marne). (ALAIN JOCARD / AFP)
Le comédien Pierre Palmade, le 20 novembre 2024, au tribunal correctionnel de Melun (Seine-et-Marne). (ALAIN JOCARD / AFP)

Près de deux ans après avoir percuté une voiture de plein fouet en conduisant sous l'emprise de stupéfiants, le comédien de 56 ans était jugé pour "blessures involontaires" mercredi.

Pierre Palmade est fixé sur son sort. Il est un peu plus de 20h30, mercredi 20 novembre, quand le président du tribunal correctionnel de Melun (Seine-et-Marne) lui énonce sa peine. L'humoriste de 56 ans, jugé pour "blessures involontaires aggravées", est condamné à cinq ans de prison, dont deux ferme, conformément aux réquisitions du parquet. Une décision rendue deux ans après ce fameux vendredi 10 février 2023, jour où il a percuté une voiture sous l'emprise de stupéfiants, sur une route de Seine-et-Marne. A la barre, le prévenu semble impassible. "Vous serez très prochainement convoqué par le procureur de Bordeaux [où il réside désormais] qui déterminera la date et l'établissement pénitentiaire dans lequel vous exécuterez deux ans de détention", précise le magistrat, qui a assorti sa décision d'une obligation de soins et de travailler ainsi que d'une annulation du permis de conduire.

Plus tôt dans l'après-midi, l'artiste a voulu s'adresser aux victimes. Veste noire sur le dos, chemise blanche sortie d'un pantalon beige, il lâche les mains de la barre et effectue un demi-tour en direction des parties civiles. "J'aimerais vous demander pardon au plus profond de mon être, sincèrement", déclare le comédien, la voix éraillée, le teint gris.
Assise au premier rang, Mila, 27 ans au moment du drame, lui répond à sa façon. La jeune femme, qui a perdu son bébé à naître lors de l'accident, lui adresse un franc "non" de la tête. Pierre Palmade veut le redire encore et encore : "Je suis accablé, éprouvé de les voir en vrai (...) J'espère qu'un jour les victimes accepteront mon pardon. Je sais qu'un fou, qu'un drogué leur est rentré dedans. C'est inexcusable." Ce "fou" dont il parle à la troisième personne, est bien l'homme que le tribunal a reconnu coupable après une heure et demie de délibéré. 

"Je ne me souviens de rien"

Tout au long de la journée d'audience, Pierre Palmade est apparu hagard, le regard dans le vide. Quand Yuksel Yakut, le conducteur de la Renault Mégane, raconte sa nouvelle vie faite de douleurs, il baisse la tête. Lorsque le président du tribunal fait diffuser des photos des véhicules fracassés lors de l'accident sur un écran, il ose à peine les regarder. Lors de l'énumération des lésions corporelles, il se contente de fixer le sol, les mains croisées.

"Je ne me souviens de rien, ni de l'accident, ni du sauvetage, ni de la scène", assure-t-il. "C'est le noir". Son premier souvenir, c'est l'hôpital : "On me parle de blessés, d'une famille, de la perte d'un bébé. Je comprends que je suis en enfer, que j'ai fait quelque chose de très grave". A la barre, il raconte l'avant, dans sa maison, ces trois jours de "chemsex", "des soirées où on mêle addiction à la drogue et addiction au sexe" avec ses "deux copains de bringue". Ces "sex friends", comme il les décrit aussi, monteront à bord de sa Peugeot 3008. "La 3-MMC [une drogue de synthèse] a tendance à rendre apathique. Je me dis qu'en prenant trois, quatre lignes de cocaïne, ça va me réveiller, et que je vais pouvoir faire des courses".

Le président l'interrompt. "Quand j'entends dire : 'Je vais prendre de la cocaïne pour me réveiller et aller faire des courses', pardon mais..." Le comédien précise sa pensée : "C'est très difficile de rationaliser quelqu'un qui est drogué depuis trois jours. Avec trois jours d'injections, la prudence est effacée". 

"La coke, c'est mauvais parce que c'est bon"

Villiers-en-Bière, la commune où s'est produit l'accident, ne se situe qu'à sept kilomètres du tribunal. Pierre Palmade, qui n'est plus réapparu publiquement depuis l'accident, a fait salle comble pendant l'audience. Pas un centimètre de banc de libre avec une centaine de journalistes accrédités. Des noms connus sont égrainés par le président au moment d'évoquer les témoignages ajoutés à l'enquête. Il y a son amie, la comédienne et réalisatrice Isabelle Mergault. Et Michèle Laroque, avec qui le prévenu a formé un célèbre duo sur les planches pendant de nombreuses années.

La personnalité de Pierre Palmade et son rapport à la toxicomanie ont été au cœur des débats depuis l'accident. Sa vie est une nouvelle fois épluchée mercredi. L'homme explique avoir consommé de la cocaïne depuis l'âge de 20 ans, des drogues de synthèse depuis 2018, et depuis 2020 en injections. "A 35 ans, je me suis dit : 'Pierre, tu n'es plus un fêtard, tu es un cocaïnomane'. La coke, c'est mauvais parce que c'est bon." Il insiste : "La maladie de la dépendance est bien plus forte que la volonté d'arrêter".

La preuve en images, quand il apparaît sur les caméras de vidéosurveillance à l'entrée d'une pharmacie, le 10 février 2023, jour de l'accident. Il avait prêté sa carte bancaire à un ami, pour se réapprovisionner en seringues. Après l'accident, lors de la perquisition, les enquêteurs trouvent du matériel d'injection et des taches rougeâtres dans les chambres.

"Je m'imaginais organiser ses obsèques"

Depuis l'accident, il affirme être "sans travail", n'arrive "plus à monter sur scène". Il vit néanmoins avec 6 000 euros de salaire mensuels, grâce à "des droits d'auteur essentiellement". Il s'est aussi brouillé avec l'une de ses sœurs, Claire. Avec l'autre, Hélène, les relations résistent. Elle s'exprime à son tour à la barre : "J'ai pu assister au désastre de la dépendance (...). Avant l'accident, je m'imaginais organiser ses obsèques. Toxicomane, dans un fauteuil roulant, ruiné", enchaîne-t-elle.

Depuis qu'il se soigne, "il a retrouvé sa vie", assure-t-elle. "Moi, j'ai retrouvé mon frère. Je crois fermement, pour la première fois, qu'il va vraiment faire ce qu'il faut". Pierre Palmade le martèle : il est aujourd'hui totalement abstinent. Il est suivi en hôpital de jour trois fois par semaine, a entrepris une psychothérapie. "Pour l'instant, il fait tout ce qu'il peut, il met toutes les chances de son côté", confirme son parrain aux Narcotiques anonymes, un groupe de parole qu'il a intégré. "Je le guide et je l'accompagne dans son processus de rétablissement, ajoute-t-il. Pierre a beaucoup d'assiduité."

L'artiste, qui a connu son heure de gloire dans les années 1990-2000, replace d'un geste vif et léger la mèche qui barre son front. "Je veux être amoureux, sans drogue. Je commence à ressentir les bienfaits de l'abstinence." Il marque un silence, puis reprend, sans y croire : "La seule chose que j'aime, c'est ma vie d'artiste. Mais je ne suis pas sûr de pouvoir recommencer ce métier."

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