Violent incendie à Marseille : quels impacts sur la qualité de l'air et la santé ?

"La qualité de l'air est revenue à la situation habituelle dans le centre-ville de Marseille et reste dégradée en proximité des zones directement touchées par l'incendie", a fait savoir, mercredi, l'organisme chargé de mesurer la qualité de l'air dans la région.

Article rédigé par Louis San
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5min
Le ciel de Marseille est obscurci par le panache de fumée d'un violent incendie survenu aux Pennes-Mirabeau, qui a fini par toucher la cité phocéenne, le 8 juillet 2025. (FELICE ROSA / HANS LUCAS / AFP)
Le ciel de Marseille est obscurci par le panache de fumée d'un violent incendie survenu aux Pennes-Mirabeau, qui a fini par toucher la cité phocéenne, le 8 juillet 2025. (FELICE ROSA / HANS LUCAS / AFP)

Une brume opaque et marron, des panaches de fumée visibles depuis l'espace. Le violent incendie qui a touché Marseille, mardi 8 juillet, a obscurci le ciel de la cité phocéenne pendant une grande partie de la journée. Conséquence directe : la qualité de l'air s'est nettement dégradée avec, à 13 heures, un pic de particules PM10 à 120 microgrammes par mètre cube et par heure (µg/m3/h) à la station de Marseille-Longchamp, selon les données d'Atmosud, l'organisme chargé de mesurer la qualité de l'air en région Provence-Alpes-Côte d'Azur. "Dans les quartiers nord, on a des capteurs qui ont dépassé les 800 µg", souligne auprès de franceinfo Damien Piga, directeur des relations extérieures d'Atmosud. Des niveaux bien supérieurs au seuil d’information et de recommandation (50 µg) et au seuil d'alerte (80 µg), établis par le ministère de la Transition écologique.

La situation s'est toutefois rapidement améliorée. A 23 heures mardi soir, le chiffre a chuté à 8 µg à la station de Marseille-Longchamp. "La qualité de l'air est revenue à la situation habituelle dans le centre-ville de Marseille et reste dégradée en proximité des zones directement touchées par l'incendie", a fait savoir Atmosud dès mercredi matin. Les relevés "correspondent aux résultats habituellement constatés pour un mois de juillet et ne présentent pas de risques pour la population", a insisté la préfecture de Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Ce rapide retour à la normale ne doit pas banaliser l'événement. L'épisode de mardi a été "très intense avec des concentrations très importantes" de particules fines, remarque Damien Piga. Or "l'OMS dit qu'il n'y a pas de seuil en dessous duquel il n'y a pas d'impact sur la santé des populations", rappelle-t-il.

"Nous savons que ce n'est pas anodin, que ce n'est pas neutre d'avoir respiré des concentrations aussi importantes de particules fines."

Damien Piga, directeur des relations extérieures d'Atmosud

à franceinfo

Les fumées qui ont saturé l'air marseillais étaient composées en grande partie de "carbone suie", qui est généré lors d'une combustion incomplète et s'apparente au dépôt noir que l'on retrouve sur les parois des cheminées, poursuit Damien Piga. Des effets sont parfois immédiatement visibles en cas d'inhalation importante.

Irritation et risques accrus pour les personnes asthmatiques

"Cela devient irrespirable, mes yeux me piquent, ma gorge me gratte", a témoigné un habitant en pause déjeuner dans le quartier du Vieux-Port, mardi, auprès de France 3 Provence-Alpes-Côte d'Azur. "Les symptômes peuvent aller de l'irritation (inflammation du nez, de la gorge, des bronches et des yeux) à l'intoxication", a expliqué Denis Charpin, professeur de pneumologie à la retraite, toujours à France 3 Provence-Alpes-Côte d'Azur. "Les personnes asthmatiques présentent une plus grande sensibilité à ce type de pollution, avec une irritation beaucoup plus rapide", confirme Damien Piga.

Lors des pics de pollution, un nombre plus important d'entrées aux urgences est enregistré. "Il devrait y avoir des entrées dans les hôpitaux", anticipent Damien Piga et Denis Charpin. L'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille (APHM) fait savoir à franceinfo qu'elle n'a "pas constaté d'augmentation significative liée à ces pathologies" depuis mardi, sans exclure un éventuel renversement de vapeur dans les "prochains jours".

De potentiels effets à long terme

Des effets à retardement sur la santé ne peuvent pas être exclus. Si les irritations liées aux fumées massives de mardi sont probablement de courte durée, Damien Piga note qu'il existe toujours un risque que l'état d'une personne affectée ne revienne pas tout à fait à la normale, et qu'une pathologie se développe à long terme.

En effet, "la pollution atmosphérique présente un impact sur la santé à court et à long termes et a été classée comme cancérogène pour l'homme", a écrit la Haute Autorité de santé dans une note de cadrage datant de 2021. Elle joue "un rôle (...) sur la perte d’espérance de vie et la mortalité, mais également sur le développement de maladies cardiovasculaires, maladies respiratoires et du cancer du poumon", écrit Santé publique France.

Or, la pollution atmosphérique ne se résume pas à celle liée à l'ozone, souvent observée lors des pics de chaleur en France. Selon le chercheur Tarik Benmarhnia, la donne pourrait changer, avec une part croissante des feux de végétation dans cette pollution. Lors d'un colloque organisé par l'université Paris Saclay en avril 2024, il a estimé que le contexte en Californie, sur lequel il a travaillé, était "particulièrement pertinent" au regard de l'évolution de la situation en France hexagonale. Dans cet Etat américain qui borde l'océan Pacifique, les "panaches de fumée constituent la source principale de particules fines". Désormais, "s'intéresser à la pollution de l'air en Californie devient une préoccupation en lien avec ce type d'événements". Autant de raisons de ne pas minimiser les éventuels effets des fumées générées lors des incendies en France.

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